DE l'ARAiGNéE QUi PERDiT LE NORD POUR UN ORNiTHORyNQUE. Elisabeth Hamidane

Par Collectif Ratures // Poésie // Grenoble

“Hello, my love I heard a kiss from you
Red magic satin playing near, too
All through the morning rain
I gaze - the sun doesn't shine -
Rainbows and waterfalls run through my mind”

“Strawberry letter 23”, Shuggie Otis

à … N. A. 

Une petite araignée au  grand cœur

S’était égarée en plein marécage.

Surgit de nulle part un drôle, l’air hâbleur,

Démarche chaloupée,  beau et sauvage.

La petite est émue : s’offre à goûter

A cette bête inconnue dont l’immense bouche

Déjà s’ouvre : « Quels beaux yeux, de toute beauté ! »

Belle araignée au cœur fêlé, prend garde – à la rengaine bullée par le bel inconnu -

Tout plaisir, fredonne l’air,  n’est pas bon

A prendre !  L’écervelée se hasarde

A humer ce vin nouveau ; un litron

Suffit à l’enivrer…Sur la carte du Tendre

Elle s’abandonne, ses filets, et c’est nue

Qu’elle rougit, s’oublie, semblant mécomprendre

Que la route vers la joie s’encombre  d’urubus,

Masqués de fer,  tel cet ornithorynque

A l’ego de pierres lancées, qui ébranle,

Et pille, les ombres trop pâles, celles qui trinquent

L’eau trouble des mots en l’air. Lecteur, prend-le

Pour toi, pour tous ceux qui toussent  à la minque,

Maudissant  Indifférence en vaine criée ;

Ainsi  nos lèvres se mouillent d’un beau mensonge,

Chaque cœur agite une araignée sans filet,

Chaque heure suffoque  son regret qui la ronge.