Magazine Cinéma
J’ai failli ne pas aller voir Green Lantern. Il y a quelques mois, il ne faisait pas de doute dans mon esprit que le film de Martin Campbell serait sur mes tablettes à l’été 2011, ratant rarement un film de super-héros en salles. Bien que ne connaissant pas le moins du monde le comic book de l’écurie DC, l’histoire d’un pilote de chasse transformé en super-héros intergalactique pour protéger, non seulement la Terre, mais une bonne partie de l’univers, contre tout type de bad guy, c’est tout à fait ma came sur le papier.
Mais voilà, depuis sa sortie aux États-Unis mi-juin, pas un écho positif n’est parvenu des personnes (à travers le monde, pour faire modeste) ayant vu le film. De partout, le film a été taxé de daube ridicule. Et même avant cela, les images ne faisaient pas franchement envie. Alors forcément, quand on rentre de vacances, que le nombre de films à voir est nombreux et qu’il faut faire des choix, tout à coup la certitude d’aller voir Green Lantern flanche un minimum. Ca se comprend non ? Ryan Reynolds a beau être un acteur sympa, je ne vais pas voir un film juste pour lui. D’autant qu’il s’agit là une fois de plus d’un film en 3D, un de plus offert à bouffer par Hollywood qui a une nette tendance à envoyer ses films sous ce format dès que le long-métrage fait un peu fanboy sur les bords. Mon cinéma de prédilection le projetait donc sans surprise en 3D à sa sortie. L’excuse parfaite pour tirer définitivement un trait dessus, moi qui ai de plus en plus de mal à supporter la 3D à toutes les sauces.
Pourtant contre toute attente, dès sa seconde semaine, Green Lantern a basculé à une projection sans la fameuse 3D. En fait, en y jetant un œil, à l’UGC Ciné Cité Les Halles, un cinéma 100% numérique ayant la capacité de projeter de la 3D dans chacune de ses salles, la 3D semble impopulaire cette semaine. Sur six films sortis en salles au format 3D pour les salles équipées, un seul est effectivement montré dans ce format, Captain America – First Avenger (je vais donc attendre avant de m’y déplacer). Les cinq autres, Cars 2, Les Schtroumpfs, Conan, Harry Potter et les reliques de la mort 2 et donc Green Lantern, sont tous montrés en « 2D ». Tiens tiens… les spectateurs montreraient donc bien un clair signe de ras-le-bol et bouderaient la 3D au point de forcer le premier cinéma d’Europe à ne pas abuser du format ? L’idée me plait énormément. Un message fort envoyé à la profession.
Toujours est-il que voyant ainsi la fameuse « lanterne verte » lestée de son pénible relief, et ayant promis de voir plusieurs autres films avec mes proches, j’ai finalement posé mes fesses devant le film de Martin Campbell un soir où je voulais aller au cinéma. Et attention, voici le genre de petite phrase qui passera pour une hérésie : je n’ai pas regretté. Non que le film soit bon. Oh là non malheureux, ne vous méprenez pas, vous ne croyiez tout de même pas que j’allais dire que le bouche-à-oreille est faux, que Green Lantern est incompris, qu’il vaut de claquer une dizaine d’euros pour le voir (ouf, je ne l’ai pas fait) un soir d’été alors qu’il fait beau et qu’on a envie de flâner dans les rues de la capitale ?
Non, Green Lantern n’est pas un bon film. Certains ont dit que c’est une daube, et selon le degré d’attente du film, on peut même dire que c’est une daube. Allez, même sans l’attendre énormément. Martin Campbell, inspiré par le super héros de l’espionnage qu’est James Bond (Golden Eye, Casino Royale), semble être nettement moins à son aise avec un super héros pur et simple. Oh il n’est pas seul fautif, c’est bien une faute collective dont il s’agit là. La première faute qui saute aux yeux est l’esthétique mal maîtrisée. Se baladant aux quatre coins de la galaxie, Green Lantern se devait d’offrir un univers visuel fort quand il nous sert une soupe d’effets spéciaux qui puent le CGI dignes d’un jeu vidéo moyen. Les extraterrestres sont fades, les planètes visitées sans caractère.
A partir du moment où l’aspect visuel est raté (et il l’est d’emblée), il ne restait plus qu’à espérer que le scénario allait nous faire vibrer avec une aventure fantastique. Fausse route, une fois de plus. La trame est archi balisée : l’intrépide qui se voit assigné une haute responsabilité, découvre son nouvel univers, s’entraîne, se décourage, se reprend, combat, triomphe… un déroulement sans accro, sans surprise, sans étincelle. Le plus frustrant, c’est que même son connaître le comic, on devine dans cet univers une mythologie foisonnante propice à nous régaler d’aventures incroyables. On la devine entre les lignes, entre les plans, des références fugaces, des instantanés brefs, qui nous font rêver à un film de super-héros passionnant. Qui ne pointe jamais le bout de son nez. Ces gardiens immortels de l’univers, ces green lanterns protégeant tous êtres vivants, ces courses folles à travers l’espace, ces imaginations se matérialisant d’une pensée… Il y a un potentiel jubilatoire fou dans Green Lantern, un potentiel à peine esquissé par Martin Campbell et ses équipes, qui enchaînent rapidement les passages obligés du film de super héros sans trouver de voix propre à Hal Jordan et son alter ego Green Lantern. Ryan Reynold fait son beau gosse courageux, passe en vitesse sur la planète des gardiens, un p’tit entraînement avec le chef des Lanterns, on retourne sur Terre dragouiller la jolie Blake Lively, et on repart attaquer et triompher.
C’est tout ? C’est TOUT ? Bah oui, c’est à peu près tout. Pourtant je l’ai dit, je n’ai pas regretté de l’avoir vu. Pourquoi ? Outre le plaisir qui existe tout de même à découvrir cette mythologie gâchée, tout ce travail bâclé prend finalement des allures de nanar sympathique, excessif dans sa laideur et son manque d’ambition créative. Eh oui, c’est presque sympa de constater l’échec, à moins qu’il ne reste tout de même quelque chose de sympathique malgré le travail de sape…
Je me souviens de cette vidéo du Comic Con 2010, lorsqu’au cours du panel Green Lantern, un petit gamin américain avait demandé les yeux pétillants à Ryan Reynolds de réciter le serment du Green Lantern, le serment qu’il prête de combattre le mal où qu’il soit. Le serment du héros. Reynolds l’a fait, mettant le gamin les larmes aux yeux. Un an plus tard, je me demande ce qu’a pensé ce garçon de Green Lantern. Peut-être que lui en est sorti émerveillé et non frustré. Ca en ferait au moins un.