Un krach boursier est évité pour l’instant. Etes-vous rassuré ?
Je ne le serais que lorsque qu’une véritable gouvernance de la zone euro aura été mise en place. D’ici là, la
Banque centrale européenne a pris la seule décision qu’il convenait d’adopter. Quand les autorités politiques ne proposent pas de solutions durables, ce sont les institutions financières qui
les suppléent dans l’urgence. L’accord du 21 juillet a été partiel puisque limité à la Grèce et insuffisant quant aux sommes dégagées pour le fonds de stabilisation financière. Aujourd’hui,
l’Europe doit prendre deux dispositions : d’abord, amplifier les capacités d’intervention du Fonds. Ensuite, se doter de la possibilité de garantir les emprunts nouveaux que des états membres
devront souscrire et emprunter elle-même avec des eurobonds pour qu’il n’y ait plus d’écarts de taux d’intérêt entre les pays de la zone euro. Le couple franco-allemand doit montrer la voie et
ne plus tergiverser comme il le fait depuis dix-huit mois. L’Europe intervient toujours trop tard et trop peu, alors que face aux marchés, il convient d’anticiper et d’agir fort. La réponse à
cette crise est politique. Elle exige une gouvernance économique cohérente autour du Président du conseil européen, avec les outils indispensables comme les eurobonds et le fonds de
stabilisation. L’improvisation et l’hésitation face à la spéculation nous ont déjà coûté assez cher. Le risque aujourd’hui est celui de l’éclatement de la zone euro. Il n’y a plus de temps à
perdre. Il faut faire fort, vite et clair !
La France peut-elle perdre, elle aussi, sa note on triple A ?
Il y a des critères comme le niveau de la dette publique qui nous mettent en difficulté et sous surveillance des agences de
notation. Ce ratio est passé de 60% à 85% du PIB en neuf ans de gouvernement de droite. Ce qui est désormais en jeu, c’est la crédibilité de la stratégie des finances publiques présentée par le
chef de l’Etat. Tout dépendra de la sincérité du budget pour 2012, surtout si la croissance ralentit. Personne n’imagine que nous pourrons atteindre les objectifs affichés sans remise en cause
des avantages fiscaux consentis par l’actuelle majorité depuis quatre ans. Ne pas le faire serait une double faute tant par rapport à nos partenaires européens qui douteraient de nous que par
rapport aux Français qui n’accepteront pas de consentir quelque effort que ce soit sans justice fiscale.
Jean-Louis Borloo suggère de revenir sous la barre des 3% du PIB dès 2012. Qu’en pensez-vous
?
Ce n’est ni réaliste, ni souhaitable. Il faut s’en tenir aux objectifs définis. Respecter nos engagements serait déjà
appréciable. Je tiens, pour ce qui me concerne un discours de vérité. Si nous voulons remettre de l’ordre dans nos finances publiques, je le dis, un effort collectif sera nécessaire. Le débat
en 2012 ne sera pas entre ceux qui veulent augmenter les impôts et ceux qui le refusent, mais
entre ceux qui voudront augmenter certains impôts et ceux qui voudront baisser beaucoup de dépenses. De toute façon, il y aura des relèvements de prélèvements obligatoires, ils sont d’ores et
déjà contenus dans la stratégie présentée par l’actuel gouvernement à laquelle la France a souscrit. L’interrogation est de savoir qui va payer et avec quels impôts ?
Est-il raisonnable de rejeter la règle d’or de la majorité ?
La règle d’or telle qu’elle a été votée par la majorité est factice
puisque son application n’est pas prévue avant 2013. C’est une manoeuvre de Nicolas Sarkozy pour faire oublier sa responsabilité dans la dérive de nos comptes publics depuis 2007. Il ne peut
s’en absoudre par une modification de la constitution. Ce serait trop commode. Je propose une autre méthode. Je suggère donc que soit ajouté au projet de loi de finances pour l’an prochain un
amendement dans lequel la France s’engage à respecter sa trajectoire de retour sous la barre des 3% en 2013. Cela montrerait la détermination de l’ensemble de la nation à tenir les engagements
pris. Le débat politique en 2012 porterait alors sur les moyens d’y parvenir et sur les conditions d’un retour à la croissance. Et là, le clivage est profond !
Est-il crédible de promettre un retour à la retraite à 60 ans ?
J’ai toujours dit que pour ceux qui auront cotisé 41 ans et demi pourront partir à 60 ans. Ce principe demeure. Il y aura
lieu à partir de 2013, comme c’est d’ailleurs prévu, d’engager de nouvelles discussions sur l’avenir des retraites et de mettre en oeuvre des réformes plus structurelles.
(Photo AFP)
Propos recueillis par STEPHANE DUPONT pour « les echos »
Merci à Section du Parti socialiste de l'île de ré