Voilà un bouquin qui nous plonge, de la première à la dernière ligne, dans une ambiance de terreur : le casse de la Banque de France le 16 décembre 1992 à Toulon.
La Banque de France, c’est une institution. Créée en février 1800 par Napoléon, elle est restée aux mains de l’état jusqu’à nos jours. Les coffres de la succursale de Toulon sont pleins à craquer de billets, devises et lingots d’or. Plusieurs centaines de millions de francs. Mais en 1992, la sécurité laissait à désirer. Incurie, désinvolture. Les pouvoirs publics décident de remettre de l’ordre et d’installer un nouveau système d’alarme. C’est le moment ou jamais. Une fois la nouvelle alarme installée, un braquage deviendra plus difficile, voire impossible.
« Marc », truand notoire, se profile d’emblée comme le cerveau de la bande. Depuis le début, il est sceptique. Le coup lui est proposé par un trio un peu léger d’amateurs, qui semblent quand même détenir des informations capitales. Marc se méfie au plus haut degré de ces loustics pas très clairs et pas bien organisés. Mais une des personnes du trio, Hélène, est employée de la banque, à un poste clé. Elle possède des données confidentielles. Hélène relève le niveau. Elle a quelque chose… du charme certes, de l’assurance aussi, et des idées bien claires qui plaisent au truand, toujours avide d’un bon coup. Celui-ci s’entoure d’une équipe de choc, des habitués, des pros, qui prennent les choses en mains et organisent le casse d’une façon quasi-scientifique… Monstrueuse aussi.
Leur plan : prendre en otage un employé de la banque, « Manu », lui passer une ceinture d’explosifs à la taille, et lui enjoindre de forcer l’accès aux coffres. Ici, l’auteur du bouquin se glisse dans la peau de cet homme transi de peur, qui se fait tabasser sous les yeux de sa femme et de son fils. Les voix narratives alternent entre Manu et Marc. Le lecteur est tantôt saisi d’effroi en lisant les pensées de ce fonctionnaire, puis transi d’un effroi différent, aussi intense, en repassant dans l’esprit du truand.
C’est un récit très réaliste que nous conte l’auteur, Jean-Claude Kella, et pour cause : ce fut lui-même un caïd dès son plus jeune âge. Il a trempé dans de nombreuses affaires, il a été un des magnats de la French Connection, ce trafic de drogue juteux entre la France et les USA, entre les années ’40 et ’70. Une page lui est dédiée sur Wikipedia (voir ici).
On dégouline de sueur en lisant ce livre extrêmement prenant. J’ai même senti le flingue entre mes omoplates, j’ai senti l’auteur qui me glissait à l’oreille : « Fais pas de gaffe petit. Dis pas de connerie sur mon bouquin, sinon… » Quoi qu’il en soit, ce n’est son Beretta 9 mm qui me fait dire qu’il a du talent (ou si peu), ni même l’envoi par son agent de presse G. Paris, que je remercie. Ce bouquin est réellement captivant, écrit dans un style clair et sans fioritures. On peut éventuellement regretter que la fin ne soit pas un peu plus étoffée, le procès, le dénouement. On aurait aimé lire 50 ou 60 pages de plus.
Finalement, c’est ce pauvre Manu qui aura le plus souffert, victime sensible qui se retrouve accusé, cuisiné par les flics de l’Évêché, le commissariat de Marseille (ironie du sort, c’était vraiment à l’origine le bureau de l’Évêque). Quant au succès de l’opération, je n’en dirai pas trop. Le butin de 160 millions de francs ne sera pas complètement retrouvé… Il aurait disparu dans des placements douteux ! L’arroseur arrosé, conclut l’auteur.
« Sise dans une imposante demeure du XIXe siècle, la banque était si belle que nous en tombâmes tous amoureux au premier coup d’œil. C’était elle qui nous permettait d’accéder à nos désirs les plus fous, et nous mourrions d’envie de la prendre entre nos bras. »
Hold-up de Jean-Claude Kella. Éditions Don Quichotte
Date de parution : 22/09/2011 Isbn : 2359490451