La posture du président de la République et de son gouvernement est relativement habile. En affirmant être prêts à constitutionnaliser l’interdiction des déficits publics, ils veulent à la fois
se racheter une bonne conduite mais aussi mettre en difficulté le PS, qui cherche à donner des gages de bonne gestion aux marchés mais qui ne veut pas voter le texte du gouvernement à quelques
mois de l’élection présidentielle. Mais cette posture est une imposture.
En effet, Nicolas Sarkozy a un lourd passif sur les finances publiques. En 1995, Alain Juppé avait affirmé que le ministre du budget d’Edouard Balladur avait laissé les finances publiques dans un
état « calamiteux », qui avait abouti à de fortes hausses d’impôts pour tenir les objectifs de Maastricht. En 2007, Philippe Séguin avait dénoncé le « paquet fiscal » et
un rapport de la Cour des Comptes de 2010 affirmait
que plus de la moitié de la hausse des déficits ne venait pas de la crise.
En outre, le plan présenté hier reste un assemblage de petites rustines à mille lieues de lanécessaire
réforme de notre fiscalité. Le premier ministre déshabille encore un peu plus la loi TEPA, mais sans aller jusqu’au bout. Et comme le souligne justement Hervé Nathan, la contribution des riches est
plus symbolique qu’autre chose : elle est temporaire, et il faut surtout la comparer à la réduction de l’ISF, qui
sera sans doute supérieure à 2 milliards (alors que le bouclier fiscal coûtait 900 millions).
Un contresens économique
Dans un remarquable dossier de vingt pages sur le
sujet (tout aussi bon que celui sur la
monnaie, sur lequel je reviendrai plus tard), Joël Halpern dénonce cette « règle de plomb », reprenant, sans le savoir, quelques heures plus tard le terme employé par Nicolas Dupont-Aignan. Il défend la politique contra cyclique budgétaire, qui s’est
imposée après la Grande Dépression des années 1930, qui consiste à amortir une crise en jouant sur les déficits (ce qui a été fait depuis 2008).
Comme André-Jacques Holbecq, il dénonce le rôle des
intérêts de la dette et des baisses d’impôt qui sont bien plus responsables de l’état de nos finances publiques que l’augmentation des dépenses. Il critique la redistribution des contribuables
vers les rentiers engendrée par notre gestion de la dette publique. Enfin, il prend position en faveur d’une monétisation des dettes publiques. Bref, il démontre que le débat les dettes publiques mérite mieux que la voie sur laquelle il est
engagé.
Bref, il est pour le moins paradoxal qu’un gouvernement incontinent financièrement veuille imposer à ses successeurs des règles qu’il ne s’est pas appliquées à lui-même, d’autant plus que la
crise ne les auraient rendues inapplicables. Bref, il s’agit d’une mauvaise règle qui n’est qu’une posture médiatique. Pire, alors que le gouvernement renforce l’austérité pour les Français,
il dilapide encore plus pour sauver les créanciers des pays
européens en difficulté.
Bref, toute cette histoire de camisole budgétaire, ou règle de plomb, est une double imposture. Imposture pour camoufler la mauvaise gestion des derniers publics depuis plus de quatre ans.
Imposture car cette règle est un parapluie pour beau temps, inapplicable en cas de crise.