« En effet, Stephen a appris d’elle qu’on peut vivre avec quelqu’un sans empiéter sur son existence, sans lui demander directement ou sournoisement de renoncer à ce qu’il est profondément. Il a sans cesse été frappé par le respect absolu, non négociable, de Louise pour la liberté d’autrui, par son refus presque intégriste de le faire changer, de l’amender. Elle racontait souvent, en plaisantant, qu’elle avait reçu Stephen dans un état et qu’elle le rendrait dans le même état, qu’on ne pourrait pas lui adresser le reproche de l’avoir déformé, rabougri, écorné, ni même amélioré d’ailleurs. Elle n’a touché, en fin de compte, à aucune de ses qualités ni à aucun de ses défauts. Elle a tout laissé intact. Il n’a jamais eu à se renier, à se dédire, à se corriger. Il a été libre de tous ses choix. Cette impunité, il en a découvert la valeur inestimable au lendemain de ses noces. Trop tard. »
L’arrière saison de Philippe Besson est un roman « d’atmosphère », un huis-clos à l’ambiance hitchcockienne. Rien n’est extraordinaire, un bar sur la Côte Est des Etats-Unis, un quatuor composé de deux anciens amants, d’un serveur et d’un pêcheur et c’est tout… Mais c’est là la grande force de Philippe Besson, qui nous entraîne au cœur des conversations, des souvenirs, des espoirs avec une infinie lenteur et le charme suranné d’une soirée de fin d’été à Cape Cod. La scène est tellement banale qu’elle en devient unique. Philippe Besson, peint et compose un tableau mélancolique et nostalgique comme celui dont il s’est inspiré pour écrire ce roman (« Nighthawks » d’Edward Hopper). *****
La 4 ème de couverture est là.
L’arrière-saison. Editions Juillard,2002.