Inouï : Lagarde se convertit à Keynes et prône la relance!
Jack Dion – Marianne | Mardi 16 Août 2011Lutter contre la dette sans pour autant tuer la croissance : c’est la position défendue par Christine Lagarde… que l’on aurait aimé la voir tenir lorsqu’elle était à Bercy. Et qu’on apprécierait encore plus la voir mettre en pratique à la tête du FMI….
(Wikimedia – MEDEF) Le changement de fonction suscite parfois des prises de conscience subite. Tel semble être le cas de Christine Lagarde, dont on peut dire qu’elle a découvert la lune en prenant ses fonctions de directrice générale du Fonds Monétaire Internationale (FMI), en lieu et place du célébrissime DSK.Que dit donc l’ex ministre de l’Economie du gouvernement Fillon ? Que le souci de lutter contre la dette ne doit pas conduire à tuer la croissance. Bravo, mille fois bravo. Mais on eut aimé entendre Christine Lagarde tenir semblable propos lorsqu’elle était à Bercy. On apprécierait encore plus que le FMI passe de la parole à l’acte en arrêtant le bras des assassins qui sont en train de tuer la Grèce, avant de passer à d’autres victimes désignées, au nom d’un retour aux « grands équilibres » qui n’est souvent qu’un moyen d’aggraver les déséquilibres.
Pour l’heure, on ne se privera pas du plaisir de citer l’article de Christine Lagarde dans le Financial Times, titré fort à propos : « Ne laissons pas le coup de frein budgétaire bloquer la reprise mondiale ». On croirait lire le prix Nobel d’économie américain Paul Krugman, Keynésien convaincu, qui ne cesse de crier au loup en expliquant vainement que les grands pays occidentaux font exactement ce que dit craindre Christine Lagarde.
Apparemment convertie à la régulation comme Bernadette Soubirou au message divin, l’ancienne locataire de Bercy écrit même : « Le rééquilibrage budgétaire doit résoudre une équation délicate en n’ayant ni trop rapide ni trop lente ». Et la ministre de parler du risque récurrent de « paralysie ». A qui le dites-vous chère Christine ?
Il est vrai que la potion actuellement mise en œuvre un peu partout est à l’économie ce que la saignée des médecins de Molière était à la santé. Alors que l’endettement public est la conséquence d’un endettement privé transféré aux Etats pour sauver les banques, les « marchés », comme on dit, somment les pays de rééquilibrer au plus vite leurs comptes en taillant dans le vif, autrement dit dans le corps social et économique.
Le résultat d’une telle médication est une déferlante d’austérité qui va tuer la consommation et donc aggraver le déficit. Au nom de quoi les « marchés » (toujours eux) demanderont encore plus d’austérité (ou de « rigueur », cela fait moins peur) pour régler le problème d’une dette transformée en tonneau des Danaïdes. Ce petit jeu pervers a ses limites, déjà atteintes pour certains (ce ne sont pas les Grecs qui diront le contraire).
Si Christine Lagarde découvrait aujourd’hui que Lagarde Christine avait tort hier, nul ne s’en plaindrait. Mais elle serait encore plus crédible si elle appliquait ses bons principes là où elle officie désormais, c’est-à-dire au sein même du FMI, cette machine à engendrer les déficits de demain via l’austérité d’aujourd’hui. Chiche ?
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