Jusqu'au XVIIIe siècle le lit est un lieu de 'sociabilité' important. Durant l'Antiquité on y dort, se
repose, banquette, mange, boit, discute … D'importants dialogues de Platon se font sur des lits. On continue de recevoir couché jusqu'au XVIIe siècle. J'en parle dans mon article sur
Les Précieuses et les femmes de lettres. La ruelle, c'est à dire la petit rue qui longe le lit, est un
lieu d'apprentissage du dialogue antique que la philosophie courtoise poursuit. C'est là que les fondements du 'savoir vivre' sont initiés. De la ruelle on passe au XVIIIe siècle à la table de
toilette et de celle-ci au monde … au 'grand monde' comme on le dit entre autres au XIXe. Entre l'Antiquité et le siècle des Lumières il y a le Moyen âge où le lit occupe une place tout aussi
importante. La première photographie semble accréditer le fait que les dames reçoivent dans leur chambre : dans la ruelle, bien avant le XVIIe siècle. Du reste le lit (en particulier le lit de
jour) se prête tout à fait à cela. Il s'agit d'une pratique issue de l'Antiquité qui n'est pas propre à l'Occident mais aussi à l'Extrême Orient (voir les représentations du Bouddha Shakyamuni
couché). Dans la photographie suivante c'est le roi qui réceptionne dans sa ruelle dans un lit qui est sans doute un meuble d'apparat et l'ancêtre du 'lit de jour'.
L'exposition Au lit au Moyen Âge, qui se déroule jusqu'au13 novembre 2011 à Paris dans la Tour
médiévale de Jean sans Peur, nous offre à l'aide d'un parcours photographique quelques informations sur sa fonction. On peut ainsi y lire : « Au XVe siècle, les grands
procès sont jugés par le roi dans un lit de justice, espace surélevé à l’intérieur d’une clôture. Son trône est surmonté d’un dais et entouré de tentures, à l’image d’un lit, d’où le terme de lit
de justice. C’est également allongés sur un lit que les grands donnent audience à leurs proches et alliés, astreints à demeurer debout. Paradoxalement, être couché est le signe d’un statut
supérieur. Dans la chambre de parement, pièce destinée aux fonctions officielles, un lit d’apparat est dressé. Ce meuble de prestige est exposé aux yeux des visiteurs, sans qu’il en soit fait
usage. Dans les cours royales et princières, il est de dimensions extravagantes, comme en témoigne la description d’une couverture de fourrure appartenant au roi Charles V (1364-1380) et
dépassant les 38 m2 ! » Souvent on naît et on meurt dans le même lit. « Les défunts sont inhumés cousus dans leur linceul, à savoir le drap de leur lit, puis couchés dans la terre
jusqu’à la consommation des temps. Le christianisme médiéval veut que les chrétiens soient enterrés
Photographie 4 : 'Un beau rêve : Dame Nature et ses oiseaux'. Livre des échecs
amoureux, France, fin du XVe siècle, Paris, © BnF, manuscrit français n° 9197, folio 13. Voici ce que dit la Bibliothèque nationale de France au sujet de cet ouvrage : « Composé en
prose par Évrart de Conty vers 1400, le Livre des échecs amoureux se présente comme le commentaire d'un poème allégorique inspiré du Roman de la Rose. Utilisant la symbolique
des dieux antiques et du jeu d'échecs, Évrart de Conty relate le parcours initiatique d'un jeune prince, "l'Acteur", et traite ainsi "des mœurs et du gouvernement de la vie humaine". Au terme de
sa quête, l'Acteur rencontre une jeune demoiselle avec laquelle il prend place autour de l'échiquier symbolique. À chacun des partenaires sont attribuées des pièces représentant autant de
qualités ou de comportements relatifs à l'amour courtois. Chef-d'œuvre de l'enluminure flamande du XVe siècle, ce manuscrit comprend vingt-quatre peintures, œuvre du Maître d'Antoine
Rollin. » Douze sont visibles ici et les autres ici.
Quelques lits : grecs 1, 2 et 3
; d'amour charnel
durant l'antiquité ; au XVe siècle 1, 2, 3
(à noter la coiffure) et 4
; de
naissance ; d'une chambre
de Louis XIV ; d'une
chambre ou d'un boudoir du XVIIIe siècle ; de plaisir
au XVIIIe siècle ; à l'antique
en 1800 ; du XIXe
siècle. Pour les différents modèles de lits voir proantic.com.
Photographie 5 : 'Un lit de parade géant'. Vie et miracles de monseigneur Saint
Louis, France, 1480, Paris, BnF, ms. français 2829, folio 3 représentant l’auteur remettant son ouvrage au cardinal de
Bourbon.