Les arguments de la Droite Populaire ont visiblement plus d'effet sur Xavier Bertrand que les chiffres eux mêmes ! Ce qu'il confirmait, lors d'une interview donnée à Nice Matin vendredi dernier : « Nice Matin : Comment maîtriser les 40es rugissants de la Droite populaire ?
Xavier Bertrand : J’y compte des amis comme Thierry Mariani qui a la tête sur les épaules. Parfois, ils parlent fort mais ils traduisent aussi ce que pense une partie de notre électorat. Ils ont des choses à dire, il faut les écouter »
Les écouter et surtout ... appliquer ce qu'ils réclament, puisque : « Xavier Bertrand, ministre du Travail et de la Santé, a annoncé (...) la mise en place d'un fichier unique des allocataires sociaux avant la fin de l'année, qui est selon lui la meilleure façon de renforcer la lutte contre des fraudes sociales. Je suis tout à fait d'accord avec Thierry Mariani (...) »
Sur quoi s'appuient les deux ministres pour prendre cette décision ?
En partie sur le rapport rendu par la : « Commission des affaires sociales en conclusion des travaux de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale sur la lutte contre la fraude sociale et présenté par Dominique TIAN » le 29 juin 2011, qui interrogeait Xavier Bertrand à ce sujet à l'Assemblée Nationale
Or, la proposition de Xavier Bertrand et Thierry Mariani vise uniquement les allocataires alors que le rapport indiquait clairement que la majeure partie de la fraude concerne les entreprises !
En effet : La fraude aux cotisations patronales et salariales non versées en raison du travail au noir représentent entre 8 et 15,8 milliards et celles aux prestations (indemnités d'arrêts maladie, allocations familiales, RSA, etc.) entre 2 et 3 milliards !
D'ailleurs, le rapport fustige le gouvernement sur son manque de volontarisme contre le travail illégal : « (...) Des pouvoirs publics insuffisamment mobilisés face à l’ampleur du travail illégal (...) Si la mission constate l’amélioration de la détection des fraudes aux cotisations ces dernières années, les redressements ne représentent cependant qu’une faible part de la fraude supposée, montrant ainsi que les fraudes aux cotisations sont insuffisamment poursuivies. En effet, si l’on prend en compte les estimations de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale – faisant état d’une fraude comprise entre 13,5 et 15,8 milliards d’euros – les redressements en faveur des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale ne représenteraient que 6 % à 7 % du montant de la fraude (...) » Page 28 « (...) Certes, la politique menée par le Gouvernement pour développer la lutte contre le travail illégal a permis d’améliorer les résultats (...) Cependant malgré cette progression, ces redressements sont insuffisants par rapport à l’ampleur du travail illégal. Si on prend en compte les estimations du conseil des prélèvements obligatoires – qui considère que le travail illégal représente entre 6,4 et 12,4 milliards d’euros – les redressements pour travail illégal en 2010 ne représentent qu’entre 1,5 % et 2,9 % de la fraude présumée (...) » Page 29
(...) S’agissant, par exemple de la lutte contre le travail illégal, certains croisements mériteraient d’être automatisés. M. Vincent Ravoux, directeur de l’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales de Paris et de la région parisienne a constaté « Les relations avec les services fiscaux sont bonnes, mais fonctionnent sur un mode archaïque car elles se font sous forme papier ou par déplacement physique des personnes. Il faudrait moderniser les procédures, d’autant que nous travaillons ensemble au sein des comités opérationnels départementaux anti-fraude. » Page 47 « le taux de recouvrement des redressements consécutifs aux situations de travail dissimulé est de l’ordre de 10 % à 15 %, donc très faible (...) » page 64
Néanmoins, Xavier Bertrand, pour faire plaisir à la Droite Populaire et une partie de l'électorat sensible aux questions « d'assistanat » chères à Laurent Wauquiez, a décidé de s'occuper prioritairement de récupérer une partie des 2 à 3 milliards des allocations plutôt que des 8 à 15,8 milliards !
En clair, dépenser plus pour essayer de débusquer les fraudeurs de la France d'en bas et oublier de mettre assez de moyens pour traquer ceux d'en haut.
Belle leçon de morale et de comptabilité !
Source
Commission des affaires sociales en conclusion des travaux de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale sur la lutte contre la fraude sociale
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20Minutes