Sylvain RICCIO – Poussière d’écume : 6,5/10
Un très bon premier roman qui révèle un auteur qui a déjà sa propre « griffe ».
Je ne saurais néanmoins dire si j’ai aimé ce roman, si j’ai aimé l’histoire ; mais je ne saurais pas dire non plus si je n’ai pas aimé ce roman, cette histoire.
Oui, étrange.
Mais commençant d’abord avec l’intrigue :
« Poussière d’écume » est l’histoire de Karel Rybek, qui travaille au commissariat de Prague. Mais il n’est pas l’un des policiers affrontent la rue et tentent d’arrêter les criminels, les héros de notre policier du soir. Non, Karel est l’un des rouages gris ; il classe les papiers, tamponne les formulaires sans jamais sortir de son bureau, aucune carrière ne s’ouvre devant lui. Karel effectue ce travail ennuyeux de façon machinale dans son petit cagibi sans fenêtre. Il voit ses « collègues », les vrais policiers, s’agiter dans les bureaux et se moquer de lui, il observe la jolie secrétaire qui semble ne pas le voir. Il est effacé et malheureux. Karel Rybek a perdu ses illusions et abandonné ses rêves de liberté.
C’est alors qu’il goute, lors d’une soirée chez un voisin, à la drogue et à partir de là commence la descente aux enfers.
Nous suivons cette véritable dégringolade du jeune Karel sans pouvoir l’arrêter. Mais on se demande s’il a véritablement envie de cesser, il se sent si fort lorsqu’il prend sa dose !
Il retrouve un peu ses rêves d’enfance, sauf qu’au réveil, tout est pire encore !
L’auteur est un maître de l’observation.
A travers ce roman, nous avons l’impression de sentir l’odeur du bureau de Karel, de son petit appartement, de humer la saleté, de déambuler à ses cotés les ruelles sombres de Prague, de toucher du doigt l’arc-en-ciel éphémère que lui offre la drogue, cette puissance imaginaire qu’elle lui confère.
Sylvain Riccio observe tout, avec un amour du détail qui ne devient pas agaçant. Il glisse ses yeux sur un endroit, s’attarde sur un ou deux points, puis poursuit son chemin, ce qui fait qu’on ne s’ennuie pas.
Que ce soit le marin qui habite dans l’appartement voisin de celui de Karel ou encore le chat de ce dernier, tous sont soumis à la même scrutation.
Des histoires du passé nous sont livrées, quelques anecdotes qui nous apprennent qui est Dashnor, le grand Dashnor que tous aimeraient avoir comme ami, le voisin de Karel, nous apprenons à connaître son dealer, celui qui s’est nommé Vodnik …
C’est un roman astucieux.
Donc, j’ai beaucoup aimé.
Mais …
… je n’ai pas été totalement convaincue. Tout simplement en raison de la naïveté qui, parfois, transpire entre les lignes. Prenons Karel, qui nous est présenté dès le quart de couverture comme un « gratte-papier ». Nous le comprenons vite, c’est un petit fonctionnaire sans envergure, un gratte-papier sans ambitions. Mais ce mot est répété si souvent qu’il en devient agaçant.
Ensuite, certaines anecdotes sont trop simplistes, presque puériles. Des histoires qu’on raconte aux enfants, des histoires de rêves illusoires, des amourettes simplistes.
Un coté presque enfantin qui brise la fluidité.
Enfin, les caractères sont un peu trop grossiers, voire caricaturaux. Karel, personnage central, était parfait, il avait ses difficultés, son enfance, sa fragilité, mais Dashnor est trop « héroïque », physiquement, mentalement, généralement. Les collègues de Karel sont trop standardisés, ils sont tous les mêmes à le harceler et l’ennuyer. Et la secrétaire dont il est secrètement amoureux apparaît vraiment comme le cliché même de la secrétaire jeune et bébête qui se laisse impressionner par une belle voiture.
Malgré tout cela, j’ai aimé la « couleur » du livre.
Un premier roman qui impose d’ores et déjà le style même de l’auteur, reconnaissable sans le moindre doute.
Et le reste, et bien, je suis certaine que cela évoluera avec l’expérience et nous promet de très beaux romans à l’avenir.
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