L’hôtel New Hampshire, c’est tout un symbole : celui de la vie de la famille Berry racontée par John, le rejeton n°3.
John Berry comme John Irving. John, le narrateur et John, l’auteur
Deux John et trois hôtels New Hampshire, selon le rêve du père qui cherche sans fin son idéal, du New Hampshire à la Vienne européenne pour finir par revenir en Amérique dans un hôtel miteux du Maine toujours nommé «New Hampshire» car le rêve reste intact, «vissé pour la vie».
Trois enfants coup sur coup, les bien-portants : Franck, l’homosexuel, Franny, l’éblouissante, «la plus turbulente» et John, le fils du milieu, la figure centrale puis les deux petits derniers, les handicapés : Lilly, la naine et Egg, l’enfant sourd.
Autour d’eux, les animaux, les ours, les chiens, ceux qui vivent au cœur de la famille, ceux qui sont morts et qu’on empaille, ceux qu’on aime et qui vous le rendent au centuple mais à leur manière et puis les serviteurs, les amis, les anciens que l’on perd peu à peu, Iowa Bob, l’aïeul, le coach, l’obsédé de culture physique, Ronda Ray, l’employée à la chambre de repos, l’initiatrice, la prostituée, celle dont le souffle séduit par le canal d’un interphone et qui reste avec les nains du cirque Fritz, et puis les amis, Freud, Urick, celui-ci noyé dans sa baignoire, lui, «un vieux marin maintes fois réchappé de l’abîme».
Les hôtels, ce sont des cirques à eux tout seuls, des ménageries, les lieux de vie d’une troupe familiale élargie, à des époques diverses.
Le récit englobe l’avant-guerre immédiate, 1939, juste avant la naissance des enfants, les années cinquante et la reconstruction européenne à Vienne, avec ses références au vrai Freud ainsi que la leçon qu’ils en tirent «Attention aux fenêtres ouvertes», puis le retour à New York, Noël 1964 momentanément à l’hôtel Stanhope.
C’est là que se revivent les drames anciens, viol, inceste, humiliations. Là que les plaies s’ouvrent à nouveau avec la rencontre à Central Park de Chipper Dove, l’ami violeur jamais pardonné sur qui le piège se refermera grâce à Susie, l’amie ourse du moment.
«Et voici l’épilogue ; l’inévitable épilogue.» Le dernier hôtel New Hampshire «Dans un monde où flottent l’amour et le chagrin, il y a une foule d’épilogues. …A l’hôtel New Hampshire, nous sommes tous rivés pour la vie. Donc nous nous obstinons à rêver. Ainsi inventons-nous nos vies.»
Inutile de dire que je ne suis pas déçue. Après Garp et son petit monde, Twisted River et sa dernière nuit, nouveau coup de cœur pour cet hôtel New Hampshire en trois versions.
John Irving. L’hôtel New Hampshire.
Traduit de l’américain par Maurice Rambaud
En lecture commune avec Val. Nouvelle participation au challenge John Irving