Hollande : « Les marchés restent toujours une menace »

Publié le 17 août 2011 par Letombe

Propos recueillis par Matthieu Croissandeau et Philippe Martinat

Pour François Hollande, candidat à la primaire socialiste, le gouvernement économique européen manque de moyens pour agir alors que le temps presse.
Comment accueillez-vous la mise en place d’un gouvernement économique de la zone euro annoncée hier?

FRANÇOIS HOLLANDE. C’est un premier pas. Ce gouvernement a une tête, celle du président

du Conseil européen, mais il n’a pas de bras.

Ce qui aurait pu lui donner de la consistance, c’est une autorité plus forte sur la conduite des politiques économiques des Etats membres, une coordination des politiques budgétaires, l’harmonisation fiscale et sociale par le haut et surtout des ressources budgétaires ou extrabudgétaires grâce à une capacité d’emprunt. Or il n’y a pas l’annonce de création d’un impôt européen (hormis la promesse encore vague d’une taxe sur les transactions financières) ni l’autorisation pour l’Europe d’emprunter.

Le projet d’emprunt à travers des euro-obligations est rejeté…
Nicolas Sarkozy a abdiqué. Jusque-là, la position française poussait à la création de cet instrument, alors que les Allemands y étaient réticents. Le chef de l’Etat français s’est totalement rangé derrière la position allemande en critiquant les euro-obligations au prétexte qu’elles pourraient affaiblir les Etats les plus importants, en l’occurrence la France et l’Allemagne. Cette reddition risque de coûter cher à l’euro.
Ces mesures éviteront-elles une nouvelle tempête financière?
Le temps déjà perdu a contribué à l’affaiblissement de la zone euro. Le temps qui sera gâché peut nous conduire, si rien n’est fait rapidement, à son éclatement. Le Fonds européen de stabilisation financière (FESF) ne sera pas voté par les Parlements nationaux avant fin septembre. Pendant toute cette période, la zone euro restera dans une phase de vulnérabilité. Les marchés restent toujours une menace dès lors qu’ils ont toute liberté pour mener leurs opérations. Rien n’a été fait contre la dérive des produits financiers, rien n’a été engagé sur les ventes à découvert, même si les Allemands y étaient prêts. Les marchés ont les mains libres et disposent toujours d’un temps d’avance sur les Etats. C’est cela qu’il faudra changer.

Approuvez-vous la convergence fiscale prévue en 2013 à travers un même impôt sur les sociétés en France et en Allemagne?

Il est souhaitable qu’il y ait des convergences sur les impôts entre la France et l’Allemagne. Mais je ne suis pas favorable à un impôt identique sur les sociétés. Ou alors il faudrait revoir tous les impôts car la structure fiscale allemande est très différente de la nôtre.
L’annonce de la taxation des transactions financières doit, elle au moins, vous réjouir…
Cette mesure a été votée par le Parlement européen. Les responsables de nos deux pays y consentent, dont acte. Mais il faut en finir avec les tergiversations et les incantations; elle doit entrer en vigueur avant la fin de l’année. Son taux doit être fixé à un niveau suffisant pour dégager des ressources pour la croissance. Il y a urgence pour la faire rentrer dans les faits. Sinon Nicolas Sarkozy restera le président de la parole sans lendemain.
La règle d’or devrait être généralisée dans la zone euro. Le PS n’est-il pas piégé?
Cette règle d’or qui a été votée par le Parlement français ne devrait s’appliquer qu’à partir de 2013. C’est une façon commode pour Nicolas Sarkozy de s’exonérer de sa responsabilité dans le creusement des déficits et la montée de la dette publique. Mais je prends le communiqué Sarkozy-Merkel au mot : puisqu’il faut que tous les pays de la zone euro aient fait voter la règle d’or avant l’été 2012, je demande que ce sujet soit débattu en France lors de l’élection présidentielle. La question de savoir quels seront exactement la nature et le contenu de cette règle d’or devra être décidée à ce moment-là. Je prendrai, si je suis candidat, ma responsabilité pour revenir au rééquilibrage des finances publiques. Ce sera aux Français de se déterminer.

Le Parisien

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