Sous le label d’Appellations Suisse, deux poèmes de cinéma, signés Basil da Cunha et Lionel Baier, ont été applaudis hier matin par un public venu en nombre à la grande salle de la FEVI, tandis que le soleil repiquait sur Locarno.
Dans la même foulée généreuse, avec la même lucidité vive et tendre, Lionel Baier poursuit son œuvre dans un road-movie combinant son expérience largement confirmée et la passion collective de la troupe d’amateurs vaudois de La Dentcreuze.
Après le passionnant «journal » filmé au téléphone portable de Low Cost, vu l’an dernier à Locarno, Toulouse combine avec bonheur la fugue de Cécile (Julie Perazzini, seule comédienne de l’équipe, d’une présence intense et lumineuse) et de Marion, sa petite fille de 10 ans (Alexandra Angiolini, également épatante de vivacité blessée), loin d’un père (Julien Baumgartner) à la passion narcissique dangereuse.
L’échappée belle, à bord de la vieille Ford Solange rebaptisée Ariane, comme la fusée, traverse nos campagnes bonnement magnifiées par le cinéaste et son cameraman (Bastien Bösiger, formé à l’ECAL) du matin à la nuit d’un 1er août pas comme les autres. Revisitant ses thèmes personnels liés aux multiples aspects de la relation amoureuse ou familiale, Lionel Baier se réapproprie une fois de plus nos paysages en les dégageant de tous les clichés. Un humour à la Michel Soutter alterne avec des « citations » littéraires (le Gracq d’Un balcon en forêt) et autres greffes de pubs à la Godard, mais dans une « musique » qui n’est que de Baier, chroniqueur fluide et savant recousant les paperoles du temps à sa façon.
La dernière séquence du film vaut son pesant de malice, quand la petite Marion, à l’arrivée à Toulouse, fait remarquer à Cécile que l’idée est rigolote, de donner à une ville le nom d’une chanson.
À relever, enfin, que ce «film d’été», selon l'expression modeste de Lionel Baier, associe les amateurs de la Dentcreuze avec la même générosité que montre le cinéaste vaudois dans son hommage récent au vieux maître Claude Goretta, à découvrir aussi à Locarno…
Nuvem et Toulouse sont repris au Rialto 1, le 9 août à 21h.30 ; Bon vent Claude Goretta, le 12 août au Palavideo, à 16h.