Il faut bien reconnaître que si la capitale française est aussi celle de la cinéphilie mondiale, Bollywood est en revanche une de ses lacunes, préférant laisser à Londres l’honneur en Occident de déchaîner les passions pour les stars indiennes du grand écran. Le dernier Bollywood à être officiellement sorti en salles en France reste Saawariya (si l’on excepte My name is Khan, un Bollywood pour le grand public occidental), et cela se compte désormais en années. Pour les amateurs du genre, il n’y a donc d’autre choix que de se contenter du petit écran pour découvrir les films de Preity Zinta et Rani Mukherjee… et heureusement, les festivals. Et justement chaque été, le Brady, idéalement situé à quelques pas du Passage du même nom regorgeant de restaurants indiens, programme un festival de films Bollywood.
Depuis le temps que je me clame amateur du genre, il était temps que j’aille faire un tour estival au Brady, et sous la chaleur écrasante de Paris, je me suis donc réfugié dans la salle du boulevard de Strasbourg pour Fanaa, l’un des gros succès indiens de l’année 2006, qui n’a évidemment jamais pointé le bout de son nez dans les salles françaises. Bien sûr, il s’agit d’une tragique et épique histoire d’amour. L’héroïne en est Kajol, dont la renommée n’est plus à faire chez les amateurs de Bollywood (en France, on l’a vue dans le culte La famille indienne, ou plus récemment dans My name is Khan). Elle incarne Zoomi, une jeune femme aveugle qui quitte ses parents protecteurs pour Dehli, où elle doit avec des amies participer à une grande soirée consacrée à la Fête Nationale. Lors de sa visite de la capitale, Zoomi rencontre Rehan, guide touristique de son état, charmeur, blagueur, et poète à ses heures perdues (interprété par Aamir Khan, le héros de Lagaan). La jeune femme tombe vite amoureuse alors que les sentiments de Rehan sont plus secrets.
Et dans cette salle 2 du Brady, il n’a pas été de tout repos de se plonger dans le film de Kunal Kohli. Mais le tout petit écran haut perché ne fut pas le plus perturbant lors de cette projection. Ni finalement le fait que Fanaa nous était projeté en DVD, avec ce que cela entraîne de pertes de netteté et de luminosité. Ce ne fut pas non plus les quelques spectateurs poussant la porte de la salle pendant le film, soit confondant avec la salle 1, soit pour voir ce qui passait dans la nôtre, allumant presque la salle avec la lumière du couloir tant la salle 2 est petite et la porte proche de l’écran. Et puis non, le plus perturbant ne fut même pas non plus ces bruits incessants de téléphone, tout au long du film, cette petite sonnerie annonçant certainement l’arrivée d’un sms, à peu près toutes les 10 ou 15 minutes.
Non, le plus perturbant lors de la projection de Fanaa se trouvait au plafond. Une bouche d’aération qui semble-t-il reliait directement la salle au hall du cinéma, à l’étage au-dessus. Une bouche d’aération par laquelle nous avons entendu pendant tout le film ce qui se passait dans le hall, les spectateurs achetant des places pour l’autre salle, le caissier discutant avec les clients, et même, dès que quelqu’un entrait ou sortait du hall, les bruits du boulevard de Strasbourg, les scooters, les klaxons, les crissements de pneus entrant dans la salle et se mélangeant aux sons de l’Inde que nous offrait Fanaa. Entre Paris et Dehli, je ne savais pas toujours où je me trouvais. Le film était bien assez mineur pour que je ne m’en offusque pas plus que cela, peut-être heureusement.