Habile stratège - mais certains pourraient considérer cela comme de la duplicité - le patron de la FDJ a profité du débat sur le jeu pathologique, de l’inquiétude des pouvoirs publics en matière de santé publique, de la loi sur les jeux en ligne, non pour mettre la pédale douce en matière de développement mais au contraire, pour accélérer sa croissance tout azimut par une incitation au jeu accrue.
La politique de jeu responsable mis en œuvre par la Française des jeux va produire en final du jeu excessif… Les meilleures preuves de cette démonstration se situent dans les résultats de l’opérateur de loteries. En pleine crise économique il surperforme (+5,5 % en 2010) en dépassant pour la première fois la barre symbolique des 10 milliards. Dans le même temps la société dirigée par Christophe Blanchard Dignac a l’audace - ils se croient tout permis et ils se permettent tout - de lancer en juin 2011 «une campagne nationale contre l’addiction au jeu (1)» ! Au même moment Jean Luc Vénisse (financé à hauteur de 2 millions d’euros par la FDJ) associé aux addictologues M. Reynaud et A . Belkacem sortent un fascicule: «Du plaisir du jeu au jeu pathologique, IOO questions pour mieux gérer la maladie» Et Michel Reynaud d’affirmer dans France Soir du 6 juin 2011 que «de tous les opérateurs la Française des jeux est celui qui en fait le plus pour le contrôle et la prévention du jeu excessif. La boucle est bouclée. La collusion d’intérets marche à fond pour les deux parties en présence.
Dernières précisions qui montre le vrai visage de la Française des jeux : l’inflation et les chances de gagner. L’opérateur historique profite du lancement de nouvelles formules, de nouveaux jeux, pour augmenter fortement ses prix et diminuer tout aussi fortement l’espèrance statistique qui permet de décrocher la cagnotte. Ils se croient tout permis et ils se permettent tout. Ainsi en 2008 le Loto passe de 1,2 euros à 2 euros et l’espèrance statistique évolue d’une chance sur I4 millions à une chance sur I9 millions. Pour le nouvel Euro Millions sorti en mai 2011 la FDJ a fait encore plus fort. La probabilité de trouver les 7 bons numéros passe d’une chance sur 75 millions à une chance sur 116 millions ! La politique mise en œuvre par la Française des jeux n’a donc rien à voir avec une politique des jeux raisonnable, modérée et qui respecte sa clientèle. Elle apparaît au contraire comme une politique anti consumériste de rentabilité accrue, qui abuse de sa position dominante et son monopole. Elle agit de plus en plus comme un Etat ludique dans l’Etat Croupier peu soucieuse en réalité de l’intérêt général et des Français qui jouent. Le PDG de la Française des jeux fait jouer à une société qui ne lui appartient pas, un double jeu très dangereux qui risque à terme d’énerver Nicolas Sarkozy, à l’origine de la politique jeu responsable quand il était Ministre de l’Intérieur. Cette duplicité risque également d’irriter fortement Bruxelles et la Cour de justice Européenne.
Par : Jean-Pierre G. Martignoni-Hutin (sociologue)
© JP G. Martignoni-Hutin, Lyon, France, Juillet 2011