Chronique du lundi 22 août 2011.
Battre l’Irlande sur ses terres est toujours une satisfaction, surtout lorsqu’il s’agit d’une équipe de France mixte où peu de joueurs peuvent espérer intégrer le 15 de titulaires. Etre capable de mener 28 à 6 au regard des 15 premières minutes est même surprenant, les joueurs français étant capable de rester structuré malgré la déferlante verte et, surtout, de marquer des points sur chaque ballon récupéré ou occasion se présentant. C’est encourageant pour la suite. Explications…
La validation de la préparation :
Obligatoirement, 2 victoires lors des matchs de préparation viennent valider tout le travail déjà réalisé et représentent un encouragement pour la suite, même si, en affrontant l’Irlande plutôt que l’Angleterre ( éditions 2003 et 2007 ), le niveau de l’opposition a légèrement baissé. En tout cas, aujourd’hui, Marc Lièvremont peut se sentir plus en confiance que Declan Kidney dont le choix de se préparer avec 47 joueurs se révèle plutôt un échec : ses titulaires ont tenu 15 minutes à forte intensité avant de perdre le fil et il a perdu du temps avec les 2 matchs précédents, où il a fait tourner des joueurs dont certains avaient peu de chance d’aller en Nouvelle-Zélande.
Cette équipe de France a montré une belle solidarité en restant structurée sur les bases que sont la touche et l’organisation offensive, ce qui lui a permis de remettre la main sur le ballon au bout de 15 minutes d’une domination Irlandaise outrancière et, surtout, de se montrer opportuniste en prenant chaque occasion de marquer des points grâce aux jambes de Palisson, au métier d’Heymans et de Rougerie et à l’expérience qui s’acquiert de match en match de François Trinh-Duc. Devant, Lionel Nallet et Julien Bonnaire ont assuré l’essentiel et Louis Picamoles monte en puissance en se montrant beaucoup plus mobile que par le passé.
La phase de préparation permet à certains joueurs de se révéler grâce à une amélioration de leur potentiel physique, en plus de la bonne santé des joueurs cadres. C’est le cas de Louis Picamoles, mais aussi, et surtout, d’Alexis Palisson dont l’exploitation des qualités d’explosivité lui permet d’être un danger permanent. La concurrence aux ailes est d’ailleurs un sujet intéressant avec 3 joueurs, Palisson, Clerc et Médard pour 2 places, sachant que celui qui a le moins montré lors de ces 2 matchs, c’est Maxime Médard qui a, en plus, le désavantage d’avoir été positionné, aussi, comme 2ème centre, ce qui fait de lui le remplaçant idéal qui couvre 3 postes. A l’arrière, Cédric Heylmans a réalisé un match propre et a pu, en 2 ou 3 occasions, montrer qu’un arrière relanceur, avec des qualités de changement d’appui, peut être un plus pour l’équipe.
Sinon, l’énorme surprise, pour moi en particulier, c’est bien sûr, le retour d’Aurélien Rougerie qui après un début de match prudent ( à raison ) est progressivement monté en puissance en défendant beaucoup et en manoeuvrant idéalement pour servir Cédric Heymans sur le premier essai français. Le Clermontois est très en avance sur un planning de retour déjà optimiste, c’est une très bonne nouvelle pour Marc Lièvremont, même si la progression doit encore continuer pendant les prochaines semaines car le véritable test devrait être le match contre la Nouvelle-Zélande.
Un style de jeu à définir :
Cette équipe mixte a montré une plus grande cohérence dans la manière de jouer que celle alignée samedi dernier. Même si elle a manqué de fluidité et d’automatisme avec, en plus, un changement d’ouvreur, très tôt dans le match, qui a compliqué d’autant, ses intentions étaient parfaitement lisibles et la structuration de son jeu beaucoup plus linéaire qu’à Bordeaux. Il faut bien sûr prendre en compte, ici, le fait qu’elle n’a pas eu à prendre le match à son compte, les Irlandais s’en sont chargé pour elle, et qu’elle a plutôt évolué en contre. Mais c’est là justement, où le bât blesse. L’équipe de France est plutôt à l’aise dans un système de jeu basé, à la fois sur une conquête forte et une organisation défensive bien structurée, et aussi sur la capacité à jouer sur des ballons de récupérations où la vitesse et la créativité des trois-quarts français peuvent faire merveille. Par contre, si Marc Lièvremont lui demande de prendre le jeu à son compte et d’être capable de peser sur l’adversaire en multipliant les temps de jeu, le manque de fluidité et d’automatismes se révèle rédhibitoire face à des équipes dont la ligne de trois-quart est suffisamment organisée et puissante pour contrer les assauts français. Le rêve de Marc Lièvremont d’un soi-disant jeu épanoui qui permette à la France de donner une leçon de jeu au reste du monde est une utopie dont le sélectionneur doit faire le deuil dès cette semaine.
