[Critique] LA GUERRE EST DECLAREE de Valérie Donzelli

Publié le 31 août 2011 par Celine_diane


Roméo rencontre Juliette. Ils s’aiment. Font un bébé. Le diagnostic est implacable : Adam a une tumeur au cerveau. Autobiographie. Cancer. Deux mots qui forcent d’emblée à un sérieux de circonstance. Deux mots qui feraient passer l’auteur de toute mauvaise critique pour un être infâme et sans cœur. Le décor est posé. Pourtant, il s’agit bien de cinéma ici, et d’art de manière plus générale. Valérie Donzelli l’a bien compris. Ou comment mettre, grâce à un film, ses douleurs au placard. Pour oser la catharsis, sans plomber le moral du spectateur pour des semaines, elle opte pour l’humour. Le triomphe du rire, clame la Une du journal que l’on lit à l’hôpital. Faire la sourde oreille aux mauvais pronostics. Cultiver le positivisme. Se refuser à toute complaisance. L’idée est bonne et la démarche, tout comme le combat relaté ici, est courageuse. Sauf que. Tout comme dans La Reine des Pommes, où Donzelli disséquait une rupture amoureuse sous un angle burlesque, le procédé ne lui permet jamais de poser sa caméra à la bonne distance. Du coup, elle navigue sans cesse entre deux extrêmes : voyeurisme gênant et distanciation froide.

C’est simple : La Guerre est déclarée, malgré toute sa bonne volonté, sombre soit dans l’un, soit dans l’autre, et ce malgré des séquences émotionnellement bouleversantes telles que l’annonce aux proches de la maladie du petit, ou les larmes du père sur un air de guitare. A trop vouloir crier haut et fort sa volonté d’éviter coûte que coûte toute forme d’apitoiement, le film se vautre, forme et fond, dans le spectacle du malheur façon Delarue, façon "regardez comme je suis digne, dans mon combat pour la vie ". C’est louable, beau, ça force le respect, mais ça ne fait pas un bon film. Donzelli fait rimer dignité et théâtralité, choisit de (re)jouer le malheur à distance, de (re)jouer la peine, de travestir l’horreur en légèreté (plus confortable pour Monsieur Lambda !), et se retrouve in fine un peu piégée dans une démarche qui refuse le naturel. Parce qu’elle annihile dans une édulcoration revendiquée la gamme d’émotions que contiennent spontanéité et justesse. C’est ce qui explique, qu’au-delà du sujet dérangeant, on est du mal à entrer entièrement dans le film, qu’on le regarde, comme l’on regarderait un docu poignant à la télé.