Emeutes de Londres : les jeunes ont bon dos…

Publié le 17 août 2011 par Albert @albertRicchi

A Londres, des jeunes sans espoir ont brûlé maisons et magasins. Dans le même temps, des gens qui ont amassé des milliards d’euros en bourse s’affolent à l’idée d’en gagner un peu moins.

Ces émeutes remettent en cause les formes mêmes de notre société mais nos gouvernants, atteints d’une grave cécité, continuent de ne pas mettre le changement à l’ordre du jour…


Il ne faut pas avoir fait l’ENA ou Polytechnique pour comprendre d’où la vient la crise. Sur la pression des actionnaires et notamment des fonds de pension présents dans les conseils d’administration, les entreprises britanniques diminuent emplois et salaires pour augmenter leurs bénéfices et ont détruits, au fil des années, l’avenir de ces jeunes.

Pourtant, les ministres dont les mesures néolibérales ont permis ce massacre social, font semblant de ne pas comprendre la révolte. Envoyer des policiers - demain l’armée - dans les quartiers populaires, c’est tellement plus simple que d’aller contrôler ce qui se passe à la Bourse ou dans les paradis fiscaux.

Émeutes de la dignité

Les émeutes qu’a vécu Londres et qui se répandront peut-être un jour dans d’autres pays peuvent être qualifiées, comme le fait l’anthropologue Alain Berthot, d’«émeutes de la dignité».

En effet, ces émeutes répondent à un processus logique et bien connu. Dans un quartier pauvre à forte concentration ethnique où les citoyens se plaignent de profilage et de stigmatisation, la police abat un jeune. L’émeute éclate généralement en quelques heures, au plus tard le lendemain, selon le temps pour la rumeur de se répandre. À partir du moment où l’émeute démarre, elle peut durer des jours, voire des semaines, et fédérer la révolte des pauvres, des immigrants, des chômeurs, des petits salariés, etc.

C’est ce schéma qui a été vérifié lors des émeutes de Los Angeles (1992), de Cincinnati (2001), de Kabylie (2001), de Benton Harbor (2003), de l’Australie (2004-2005), de la Chine (2005), de Bruxelles (2006), de Montréal-Nord (2008) et de la France (presque chaque année depuis 2001).

Le sens de ces émeutes est très clair. Si les jeunes doivent cyniquement vivre dans des sociétés où ils sont des citoyens de seconde zone, ils refusent toutefois de mourir en silence sous les balles de la police et de l’État.

Tendre l’oreille à ce cri de révolte obligerait les autorités à faire un examen de conscience hors du commun car les problèmes mis au jour sont loin d’être bénins. Mais quand les traces du combat auront disparu des rues, tout redeviendra «comme avant». Pour preuve, les autorités n’ont que le mot «riposte» à la bouche, comme si les émeutes étaient le fait d’ennemis de la nation.

Au lieu d’utiliser principalement le budget de l’Etat pour créer des emplois, le gouvernement britannique préfère envoyer encore plus de bombardiers en Libye, à l’image de Paris, Washington ou Bruxelles… Faire main basse sur le pétrole ou les avoirs Libyens dans les banques européennes, ça fera un peu d’argent de poche pour payer les dettes accumulées depuis tant d’années….

Quelques faits et chiffres dont on ne parle guère

En Angleterre, ce sont des compressions d’effectifs radicales dans les services publics (dont la fermeture de nombreuses maisons de jeunes) de même que les hausses des droits de scolarité (qui ont presque doublé) qui expliquent aussi cette expansion de la flambée émeutière.

Les salaires britanniques ont été gelés par David Cameron alors que le prix de la nourriture a augmenté de 5% !

A Tottenham (Londres), il y a 54 demandeurs d’emploi pour chaque emploi vacant !

Aucun agent de la Metropolitan Police londonienne n’a jamais été condamné alors que, depuis 1988, 333 personnes sont mortes en garde à vue !

Ailleurs, ce n’est pas mieux. En Grèce, l’Etat a une dette de 350 milliards d’euros et l’ensemble des capitalistes grecs possèdent 600 milliards sur des comptes en Suisse ! Et cela n’étonne personne de voir que les mesures annoncées n’ont pas d’autre finalité que de faire payer la crise aux salariés plutôt qu’aux bénéficiaires des paradis fiscaux.

Aux USA, l’agence de notation Standard & Poors a dégradé la note des USA notamment parce que « le plan du Congrès et de l’administration ne prévoit que des changements mineurs dans la politique de Medicare » (équivalent de la Sécurité sociale pour l’assurance maladie) !

En France, J-F Copé, secrétaire-général de l’UMP déclarait le 10 août dernier : « Nous avons déjà réformé les retraites, il faut maintenant faire la réforme de la dépendance et celle de l'Assurance-maladie » ! Le terme « réforme » est ainsi une fois de plus galvaudé car synonyme de recul au lieu de progrès social.

Si de vraies solutions existent pour sortir de cette logique de maximisation des profits des entreprises qui sévit depuis plusieurs décennies, les gouvernements libéraux des plus grands pays ne sont pas prêts à prendre toutes les mesures nécessaires pour enlever le pouvoir aux acteurs financiers en vue de satisfaire les besoins fondamentaux de la population…



Photo Creative Commons : émeutes par Nocturnales (http://www.flickr.com/photos/spaceflattener/487637091/)


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