L’équipe de France excelle à contrer ses adversaires dans le combat et à les surprendre sur les balles de récupération. Ca s’est encore vu ce week-end, il s’agit maintenant de composer une équipe qui soit cohérente par rapport à cette stratégie. C’est là où le match de Dublin, en comparaison avec celui de la semaine dernière, est intéressant. Cette équipe est armée pour le combat, il faut maintenant lui donner les hommes pour aller très vite porter le danger dans la défense adverse. A ce sujet, plusieurs joueurs ont montré un talent d’accélérateur et de poison et certains choix paraissent s’imposer logiquement. A la mêlée, malgré la magnifique maîtrise de son jeu et de la stratégie, Dimitri Yachvili ne présente pas les mêmes qualités d’accélérateur que Morgan Parra. Le Clermontois a réalisé un match beaucoup plus riche qu’il n’y parait. En étant capable d’accélérer le jeu, que ce soit en jouant rapidement des coups-francs où en allant immédiatement chercher du mouvement sur les ballons de récupération, Morgan Parra a amené une dimension de vitesse et de danger que l’équipe de France, qui a joué à Bordeaux, ne possédait pas. Dans le cadre d’une stratégie où la France s’appuie sur sa défense et prend les opportunités de contre pour marquer, le choix du demi de mêlée Clermontois s’impose. Son manque de puissance a une époque où certains demi de mêlée font près de 100 kg n’est de toute façon pas rédhibitoire par rapport à Dimitri Yachvili qui n’est pas, non plus, un monstre physique.
La ligne de trois-quarts attendra de faire le point sur les santés respectives d’Aurélien Rougerie et de Maxime Mermoz avant d’avoir des certitudes mais doit, néanmoins, se composer un triangle arrière cohérent par rapport à la stratégie. Il faut des joueurs qui soient capables d’intervenir vite et de manière décisive dans la ligne ou sur chaque action où la défense est désorganisée. Alexis Palisson vient de prouver qu’il a le profil idéal pour ce role. Vincent Clerc aussi et sa prestation Bordelaise allait dans ce sens. Ce qui pose le problème d’avoir 2 ailiers avec des petits gabarits. C’est un choix qu’il faut assumer, et ce d’autant plus que l’inversion des défenses, avec un centre qui monte en pointe pour couper les extérieurs, est un facilitateur en défense pour les ailiers qui se retrouvent de moins en moins confronté à des 1 contre 1 ou l’attaquant arrive lancé. Reste le choix de l’arrière, pour lequel je n’exclurais pas Maxime Médard. En effet, même s’il est resté discret, le Toulousain est le joueur avec le meilleur potentiel actuellement. Son point faible par rapport à Damien Traille et Cédric Heymans reste le jeu au pied. Mais si on choisit un arrière pour remonter les ballons et créer des failles dans la défense, Maxime Médard me parait avoir tous les arguments pour être le choix numéro 1.
Au niveau des avants, pour finir, les choix semblent plus simple avec une hiérarchie plutôt établie : Mas – Servat – Nallet – Pierre- Harinordoquy – Picamoles – Dusautoir à laquelle pourrait se rajouter Jean-Baptiste Poux le plus en forme des piliers. Mais j’ai aussi beaucoup aimé le match de Romain Millo-Chluski, très en forme, qui se pose en concurrent de Lionel Nallet uniquement, de manière à ménager la complémentarité de la 2ème ligne. Julien Bonnaire, enfin, reste une valeur sûre qui mérite plus qu’un strapontin…
ENVOYEZ VOS COMMENTAIRES POUR PARTICIPER AU DEBAT.