Le Retour de Sambre !
Quand on cherche un emblème de saga familiale en cours, assurément la série Sambre, créée en 1986, vient immédiatement à l'esprit. Et bien sûr chez le spécialiste du genre, Glénat. Poursuivis depuis le T.2 par Yslaire seul, les albums s'enchainent doucement. Très doucement même. Après un premier cycle de quatre tomes, le second a débuté en 2003 avec le T.5 et l'épisode suivant se faisait désirer. Il est vrai qu'entre temps, l'auteur très complet a notamment lancé deux premières séries extrapolées, La Guerre des Sambre, sur les différents niveaux de l'arbre généalogique, Hugo & Iris (1830-1847) avec les jeunes Bastide et Mézil, ainsi que Werner et Charlotte (1768-1769) avec Marc-Antoine Boidin au dessin. Autour d'une malédiction familiale, cette série sur fond historique est sans doute la plus romantique du neuvième art. Huit ans après, on connaît enfin une nouvelle page du destin de Julie, l'envoûtante braconnière aux yeux rouges qui a survécu sur les barricades de 1848 à Paris tandis que son bien aimé Bernard Sambre, jeune bourgeois provincial aux cheveux rouges y succombait. Et comme un clin d’œil, l'auteur a avancé l'intrigue de... huit ans.
Le sujet de ce deuxième cycle en cours est Julie Saintange. Elle avait exigé un pacte de son amant : pour la vie mais aussi pour la mort. Mais rien n'y fait, elle survit toujours au drame de son amour. Le cousin de Bernard, le commissaire Hippolyte Guizot, l'a non seulement arrêtée, mais aussi dépossédée de son fils Bernard-Marie qu'il élève avec sa cousine Sarah. Pour éloigner tout risque il l'a aussi envoyée au bagne en Guyane. Mais le navire fait naufrage au large de l'Irlande. Encore une fois, elle échappe à la mort et échoue au pied du Purgatoire, nom donné au phare construit sur une île. Elle est recueillie par Adam Scott Shagreen, le gardien du phare de Little Skyvore. Nouvelle prison ou nouveau départ ?
Le succès de cette série tient à son sujet éternel, sa manière de le traiter et son graphisme saisissant. Tout est un savant mélange entre réalisme et émotion. Yslaire est l'un des pionniers de l’outil informatique qu'il a apprivoisé de si belle manière qu’il le fait oublier. Chaque plan est étudié. Le découpage alterne en fonction du rythme de grandes cases et de nombreuses cases. La mise en couleurs, toujours dans des tons pastels, joue avec bonheur avec la lumière en fonction des ambiances, réalise de jolis jeux d'ombres et accentue la base rouge au contact du gardien et la fugitive. Si Yslaire avait donné à Bernard Sambre son prénom, il s'est représenté dans cet album sous les traits d'Adam Scott Shagreen. L'album sublime une nouvelle fois son style si particulier. Du côté de l'histoire elle-même, le scénario est presque construit comme un récit complet, comme une halte dans une île, mais ouvre de nouvelles riches perspectives. L'ombre de Bernard plane toujours dans l'esprit de Julie. Ah, le romantisme...
Une série devenue un classique indispensable !
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Sambre - T.6 : La Mer vue du Purgatoire - de Yslaire - Glénat, collection Caractère - 15 juin 2011 - 14,50 €