Allez, on commence de suite par les tymologies. Alors aussi curieux que cela puisse paraître, "Pernštejn", comme le bled à ses pieds "Nedvědice", sont de même origine. Le premier vient d'un dialecte nord-germanique (et pas hochdeutsche), qui se traduirait aujourd'hui en Allemand standard par "Bärenstein" (caillou, pierre, rocher... de l'ours). Puis par déformation est arrivé "Peřtén" puis "Pernštejn". Maintenant ceux qui auraient fait du Tchèque, savent que "bär" se dit "medvěd", et que "medvědice" est la femelle du "medvěd" en Tchèque moderne (et une femme qui ne se rase pas le crin, en argot). Mais en vieux Tchèque l'on disait "nedvěd", comme le
Maintenant quelques mots sur les noblaillons de la famille "z Pernštejna". C'est assez confus, d'abord parce que les archives du château comme de la famille furent détruites en milieu du XIX ème siècle (un inconscient émit l'ordre de détruite les documents administratifs comme familiaux de la famille "z Pernštejna"). Et c'est assez confus ensuite, parce que l'archiviste et historien "Antonín Boček" est allé embrouiller les textes restants par ses propres falsifications (vers la fin de la première moitié du XIX ème siècle, précurseur de "Bertold Bretholz", il inventoria et traduisit les plus anciens textes latins, tout en inventant les informations qui faisaient défaut, ou celles pouvant apporter de l'eau viciée à son fétide moulin). Mais je vais essayer de vous guider quand même, z'inquiétez donc pas. Le plus ancien ancêtre des "z Pernštejna" qui est historiquement avéré, est un certain Stéphane de Medlow (cf. "Codex diplomaticus et epistolaris Moraviae II, p.14, 16, Heinricus, qui et Wladislaus, marchio Moraviae, monasterio Gradicensi silvam spatiosam Strelna inter fluvio Odram et Maravam interjacentem confert exstirpandam, eamque limitat. VIII. Kalendas Martii, 1203. [...] Stephanus de Medlaw, et uenatores supra nominati, ac alii quam plures"). Il était le bras droit du margrave de Moravie Henri-Venceslas, burgrave du castel "Děvičky", fondateur du couvent de "Doubravník" (disparu depuis la fin du XVI ème siècle), et il est mentionné comme témoin sur moult documents d'assurance d'entre 1203 et 1228. C'est lui qui installa la famille "z Medlova" dans cette région au Nord-Ouest de Brno. En ces temps, la primo descendance masculine héritait du patrimoine foncier, les autres (cadets, filles, bâtards...) entraient dans les ordres afin de défendre les intérêts de la famille de l'intérieur (lobbysme, pression, influence...). Ainsi le fils de Stéphane, Adalbert ("Vojtěch"), devint le prévôt du couvent susmentionné, et avec ses 2 frères Stéphane (second) et Emmeram ("Jimram"), se faisait encore appeler "z Medlova" (cf. les édits d'entre 1228 et 1256). Ce n'est qu'en 1285, que l'on aperçoit pour la première fois un certain Stéphane (troisième) "z Pernštejna" (petit fils de Stéphane [second] "z Medlova"), dans un édit de l'évêque de "Olomouc" Théodoric ("Dětřich", cf. "Codex diplomaticus et epistolaris Moraviae IV, p.296 Theodericus, episcopus Olomucensis, donationem ecclesiae in Olsi monialibus in Daubrawnik factam confirmat. Dt. in Modrice, XV. Kalendas Martii, 1285. [...] Acta sunt hec presentibus d. Archlebo dicto de Medlow [...] domino Stephano de Pernstein."). Aussi tout laisse à penser que le château aurait déjà été construit en 1285, sans vraiment savoir quand (ni si). Dans la famille "z Pernštejna", on retrouve ensuite en plus des Stéphane et des Emmeram, des Philippe, des "Bohuslav", et des Gallus ("Havel"), parfois "z Medlova", parfois "z Pernštejna" (Cf. "Codex diplomaticus et epistolaris Moraviae IV, p.396 Philippus, Bohuslaus et Emmerammus, fratres de Pernstein, monasterio Zarensi decimas vinearum in Medlow cum jure montium conferunt. Dt. Brunae, 16. Februarii, 1293.."). La particule "z Medlova" disparut au XIV ème siècle, et c'est tout pour les débuts de notre château, dont on ne sait ni qui l'a payé, ni qui l'a fabriqué, ni quand (mais on sait où, et c'est déjà bien). Ah si, selon les fouilles et les archéologues, l'édifice se composait au tout début d'une tour dite "Barbara" (cf. Ste Barbara et sa tour), d'un palais, et d'un mur d'enceinte. Classique quoi, sans plus.
Ensuite grand silence. En fait les écrits ont sans doute disparu (cf. plus haut). On sait que dans la première moitié du XIV ème siècle, les "z Pernštejna" assistaient aux diètes, aux assemblées, et vivaient pour ainsi "normalement". Certains membres occupaient des fonctions prestigieuses au sein de l'église, et tous travaillaient en l'enrichissement de la famille. En 1375, le margrave de Moravie Jean-Henri décéda, et lutant pour la succession, ses fils "Jost" et "Prokop" divisèrent la région en 2 camps. Les pour l'un, et les pour l'autre. Les châteaux de la région se transformèrent en forteresses politiques comme en nids à pirates et bandits de grands chemins bataillant les uns contre les autres, et pillant tout ce qui passait à leur portée. Les "z Pernštejna" ne furent pas en reste, et la famille sombra dans la criminalité malhonnête. Pointons du doigt tout particulièrement "Vilém Ier" (apposé sur vélin entre 1360 et 1421), fils d'Emmeram, sieur au service du margrave mais brigand à son propre compte, qui étendit sa richesse opportunément comme iniquement profitant du foin général engendré par les guerres hussites. Sa troupe composée de chevaliers, de vassaux, mais également de mercenaires comme de brigands professionnels, pillait les marchands sur toutes les routes de la Moravie, assiégeait les châteaux de l'autre bord, puis se partageait le butin de ces sales rapines. Les convictions politiques de "Vilém Ier" tournaient au gré du vent, soutenant une fois l'un, une fois l'autre des 2 margraves, mais toujours savamment à son propre profit d'à lui avant tout. Il devint burgrave du castel de "Znojmo", puis préfet régional fin XIV ème siècle, intendant du tribunal de "Brno" (1408-1409), intendant du tribunal de "Olomouc" (1417), acteur et signataire de la charte de mécontentement après la carbonisation de "Jan Hus". Dernière mention du "Wilhelmo de Pernstein" est portée en 1421, pis ensuite, tout porte à croise qu'il décéda. Voilà.
