Durant son audition, le médecin n’a pas « pas démenti les faits » selon son avocat cité par Le Parisien, « il a expliqué les circonstances de décisions prises face à sa conscience pour abréger les souffrances de personnes qui allaient décéder dans les minutes suivantes ». L’urgentiste a été mis en examen pour «empoisonnement sur personnes particulièrement vulnérables», décision qui concerne au moins quatre décès survenus au cours des cinq derniers mois, le dernier étant celui d’une patiente de 92 ans, morte le 3 août. L’homme encourt la réclusion criminelle à perpétuité.
Aucune des familles n’a porté plainte, mais le procureur adjoint en charge de l’affaire, Marc Mariée, précise que, même si le médecin a obtenu leur consentement pour cette opération d’euthanasie, cela ne justifie pas ce geste, car, rappelle-t-il, la Loi Léonetti sur l’euthanasie fixe « un cadre extrêmement strict et notamment deux conditions : celle du consentement de la personne ou de sa famille et celle de la collégialité » qui doit réunir les avis de plusieurs médecins.
L’affaire a éclaté sur dénonciation d’un collègue. « Mon confrère va subir un calvaire », prédit le docteur Laurence Tramois, elle-même condamnée en 2007 à un an d’emprisonnement avec sursis pour « complicité d’empoisonnement ». Quatre ans plus tôt, elle avait laissé des instructions à une infirmière pour euthanasier une patiente atteinte d’un cancer du pancréas. Comme dans l’affaire de Bayonne, une injection mortelle avait été utilisée, et elle soupçonne elle aussi avoir été l’objet d’une dénonciation.
Selon le quotidien Sud-Ouest, le Dr Tramois affirme que l’urgentiste de Bayonne pourrait avoir administré une injection provoquant une paralysie des muscles respiratoires de ses patients. « Il s’est simplement trompé de produit, ironise Laurence Tramois. La morphine utilisée par les soins palliatifs provoque une dépression respiratoire à haute dose. C’est le même résultat, mais la mort est plus lente ». En somme, le médecin mis en examen n’aurait pas suivi « les règles de l’art » de l’euthanasie et aurait été dénoncé par une infirmière dans le cadre d’une vengeance personnelle. Enfin, toujours selon Sud-Ouest, le Dr Tramois s’insurge de ce qu’ «une cellule psychologique [ait] été mise en place à l’hôpital. Pourtant, ça fait des années que l’euthanasie existe, tout le monde le sait. »
Une enquête administrative de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) a été ouverte, hier, pour « analyser le fonctionnement de l’établissement et la prise en charge des personnes dans le service concerné ». En outre, et pour ce qui est là encore des réactions institutionnelles, le célèbre président de l’Association des médecins urgentistes de France évoque quant à lui « la question de la santé au travail » car, interrogé par Ouest France, il évoque « l’état de santé psychologique fragile » du médecin inculpé qui aurait été auparavant chef des services des Urgences, avant d’être rétrogradé. BFM TV, dans son édition de 08h30 du 13/08/2011 affirme que l’urgentiste est décrit comme surmené et dépressif.
Cette affaire relancera probablement le débat sur l’euthanasie et la fin de vie, notamment à l’approche de la prochaine campagne présidentielle en 2012. Rappelons pour finir qu’une affaire récente avait défrayé la chronique en Allemagne, l’infirmier Stephan Letter a été condamné en 2006 à la réclusion criminelle à perpétuité pour le meurtre de pas moins de 29 personnes dans le cadre de ses fonctions hospitalières à Sonthofen en Bavière.
Pour aller plus loin, lire :
- la page consacré à l’euthanasie de l’encyclopédie en ligne Wikibéral
- la tribune mordante du bloggueur h16 sur les débats de janvier 2011 de la Commission des Affaires Sociales du Sénat à propos de l’euthanasie