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Emportée, Paule du Bouchet

Publié le 27 août 2011 par Antigone

En quel lieu nous sommes-nous donc tellement manquées ?

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"René Char l'aima de façon constante, jamais démentie, parce qu'il savait que la paix était là, la condition de sa paix à lui et que, s'il n'était pas à même de pouvoir la goûter, il pouvait à tout moment la toucher, la cueillir. Il la savait là."

L'auteure évoque sa mère, son souvenir, et l'ombre de cet homme qui la lui a enlevé alors qu'elle n'avait que six ans. Une passion dévorante, lumineuse, impérieuse, a en effet alors jeté Tina Jolas dans les bras de René Char, loin de sa famille. Il est question là de douleur, de manque et de tendresse. La compréhension est bien difficile à atteindre, mais le temps répare, apaise, crée d'autres attentes.
Le roman répond avec tendresse aux questionnements de cette femme aimée de sa fille malgré les défaillances, au seuil de sa mort : "Ai-je vraiment vécu ce que j'ai vécu ?".

Le thème de Emportée m'intéressait beaucoup. Nous savons combien souvent près de grands hommes se sont tenues de grandes femmes, moins connues. Ici, l'amoureuse est de plus aussi une mère, et une mère "pas-comme-les-autres", le regard ailleurs, l'attention en éveil vers l'autre, et jamais pour sa fille, son fils. L'écriture des premières lignes m'a désarçonnée, je dois le dire, je l'ai trouvée âpre, altérée par la tension sans doute. Puis, le style est devenu plus fluide, le propos plus clair et l'émotion a finalement filé sa trace insistante dans les blancs du texte. J'ai refermé ce livre, l'âme rêveuse, soudain témoin d'une rencontre entre deux êtres, une rencontre qui aurait pû être et que le destin a décidé de laisser de côté au profit de la création poétique et de la passion littéraire... On aurait aimé qu'il en soit autrement, peut-être.

"Je suis aujourd'hui à la recherche d'un temps déchiqueté qui, même lorsqu'il était du présent, se lisait à travers le filtre de la discontinuité. J'écris pour savoir si cette discontinuité est d'une faillite de ma mémoire ou si elle avait une réalité. J'écris au fil des jours, comme si cet acte pouvait fonder non seulement la continuité d'aujourd'hui, mais aussi, peut-être restaurer celle d'autrefois. Comme si rassembler l'épars de mes émotions pouvait rendre valide un passé qui a souffert de déconstruction, de scissions, de schismes et de cloisonnements."

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Editions Actes Sud - 15€ - Mars 2011

Merci Aifelle ! - D'autres lectures ... Ptitlapin - Un article très complet sur Poézibao


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