Divine surprise ! Ce jeudi 4 août, la chambre des requêtes de la Cour de justice de la République s’est prononcée en faveur de l’ouverture d’une enquête sur madame Christine Lagarde. Il est vrai que cette demande avait été formulée par, excusez du peu, Jean-Louis Nadal, à l’époque procureur général près la Cour de cassation.
J’ai déjà consacré plusieurs billets au litige ayant opposé Bernard Tapie à feu le Crédit Lyonnais, billets dont vous trouverez les adresses au bas de celui-ci. Plus brièvement, voici un résumé des événements.
Suite à une plainte de Bernard Tapie réclamant en 1996 au Consortium de réalisation (CDR) 990 millions d'euros pour « montage frauduleux », la Cour d'appel de Paris a condamné le 30 septembre 2005 le CDR à lui payer 135 millions d'euros, jugement cassé le 9 octobre 2006 par la Cour de cassation.
Par deux fois, Bruno Bezard, Directeur général de l’Agence des participations de l’Etat, déconseille à Madame Lagarde de permettre au CDR de donner suite à une offre d’arbitrage. Notre ministre des Finances ne suit pas ces recommandations et, le 16 novembre, un tribunal arbitral accorde à M. Tapie 245 millions d’euros. Par trois fois, en juillet 2008, M. Bezard recommande à Mme Lagarde d’introduire un recours contre la sentence des arbitres. Peine perdue.
Thomas Clay, doyen de la faculté de droit de Versailles, qualifie ce recours à l’arbitrage comme extravagant pour trois raisons :
- le choix de ce recours « s’est fait en cours de procédure judiciaire, déjà bien avancée, et après une décision défavorable à Tapie ».
- le caractère confidentiel d’un arbitrage n’est pas admissible lorsqu’il est susceptible d’entraîner des dépenses d’argent public.
- d’après les informations de la Cour des comptes et d’autres parutions récentes, l’un des arbitres a fait des déclarations lacunaires, ne révélant pas ses liens avec l’une des parties.
Pour ma part, je m’attacherai au montant astronomique de l’indemnité accordée au titre du préjudice moral subi. Quel est le montant du dédommagement perçu par la famille d’une victime de l’amiante, du sang contaminé, ou d’une erreur médicale ? La réputation de Monsieur Tapie, qui n’est plus à faire, serait donc infiniment plus précieuse que des vies humaines ?
On nous annonce aussi que l’enquête sera longue, des mois, voire des années. Certes, une enquête judiciaire se doit de ne pas être bâclée et conduite, sans a priori, avec méthode et mesure. Mais enfin, en l’occurrence, les différents documents sur lesquels se fonde la plainte reçue par la CJR sont déjà largement connus. Est-il besoin d’années pour les scruter et en découvrir d’autres, protégés par on ne sait quel secret défense qu’on ne saurait lever sans mettre en péril l’existence même de notre nation ?
Ou ne s’agit-il pas, tout simplement, de repousser un jugement après la fin du mandat de l’actuelle Directrice du FMI, cette fringante cycliste, géniale inventrice de la croissance négative ?
Billets précédents :
htpp://malesherbes.blogs.nouvelobs.com/archive/2011/05/11/lagarde-imperiale.html
htpp://malesherbes.blogs.nouvelobs.com/archive/2011/05/26/faire-tapie.html
htpp://malesherbes.blogs.nouvelobs.com/archive/2011/06/02/pauvre-tapie.html
htpp://malesherbes.blogs.nouvelobs.com/archive/2011/06/02/pauvre-tapie-annexe.html
htpp://malesherbes.blogs.nouvelobs.com/archive/2011/06/24/mauvais-proces.html