Particulièrement les vieilles rues de sa ville natale, Hama, l'unes des plus vieilles villes de Syrie où y circule toujours quelques enfants et où y grandissent des familles comme la sienne dans les années 50. S'y côtoient ancienneté et futur. Marcher jusqu'au moulin Les Norias Sur l'Oronte où le calme est total. Encore là, de vieilles pierres côtoient un moulin, considéré comme techniquement évolué, qui soulève l'eau et produit une petite bruine sur les visages des passants. L'extrème chaleur perpétuelle fait oublier que cette eau est en fait brune et sale. Ali Farzat apprécie la communion des sens qui se traduit en lui quand il marche dans la ville qui l'a vu grandir.
Fin observateur comme le métier l'exige mais surtout fin penseur, Ali Farzat gagnera le premier prix en 1980 à l'Intergrafik International Festival de Berlin. Ses dessins commenceront à être publier dans le journal français Le Monde. Une exhibition de ses dessins en France en 1989 lui vaudra une condamnation à mort par Saddam Hussein doublée d'une interdiction de séjour en Irak, en Lybie et en Jordanie. Ce dessin qui montrait un général offrir des médailles à des citoyens arabes qui se mourraient de faim y est pour beaucoup.
Homme de ville de par son travail, Farzat pensait souvent à Hama. Sa ville de naissance. Pourquoi pensait-il à sa naissance ce jeudi matin là? Il avait travaillé toute la nuit. Il revenait de son studio à 4h30 du matin au coeur de Ummayad Square et s'apprêtait à retourner chez lui. Lui, si fin observateur n'a jamais rien vu venir.
"On verra ce que tu dessinera à partir de maintenant, prends-ceci comme un simple avertissement" lui a-t-on craché avant de l'abandonner sur le bord de la route menant à l'aéroport, le visage tuméfié.
Il est toujours courageux de s'attaquer à plusieurs sur un homme de 60 ans.
Des dizaines de personnes sont passées aux côtés de son corps sans intervenir, terrorisés par la brutalité des évènements.
Le gouvernemenr de Bashar Al-Assad a perdu le contrôle.
La tolérance vis-à-vis l'intolérance devrait faire de même.
"Qu'il est beau mon pays" a quand même pensé Ali Farzat sur son lit d'hôpital.
Nous sommes tous Ali Farzat.