Les Bien-aimés

Par Tedsifflera3fois

De l’amour léger des sixties à l’amour lourd des nineties, Les Bien-aimés vogue entre l’insouciance de Dans Paris et la gravité de La Belle Personne. Mais pour rendre palpable ces deux tonalités, Christophe Honoré multiplie les intrigues, livrant un film inconsistant et décousu.

Synopsis : Du Paris des sixties au Londres des années 2000, Madeleine, puis sa fille Véra vont et viennent autour des hommes qu’elles aiment. Mais toutes les époques ne permettent pas de vivre l’amour avec légèreté…

Christophe Honoré semble avoir voulu faire une synthèse de ses films précédents dans Les Bien-aimés. La référence la plus directe est celle aux Chansons d’amour, son seul autre film musical. Mais Les Bien-aimés fait se succéder deux époques et deux ambiances qui se sont toujours partagées le cinéma du réalisateur.

Les sixties, leur légèreté amoureuse, leur liberté colorée nous rappellent Dans Paris et Non ma fille tu n’iras pas danser. Au contraire, les nineties et le désespoir amoureux qui les recouvre évoquent plutôt La Belle Personne, et parfois même Ma mère, quand le film se permet des embardées glauques. On retrouve même Homme au bain dans la fascination pour les corps nus, souvent désirables et parfois lugubres.

Ensoleillé dans sa première partie, métallique par la suite, Les Bien-aimés multiplie les pistes, les humeurs, les intrigues et les sujets secondaires. Comme si le réalisateur s’était constamment perdu dans son histoire et avait tenté de la relancer à chaque fois par un nouveau rebondissement, une nouvelle idée, un nouveau sursaut.

Les péripéties s’enchaînent de manière arbitraire et artificielle, entre prostitution, Printemps de Prague, homosexualité, sida, deuil et 11 septembre, entre la France, la République Tchèque, l’Angleterre et le Canada. Honoré va dans toutes les directions en même temps, évoque à peine un mélodrame qu’il en crée déjà un nouveau.

Pour finalement, après une série de digressions sans véritable intérêt, retomber miraculeusement sur ses pieds dans une scène finale d’une grande virtuosité. Malheureusement, on ne sauve pas un film raté dans ses cinq dernières minutes. La conclusion, plutôt floue et très discutable, semble condamner ceux qui laissent à l’être aimé sa liberté. Ceux-là ne seront pas aimés en retour, mais plutôt méprisés (et on pense d’ailleurs au Mépris et au désamour soudain de Brigitte Bardot pour Michel Piccoli).

Sauf que Christophe Honoré confond liberté et mensonge, légèreté et égoïsme. Dans son histoire, où les personnages se trompent à tour de bras, mais aussi dans sa mise en scène, devenue pesante et artificielle. La photographie est parfois élégante et charnelle, parfois maniérée. A trop lorgner vers Xavier Dolan, le réalisateur de Dans Paris perd de sa vitalité au profit d’un esthétisme narcissique qui se ressent notamment lors des parties chantées, mises en image sans idée et sans mouvement. Les mélodies d’Alex Beaupain, toujours identiques, n’ont plus la saveur de celles des Chansons d’amour. Quant aux thématiques, elles s’insèrent mal dans le film, donnant l’impression que le scénario a été construit pour relier entre elles des chansons d’amour déjà écrites.

Le scénario semble avancer au gré du vent et des envies soudaines du réalisateur. Avec pour ligne d’horizon la dualité de l’amour, entre légèreté et gravité. Mais là encore, la liberté de ton se transforme en incohérence. Et le film sonne faux.

Note : 3/10

Les Bien-aimés
Un film de Christophe Honoré avec Chiara Mastroianni, Catherine Deneuve, Ludivine Sagnier, Louis Garrel, Milos Forman, Paul Schneider, Rasha Bukvic et Michel Delpech
Comédie musicale – France – 2h19 – Sorti le 24 août 2011