Le secret de l’Espadon est la première aventure des héros Blake et Mortimer. Elle a été publiée en 1946 en quatrième de couverture du Journal de Tintin. Edgar P. Jacobs y donne sa version de la guerre moderne, avec un dirigeant qui représente le mal universel et la volonté de devenir le Maître du Monde – Bassam Damdu – une incarnation d’Hitler devenu japonais, des hommes politiques présents sur le terrain – comme Winston Churchill, un traitre absolu qui structurera toute la série : le « colonel » Olrik.
La relecture de cette œuvre historico science-fictionnesque présente de nombreuses similitudes avec l’actualité. On retrouve les thèmes qui seront récurrents dans la suite de l’œuvre comme le combat dans des grottes ou des souterrains. Ici, l’allusion à la ligne Maginot est transparente, avec le train électrique, les couloirs, les sas, les halls immenses qui seront bien plus tard repris dans les films de James Bond. L’utilisation de scaphandres permettant l’usurpation d’identité, les uniformes verts décalqués des officiers de l’armée allemande, la fiction devenue réalité d’une arme absolue mise au point in extremis mais qui va changer le cours de l’histoire….mais la progression dans les entrailles d’un bunker fait aussi penser aux troupes des insurgés libyens dans le QG du colonel Khadafi, et les éructations e Bassam Damdu ressemblent irrésistiblement aux appels audio à la résistance de ce dernier.
Evidemment, la bande dessinée a vieilli, mais elle repose sur une construction d’une grande rigueur, avec des renversements de situation spectaculaires, des paysages d’une grande beauté, un découpage cinématographique très précis. Le lecteur se retrouve dans les montagnes sauvages de l’Iran, sous la surface du détroit d’Ormuz, au Pakistan, repaire des ennemis. Cela ne vous dit rien ?Jacobs était un visionnaire. C’est devenu un classique. Un plaisir à retrouver en ce dernier jour de vacances, en se promettant de s’y replonger dès les vacances prochaines.