Un bus de nuit et nous voilà fourbu (et le postérieur bien abîmé) à Banaue. Pour bien faire, nous avions choisi la compagnie la plus locale Ohayami, même le taxi à Manille, ne savait pas où elle se situait. Un petit stand dans une ruelle, devant laquelle sont garés deux bus sans âge. Nous montons dedans et en avant pour 10 heures de voyage à travers quelques bonnes routes et beaucoup de chemins de terre sinueux.
Banaue est une jolie bourgade à flancs de collines. A 1200 mètres dans la cordillère centrale, la météo y est assez clémente voire fraiche en fin de journée. On arrive sous un ciel plombé, découvrant la vue magnifique de notre hotel. En arrière plan, les rizières qui seront notre quotidien pendant les prochaines 48h. On vient à Banaue pour ses fameuses rizières en terrasse. Construites il y a plus de 2000 ans par les Ifugao (tribu des montagnes), elles sont restés les mêmes jusqu'à aujourd'hui. Elles sont toujours utilisés par les villages Ifugao qui y cultivent le riz avec une ou deux moissons par an. Désormais inscrites au Patrimoine de l'Humanité de l'Unesco, elles attirent les peu de touristes qui délaissent les plages du Sud pour la beauté sauvage du Nord.
Notre première promenade nous amène autour des villages proches de Banaue. On y va sans guide, à travers des petits chemins de terre, longeant les rizières entre le village de Tam An et Poitan. Des personnes en chemin nous indiquent par où continuer notre périple. Dans chaque village, on découvre la vie traditionnelle avec les maisons carrées typiques des Ifugao. Chaque famille habite dans une de ces maisons qui abrite un grenier pour faire sécher le riz. A l'extérieur, on trouve des crânes d'animaux, voire parfois d'humains chez ces anciens coupeurs de tête. On ne verra cependant pas de vrais coupeurs de tête, les derniers habitent dans la région du Kalinga à quelques dizaines de kilomètres au Nord. Mais sans infrastructure et avec parfois des guerres tribales intempestives, on nous déconseille d'y aller...
Retour à Banaue en fin de journée, on fait un petit tour au marché où la viande mâture à la chaleur ambiante... et le coucher de soleil tombe sur les tricycles qui encombrent la ville.
Le lendemain, départ matinal, Jerrick, un guide que nous avons rencontré la veille, nous amène voir les rizières de Batad, à 5 heures de marche de Banaue. La brume se lève sur les collines et nous bravons une pluie intermittente. Le spectacle des rizières n'en reste pas moins sublime. La couleur jaune indique que la moisson est proche, tout au plus dans 10 jours, il ne restera plus rien. On arrive enfin à Batad, petit village perdu au milieu des collines. Construites en forme d'amphithéâtre, les rizières sont soutenues par des petits murets de pierre. Le paysage en est tout simplement stupéfiant...
On repart avec un petit sourire de bébé en tête et sous un début de pluie qui finira en déluge total et intégral. Les chemins ne sont plus que des rivières de boue, rendant difficile chaque pas. Nous nous retrouvons au coeur d'une véritable tempête... (aucune photo, mon appareil était bien rangé dans un sac plastique au fond de mon sac à dos détrempé...) Après avoir marché 3 heures puis avoir poussé le tricycle embourbé dans la boue jusqu'à ce que la route (ou du moins la rivière) redevienne praticable, on arrive tant bien que mal à Banaue à la tombée de la nuit. On apprendra après que nous sommes passés pas très loin de l'oeil du typhon, heureusement fortement apaisé par la cordillère centrale des Philippines. Les autres guides (au courant) avaient refusé d'amener des touristes à Batad, ce qui expliquait que nous étions quasiment les seuls à avoir bravé les typhons. On s'estime finalement chanceux, ce typhon pendant sa traversée des Philippines aura causé 80 morts et aura inondé une bonne partie du Sud des Philippines y compris Manille. Vous en avez probablement entendu parlé lorsqu'il a atteint ensuite la côté chinoise où il causa autant de dégâts...
On part le lendemain pour Sagada, autre destination touristique du Nord de Luzon. Du moins, on espère car les glissements de terrain ont bloqué la route une bonne partie de la nuit. On grimpe dans un jeepney (bus jeep local) attendant qu'il se remplisse pour le départ. En chemin, on voit encore plus de villages, de rizières, de collines et de rivières... Le village de Sagada est moins chamant que Banaue, du moins la vue y est moins impressionnante, mais il y règne un air de sérénité.
On vient à Sagada pour son ambiance, ses randonnées, ses cascades et ses grottes... On a autant l'impression d'être aux Philippines que dans les Alpes, si ce n'étaient les rizières toujours omniprésentes. Les villages autour de Sagada n'enterrent pas leurs morts. Ils laissent leurs cercueils à l'air libre le long des parois des falaises calcaires ou dans des grottes en fonction de la façon dont ils sont morts. Les randonnées consistent donc souvent à aller voir ces fameux Hanging Coffins. Sur la photo ci-dessous, j'ai juste refait un zoom sur les cercueils, vous apercevrez ce que donnent les hanging coffins de près... Et oui, on voit tout... En approchant de ces cercueils au couvercle parfois défoncé, on peut observer en détail l'anatomie humaine... Dans la grotte funéraire de Lumiang ci-dessous, les cercueils sont superposés à ciel ouvert. On ne le voit pas bien, mais ils s'étirent à l'infini jusqu'au fond de la grotte... Il y en a plus d'une centaine donc certains ont 500 ans.
Autre visite qui ne nous décevra pas, la visite de la grotte de Sumaging est une véritable descente au plus profond de la terre. Inondée par la pluie, la visite se fera avec de l'eau jusqu'au genou, parfois des descentes (et des montées en rappel) dans des cascades et à la seule lumière d'une lampe à gaz. Une vraie aventure...
Mais Sagada, ce sont aussi ses cascades dans lesquelles on se baigne dans les vasques, ses petits villages, ses poulets... On finira finalement plutôt ravis de notre petite virée vers le Nord, mais la plage n'attend pas... Un bus de 10h et nous voilà reparti vers Manille où un avion nous attend vers Puerto Princesa, capitale de l'île de Palawan, notre prochaine étape.