Magazine Cinéma
Cher journal de Bridget Jones, je me suis, l'air de rien, tapé quelques films durant la pause estivale, que j'ai essentiellement consacrée, par ailleurs, à ne rien faire, pour ne pas changer. Parmi les gentils blockbusters et autres comédies qui tâchent, une comédie se distingue, et pour la première fois, semble rencontrer son public en France, conjurant la malédiction qui veut que les films de Judd Appatow ne marchent jamais chez nous. Ce film, c'est Bridesmaids (diffusé dans nos salles sous le titre bien pourri de Mes Meilleures Amies) (on sera bien emmerdé quand ils sortiront une suite) (Mes Meilleures Amies 2 ? Mes Encore Meilleures Amies ? Mes Nouvelles Meilleures Amies ? De Toute Façon Ces Filles Ne Sont Pas Vraiment Mes Amies Ce Sont Juste Les Amies De Ma Meilleure Pote Qui Se Marie ?), et il existe au moins 10 bonnes raisons d'aller le voir.
10) Jill Clayburgh, que pour ma part j'identifierai toujours comme étant la maman d'Ally McBeal, y joue son dernier rôle, avant qu'une leucémie ne l'emporte à la fin de l'année 2010. Habituée aux seconds rôles de cinéma (ces dernières années, on l'a surtout vue dans le rôle de la mère du héros ou de l'héroïne dans des films comme Love and other drugs ou Fools Rush In, mais aussi et surtout à la télévision, notamment dans Dirty Sexy Money), Jill Clayburgh a reçu le Prix d'interprétation féminine du Festival de Cannes en 1978. Sa présence dans le film est, logiquement, un peu émouvante. Le fait de "caser" son personnage avec l'acteur qui campait l'affreux Jack Billings dans Ally McBeal n'est probablement qu'un clin d'oeil involontaire pour ceux qui, comme moi, n'ont que ça à faire de relever ce genre de détails...
9) La scène de la soirée des fiançailles, ou le double-speech le plus grotesque vu au cinéma ces dernières années...
8) Jon Hamm en gros blaireau. Après Sucker Punch plus tôt cette année, on remarquera que Jon Hamm se détache avec aisance de son rôle de Don Draper. Ici, il incarne une espèce de grosse brêle consciente de son sex-appeal qui en profite pour se comporter comme un gros ruffian. Et ça marche très bien.
7) Melissa McCarthy, dans le rôle de l'équivalent féminin (en moins boulet) de Zach Galifianakis : elle réussit à faire d'un rôle a priori assez standard (la grosse supposément marante parce que grande gueule et masculine) une composition très intéressante sur les femmes décalées et la manière dont on peut faire de ses différences un atout pour réussir malgré les autres. J'ai trouvé qu'en dehors des deux bridesmaids "vedettes" du film, c'était celle qui s'en tirait le mieux, et pas forcément avec le rôle le mieux écrit ou le mieux développé, pourtant.
6) L'excellent travail d'écriture d'Annie Mumolo et Kristen Wiig, qui jouent très bien avec le registre de la grosse vacherie qui tâche, est toutefois une des qualités clés du film. J'ai très sincèrement ri, et très fréquemment. Bon, c'est pas du Shakespeare, mais très franchement on ne va pas voir une comédie produite par Judd Appatow pour ça. J'aurais voulu que le film dure plus longtemps juste pour qu'il y ait plus de répliques.
5) L'opportunité de (re)découvrir l'existence de Wilson Phillips
4) Rose Byrne, remarquée dans la série Damages, et au cinéma dans Insidious, X-Men : First Class ou Marie-Antoinette, joue ici une némésis parfaite pour l'héroïne, dans la lignée des grandes oppositions et autres "meilleures ennemies" du cinéma. Outre le cliché de la brune contre la blonde, Rose Byrne, dans son personnage d'Helen, incarne parfaitement la "méchante" de comédie. Mieux dotée que l'héroïne, plus populaire sur le papier, plus riche, plus douée pour tout : on comprend dès le premier instant qu'elle va en mettre plein la tronche à la malheureuse Annie Walker. Et effectivement, elle ne s'en privera pas, tout en conservant un calme olympien et une maîtrise d'elle-même quasi-permanente. La composition est digne des pires connasses riches de fiction, en tout cas...
3) Le plaisir d'un vrai chick movie qui plaira aussi aux garçons. Car au-delà de la "déclinaison pour filles" de Very Bad Trip (bachelorette party qui part en sucette, personnages archétypaux que tout oppose et qui vont donc se friter, le personnage grassouillet et socialement inadapté...), Bridesmaids (je n'arrive pas à me faire au titre "Mes Meilleures Amies") (MMA) (lol) (pardon) est une vraie comédie, avec certes des enjeux romantiques et des clichés éculés (mariage cucu, Paris version "au secours ils sont visiblement jamais allés à Paris"...), mais aussi de l'humour pipi-caca, des instants de grosse loose et de vrais moments de franche rigolade, dont peu de comédies dites "romantiques" peuvent se targuer.
2) Apprendre les meilleures infractions au code de la route à commettre au volant d'une vieille poubelle, d'une certaine manière, ça na pas de prix.
1) Kristen Wiig. Cette femme est formidable. A la fois auteur et actrice principale du film, elle le porte de bout en bout et réussit à passer par toutes les phases de son personnage, y compris les plus trash, tout en restant dramatiquement sympathique. Charismatique sans éclipser le reste du casting, elle est hilarante de la première à la dernière scène tout en conservant cet air de ne pas du tout jouer un rôle de composition. Pour le coup, c'est une vraie girl next door, jolie sans donner l'impression d'en être consciente, un peu gauche et terriblement attachante. Pour info, Kristen Wiig et Maya Rudolph sont des transfuges du Saturday Night Live, et cela se voit dans leur capacité à incarner des filles ordinaires à qui il arrive des trucs bien nuls (et bien drôles). D'ailleurs, pour anecdote, Kristen Wiig avait grandement contribué il y a quelques mois, sans le vouloir, à la "célébrité" de Craigery Morgan... Il est quasiment impossible, pour quiconque s'est déjà senti un peu loser dans la vie, de ne pas s'identifier au personnage d'Annie Walker et à son interprète. J'espère qu'elle va vraiment percer dans le paysage cinématographique grâce au film, même si elle n'en est pas à son coup d'essai (je l'avais notamment remarquée dans Whip it!) (titre français : Bliss).