miracles de Lourdes

Publié le 13 août 2011 par Micheltabanou

En avant veille du 15 août nous approchons cette période d'accomplissement de "miracles" du côté de la grotte de Lourdes ou du moins de l'espoir que sucistent les religieux chez de nombreuses personnes affligées de lourds handicap d'une possibilité de "s'en sortir" par une guérison - non expliquée - attribuée à la Vierge!

Si on me posait la question de savoir si je crois aux miracles de Lourdes je vous assure que ma réponse serait celle-ci:

les Miracles de Lourdes ne s'expliquent que par la crédulité humaine. Et la crédulité humaine ne s'explique que par une ignorance et une stupidité sans fond.

Interrogé dans les années 30 par une revue la réponse de Paul Vigné d'Octon m'a procuré un grand soulagement et une belle note d'humour que je ne résiste pas à vous retranscrire aujourd'hui sur ce post de la mi-août:



"

 

Je suis, depuis le début, et avec la plus grande attention, votre enquête. Après tout ce qui a été dit à ce sujet, je ne vois pas ce que je pourrais vous apporter d'intéressant pour justifier mon incroyance absolue à tout surnaturel, en général, et à celui de Lourdes en .particulier. Peut-être y a-t-il quelque utilité à rappeler en cette circonstance que Charcot a porté un coup mortel à la thaumaturgie du célèbre sanctuaire, au cours de ses cliniques de la Salpétrière. Sa démonstration fut décisive en ce qui concerne les plus nombreuses de ces prétendues guérisons (maladies dont l'origine nerveuse est incontestable, contractures, parésies. paralysies, aphasies, etc., etc., que l'on réunit aujourd'hui sous le nom de pithiatisme).
Nombreuses furent les guérison~ qu'il effectua devant un public d'élite, avec des moyens analogues à ceux qu'on emploie à Lourdes et qui ont pour base la suggestion et l'autosuggestion sous toutes ses formes.
Sans doute, depuis la disparition du grand neurologiste, une certaine réaction s'est produite à l'encontre de plusieurs de ses découvertes, touchant la grande hystérie surtout. Il est certain que Charcot et ses disciples, Bressaud, Bourneville. Gilles de la Tourette, etc., ont pu être trompés quelquefois par la malice, morbide elle aussi, de leurs malades.
Ils ont pu prendre, par exemple, pour un effet direct de la suggestion ces stigmates représentant les plaies du Christ, véritables phlyctènes provenant de brûlures, que s'infligeait telle hystérique désireuse de se faire valoir en mentant et en trompant.
Mais comme l'ont fait remarquer plusieurs savants, dans les discours prononcés à l'occasion récente des fêtes, les faits essentiels subsistent Charcot a réellement annexé à la science positive tout ce domaine de la suggestion et de l'hypnose qui appartenait encore à l'occultisme, et élucidé le mécanisme de maintes guérisons miraculeuses, dont Lourdes parait s'être approprié le monopole.
Cela n'empêche pas que les partisans acharnés du sanctuaire. et, avec eux, tous les obscurantistes, ont profité de ces retouches imposées par des observations et des expériences nouvelles, pour crier à la faillite complète de l'œuvre de Charcot, en ce qui concerne l'hystérie.
On n'a d'ailleurs pas oublié les colères soulevées dans le monde clérical, au moment où. dans ses leçons du mardi, il tirait les conséquences relatives aux prétendus miracles de
Lourdes.
Si je ne craignais d'être trop long et de sortir un peu du sujet de cette enquête, je raconterai ici, à ce propos, une anecdote où je fus témoin et qui met bien en relief la mentalité Je suivais à ce moment la clinique de Charcot. comme auditeur libre. Un mardi matin, alors que le Maître n'était pas encore arrivé, on fit circuler le Figaro de ce jour-là. Il contenait contre Charcot un article encore plus bête que méchant. Ce factum, signé Ignotus était écrit dans une sorte de charabia composé de phrases elliptiques, hachées menues, sortes de tronçons informes, entremêlées de nombreux points d'exclamation qui apparaissaient là comme des glaives minuscules enfoncés sans pitié dans le cœur de la grammaire et de la syntaxe. C'était le style d' Ignotus dont se réjouissait une fois par semaine la capitale.
Ce matin-là, son papier contre le Maître était comme la quintessence de cet effarant charabia. On y comptait en 130 lignes quinze fois le mot « cabotin suivi chaque fois de
quatre points d'exclamation.
L'injure supposée faite à Notre-Dame-de-Lourdes par l'enseignement de l'illustre neurologiste était relevée d'une façon qu'un gros effort de mémoire me permet de reproduire ci- après: Je dis au cabotin de la Salpétrière « Qu'est une béquille ? Dieu! Un morceau de bois!! Que dis-je ? Un signe attristant de décrépitude!! Regardez au mur du grand sanctuaire!!! Rayonnante comme un soleil, o cabotin!! Eblouissante comme un ostensoir!! Symbole de guérison!! Joie!! Allégresse!! la créature guérie!! Devant le soleil. l'aigle des monts altiers cligne les yeux!! Regardez le soleil en face, l'aigle le peut!! La gloire de Marie, jamais!! Ô gloire de l'immaculée!! Stella matutina!! burris eburnea!! Pour te salir, que faut-il ? Un cabotin ».

Tel était, forme et fond. le schéma à peu près fidèle de l'article qui circulait, ce matin-là, parmi l'auditoire de Charcot. Ceux d'entre nous déjà initiés à la vie parisienne se tordaient comme toujours en lisant de l' « Ignotus » et leur hilarité était encore plus vive car plus grande apparaissait la bêtise de cet imbécile attaquant le Maître et bavant sur son enseignement comme un paralytique méningiteux tombé dans le gâtisme final. Seuls les exotiques et les provinciaux, comme moi, s'indignaient en se passant le Figaro.
Toutefois, dès que la présence de Charcot fut signalée. nous vîmes Brissaud son chef de clinique, s'emparer d'un geste vif du numéro en circulation et le fourrer dans la grande poche de son tablier. Le croyait-il donc capable d'en ressentir quelque émotion, au cas où tomberait sous ses yeux cette prose d'idiot ? Probablement, et plus d'un parmi nous, en le voyant palper ses malades d'une main nerveuse, les interroger d'une voix quelque peu saccadée, écourter même l'examen. toutes choses oui contrastaient avec son calme habituel et sa coutumière lenteur, pensa, que, sûrement, il l'avait !u.

Nous l'apprîmes, (Tailleurs, le mardi suivant par Brissaud lequel nous confia que le Maître avait passé la semaine à maudire cet Ignotus et à pester contre Magnard, le directeur du Figaro. Et il ajoutait avec un pitoyable sourire:
   - « Cela lui a fait l'effet d'une forte poignée de gratte dans sa flanelle ou dans son lit. »
Orgueil et simplicité tout à la fois d'un grand esprit. On peut mesurer, dis-je en unissant, la pauvreté lamentable des arguments que l'obscurantisme opposa de tout temps aux démonstrations lumineuses de Charcot et de ses disciples, relatives à Lourdes et à ses miraculeuses guérisons.

Paul Vigné d'Octon