Je me doute bien qu’au vu de titre de mon billet, je vais attirer sur cette page tout ce qu’Internet compte de malades mentaux qui auront demandé à Google de leur trouver « Coucher avec Bill Murray », « Bill Murray sors-moi ton gros tuyau à fantômes » ou « Me faire prendre comme une bête par le Maître des Clés » (celle-là tu ne peux pas la comprendre si tu n’as pas vu le film).
Tu m’en vois navrée et donc, subséquemment, je corrige le tir tout de suite en te précisant que mon billet ne parlera pas des saletés qu’on peut faire avec un acteur célèbre mais plutôt des saletés qu’on peut faire avec un animal de six cent kilos puissamment doté par Mère Nature (ceci étant dit, je suis convaincue que tous les pervers qui ont atterri sur ce blog par erreur viennent subitement de quitter la page).
Avant, Bill Murray était un cheval de course célèbre qui rapportait des sous aux losers alcooliques qui fréquentent les bars-tabac-PMU en refilant l’intégralité de leur RSA ou de leur SMIC à la Française des Jeux entre deux ballons de rouge de mauvaise qualité. Aujourd’hui, Bill Murray est vieux et il ne gagne plus de courses, donc plus de sous, donc son propriétaire a voulu le vendre à monsieur Guivarch, qui est boucher. Mais monsieur Guivarch était un peu embêté, rapport au fait que lui aussi il passe ses journées au bar-tabac-PMU du coin entre deux côtelettes et qu’il connait Bill Murray depuis qu’il a fait la « Une » de Libération Sport (je savais pas, moi non plus, que Libé avait des pages sportives, c’est un peu comme si on m’avait dit qu’on embauchait des photographes de mode au journal Le Monde). Alors monsieur Guivarch a préféré trouver une bonne poire qui voudrait bien récupérer Bill Murray sans forcément le transformer en saucisson, et donc voilà.
Bill Murray est très grand, c’est pour ça que je l’appelle Bill Murray (et aussi parce qu’il est très flegmatique).
Quand il est arrivé, je me suis dit qu’il allait falloir lui acheter des choses, parce qu’un cheval, c’est un peu comme une blogueuse mode, ça a besoin d’accessoires particuliers, comme des boîtes de pâtée et aussi une caisse pour faire ses besoins. Donc je suis allée dans un magasin spécialisé dans les chevaux (et aussi dans les blogueuses mode, tu vas comprendre).
Le magasin était immense, ça sentait le cuir et le parfum fashion pour pré-adolescente boutonneuse. Quand je suis entrée, une quinzaine de jeunes filles blondes anorexiques ont tourné la tête vers moi. Je me suis dit que je m’étais trompée et que j’avais poussé la porte du fan-club de Justin Bieber, mais en fait non. On se serait cru dans un épisode de Hannah Montana, ça faisait un peu peur, mais j’ai su que j’étais au bon endroit à cause des posters de poneys roses et aussi des prix affichés devant chaque article, qui ressemblaient aux chiffres que tu trouves dans Les Echos à la rubrique « P.I.B de la Thaïlande et du Tadjikistan ».
La moins grosse des jeunes filles, qui ressemblait à un phasme et qui était habillée comme si elle allait passer le casting de Secret Story pour la catégorie « mon secret est en rapport avec les parties de golf au Crouesty et les abus sexuels dans la grande bourgeoisie de Sologne », a sautillé vers moi avec un grand sourire.
- Bon-jouuur, je peux vous aydey?
- Faut voir, j’ai dit, c’est pour habiller mon nouveau copain.
- C’est un ponay?
- Nan, c’est un cheval de course.
- Owwww, un piour-sangue! Alors pour un piour-sangue, il fow absoooolument choisir du veyrt d’ô comme couleur. C’est trèèès tendance, le veyrt d’ô comme couleur.
- Bah là je me fous un peu de la couleur en fait, je voudrais juste une selle pour mettre dessus, et les trucs qui vont avec.
Il y a eu un gros blanc et toutes les gamines m’ont regardée comme si le massacre des bébés phoques, le trou de la couche d’ozone et la mort d’Amy Winehouse, c’était clairement moi.
- Je vay vous layssay regarder nos articles en solde, là, au fond du magasin, où c’est écrit « matériel de prolétaire », a dit la fille avec le drôle d’accent avant de repartir derrière sa caisse, où elle s’est mise à faire des messes-basses avec un sosie de Nicole Richie.
Je me suis baladée un peu dans les allées en essayant de donner l’impression que moi aussi j’avais quatre mille euros d’argent de poche à claquer dans une paire de bottes griffées (j’ai pas trop compris comment on pouvait mettre autant d’argent dans une paire de godasses qui allaient passer l’essentiel de leur vie de godasses dans la merde, la poussière et la boue). Les filles blondes qui essayaient des pantalons de grande marque, des casques en cuir estampillés « Louboutin » (série limitée) et des gants en peau de léopard des neiges, se racontaient des choses de filles blondes élevées dans la certitude que même les préservatifs et le papier toilette qu’elles utilisent doivent coûter un bras pour être un tant soit peu crédibles.
- Ow, disait Fille Blonde N°1, eh bien Prince du Soir Qui Tombe et moi, à la fin du parcours, sur un spa heynorme, nous avons littéralement bluffé le jury du concours!
- Hey, disait Fille Blonde N°2, félicitations, surtout sur un spa, une victoire amplement méritay.
- Ça me rappelle le parcours de complet du week-end dernier, un spa suivi d’un piano abyssal…te-rri-fiant. Mais bien sûr, Minouche De La Motte Beuvron et moi avons survolé tout ça sans problème.
- Hiiiiiiiiii! a fait Fille Blonde N°4.
- Alors, Marie-Amélie, tu prends finalement le licol en soie de Chine?
- Je ne say pas…il coûte quand meyme trois-cent euros…
- Bah, demande à pahpah…
Moi je comprenais qu’à moitié leurs histoires de sauter par-dessus des bains à remous suédois et des instruments de musique, mais je continuais à mettre des choses dans mon caddie, histoire de pas avoir l’air trop bête non plus.
A un moment donné, une des filles a montré une photo de son canasson (qui s’appelait Espoir Des Vents Nobles De Cotopaxi) à ses copines. J’ai jeté un coup d’œil discrètement, en passant, et on voyait un petit poney noir habillé tout en rose, avec un chasse-mouche sur la tête qui ressemblait à une burqa.
A la fin, je suis allée à la caisse et j’ai posé mes trucs devant la fille-phasme. J’avais pris une chouette selle pas en cuir, des chouettes bottes pas en cuir, un chouette bridon pas en cuir et des protections pas en cuir (parce que Bill Murray est un peu comme ces gosses qui font du patin à roulettes, il faut lui couvrir les jambes pour pas qu’il se blesse). La fille m’a lancé un sourire glacial en faisant le total de mes trucs et elle m’a demandé comment s’appelait mon poh-nay. Là j’étais un tout petit peu énervée.
- C’est pas un poney, j’ai dit, c’est un cheval de course, il s’appelle Bill Murray De Mon Cul Sur la Commode, il a une bite énorme, un vrai marteau-piqueur, il bouffe comme quatre, chie comme douze, et il t’emmerde.
J’ai laissé tout mon bazar sur le comptoir, j’ai tourné les talons et je suis partie chez Décathlon.
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