"Social Networking Makes 'Online' Life as Important as 'Real' Life", titre d'un article lu ce matin online.
Extraits:
''Les réseaux sociaux tels Facebook, Twitter et d'autres ont changé la façon dont les adolescents et les adultes vivent leurs vies. Un nouveau jeu appelé Facebook Me révèle encore un peu plus des changements advenus dans le mode de vie américain depuis que chacun passe sa vie en ligne (...).
Une adolescente de 13 ans, Hannah, déclare: "C'est plus vivant en ligne (There's more 'life' happening online than offline). Si tu n'est pas connecté, tu es complétement en dehors du coup - tu n'as pas de vie, tu n'existes pas vraiment." Ne pensez-vous pas que c'est vrai? Combien de fois par jour consultez-vous vos textos, vos pages Facebook ou Twitter ou même vos courriels? (...).
Une autre adolescente, Caroline ajoute: " Les réseaux sociaux concernent tout ce que tu fais dans la vraie vie maintenant. Par exemple, si tu vas à une fête, l'un des aspects les plus importants est de commenter en ligne sur ce que tu vas faire.(...). C'est plus tellement la fête mais les photos de la fête" (qui sont importantes).
L'idée est également si juste. Beaucoup d'adultes font en sorte de restituer la chronique de leurs vies, ou de celles de leurs jeunes enfants, en ligne. Avec les téléphones qui permettent de partager instantanément sur Facebook, la tentation de mettre immédiatement en ligne votre 'vraie vie' est immense et beaucoup de personnes n'y résistent pas(...).''
L'auteur s'y inquiète et s'interroge sur la réponse qu'apporte, ou pas, le système éducatif par rapport à cet état de fait. Elle pose aussi la question des limites (à la fois pour les adolescents, et les adultes...).
Il me semble qu'en fait la question aujourd'hui n'est plus de distinguer 'Vraie vie' et 'Vie en ligne' (...ah! le IRL* d'antan).
De fait, dans les usages décrits ci-dessus - et qui ne concernent pas que les Américains - il n'y a plus de distinction. Les deux sont mêlés.
Vous allez réellement participer à une fête ou un évènement quelconque, et ce que vous en restituez en ligne fait partie - à part entière - de votre implication et fait partie intégrale de l'évènement.
Bien sur, il y a des limites et des bornes, celle du privé (intime) et du public. Celles du temps passé ici et là.
S'il n'y a plus d'espace intime nous allons nous retrouver très exposés, sans plus de refuges ('Pour vivre heureux, vivons...').
L'intimité ne se partage pas avec tous, sauf dans une certaine mesure avec les amis me direz-vous et...ils sont en ligne (oui, mais pas tous seuls - à y être).
Chacun ses choix de ce point de vue, à condition de les assumer (d'être en capacité de) les assumer complètement.
Ce qui me semble - plus? - problématique est autre chose. La vie en ligne semble autrement plus 'surprenante' que la vie tout court (au quotidien, hors drames, accidents de toutes sortes, aléas).
Et notamment côté adolescence ou tout est 'boring' (ennuyeux) dans la répétition du quotidien obligé qui ne prête pas toujours au plaisir, à l'étonnement, à la surprise. Ou l'appartenance/reconnaissance du groupe est fondamentale.
Une génération de toujours liés/reliés voit le jour (l'a vu et le verra).
Liés aux autres, mais pas toujours nécessairement au sens d'une grande et nouvelle fraternité, non, au sens: jamais seuls.
Or, désolée, il faut bien le dire, 'grandir' c'est aussi accepter d'être seul (face à soi-même). Ce n'est pas triste, c'est ainsi. Nous prenons nos décisions par nous-mêmes. Nous vivons pour nous-mêmes (avec les autres).
C'est aussi comprendre - et accepter - qu'il puisse ne rien se passer. Non, la vie n'est pas un éternel mouvement de textos, de messages, d'encouragements, qui peuvent (potentiel) surgir à toutes heures du jour et de la nuit. Elle n'est pas non plus uniquement le plaisir, la surprise, que peut apporter l'exploration en ligne, d'une découverte l'autre (< il y a la même chose dans la vie tout court, mais c'est moins évident à voir, disons, moins rapide).
J'exagère bien sur. Mais quand même. Soulignant au passage que le rôle d'encouragement et de partage - et pour les adolescents - est surement une bonne chose. Soulignant aussi que cette exploration en ligne peut être un vrai plus éducatif (à valoriser, à rendre accessible en formant sur le comment s'en servir - pour dire vite).
La vraie vie et la vie en ligne sont aujourd'hui pour beaucoup une seule et même chose. Il faudrait maintenant les penser ainsi, plutôt que de les distinguer, et tenter de comprendre les mutations à long terme que cela engendre.
Mais, de même que le silence, l'absence de distraction - et de spectacle - sont indispensable à la pensée, l'acceptation de sa propre solitude (unicité) est nécessaire... pour mieux revenir, vers les autres.
- * In Real Life
- L'article: Social Networking Makes 'Online' Life as Important as 'real' Life, Kate James, Gather, 21 août.
Illustration: Atget visits downtown Chandler, by Kevin Dooley cc.