Notre bougre eut plusieurs chevaux, femmes, maîtresses et amantes, qui lui donnèrent au moins 3 enfants. Parmi ses 3 fils, Jean fut le plus remarquable. Hussite de formation dès le sein maternel, défenseur des terres de Bohême contre les croisés, il devint un des plus importants piliers du hussisme et de la politique de "Jiří z Poděbrad" en Moravie. C'est durant la vie de Jean que fut détruit le couvent de "Doubravník", pourtant construit pas ses ancêtres, et c'est sans doute pour cette raison aussi que la famille "z Pernštejna" récupéra tout naturellement les propriétés ecclésiastiques. Et elle en récupéra bien d'autres par ailleurs, profitant de la guerre civile. Dans les pas de papa, Jean spoliait terres et domaines au clergé comme à la noblesse catholique, et n'avait même pas honte d'aller taquiner de la hallebarde les bastions des Habsbourg en Basse-Autriche. Sinon 'tention, des Jean de "Pernstein", il y en eut moult, et contrairement aux rois/empereurs, ils ne furent pas toujours numérotés. Celui dont je vous cause là, c'est le second Jean, de vers 1406–1475, "Oberstkämmerer des Landgerichts Brünn".
Son fils "Vilém II z Pernštejna" (nettement pus souvent numéroté que son père) fut le plus brillant membre de la famille à travers les âges. En ce début de renaissance, il fit fructifier les biens d'une façon exceptionnelle, au point qu'il laissa à sa descendance les domaines les plus riches de tout le royaume de Bohême. Certaines sources parlent de 3 fois la valeur des propriétés des "Rožmberk", considérés alors comme la plus riche famille du pays, parfois même devant le roi-empereur en personne. Adroit négociateur, seigneur oecuménique, facilitateur consensuel pourvu d'un sens moral particulièrement développé, "František Palacký" le considéra comme l'une des plus importantes figures de l'histoire du pays, et alla carrément jusqu'à le comparer à un bon roi Charles IV (pour vous dire). "Vilém" fut également celui, qui déménagea le nid douillet de la famille à "Pardubice", reléguant notre château au rang de "chaumière de campagne" (mais attention, entretenue propre quand même, genre pas délaissée à la ruine et aux poils d'araignées, la chaumière). Alors justement à "Pardubice", les traces des "z Pernštejna" sont nombreuses, à commencer par la place centrale qui ne s'appelle pas autrement que "Perštýnské náměstí". Ensuite vous trouverez des dalles (genre de plaques commémoratives) représentant la légende de "Věnava" ("Vojtěch") et de son aurochs, légende à l'origine de la famille "z Pernštejna" (cf. le récit plus loin). Une de ces dalles se trouve sur la maison numéro 77 à l'angle de la place susmentionnée (cf. mes photos). Une autre se trouve sur le portail d'entrée de l'église St Bartholomé, puis sur les châteaux de "Pernštejn", "Helfštejn", "Kunětická Hora" et bien entendu de "Pardubice" (cf. mes photos). Une dernière est à "Litomyšl" ("Smetanově náměstí 117"). Elle date du début du XVI ème siècle, et interpelle toujours les historiens sur son origine puisque les "z Pernštejna" ne reçurent la ville en gérance qu'en 1567. Bref. Sans réel intérêt artistique, elles sont néanmoins un fabuleux témoignage du passé, et représentent pour moi matière à collection photographique, comme boîtes de camembert pour d'autres. Ces plaques-ci datent d'entre 1480 et 1519, portent généralement mention en gothique tardif et en haut "Wylem z perussteyna nahelfenssteynie naywyssy hofmistr kralowstwije czeskeho leta bozie..." ("Vilém z Pernštejna a na Helfštýně" plus haut intendant du royaume de Bohême, année du seigneur...), puis en bas "Woytiech z perussteyna wede zubra" (Adalbert de "Pernštejn" promène son aurochs). Certaines sont encore accompagnées de 4 armoiries: "Jan z Pernštejna" (Jean numéro IV, l'initiateur de cette publicité familiale), de son épouse "Bohunka z Lomnice", de sa maman "Kateřina ze Šternberka", et de sa belle mère "Eliška z Vartemberka" (autant pour les 3 premières armoiries... que pour celle de la belle-doche... enfin bref).
Alors on ne va pas tous les faire, les "z Pernštejna", donc rapidement maintenant. Lors des successions, les biens furent partagés entre les successeurs (ah ouais?). Certains faisaient fructifier leur part, d'autres la dilapidèrent. "Vratislav" le magnifique (rien que ça) vivait grand train. Amateur d'art, il acquérait nombreuses peintures, et les dettes de la famille s'accumulaient. Il dut vendre ses domaines afin de payer les créances, et bien qu'il eut une vingtaine d'enfants d'avec sa femme espagnolarchicatho, seuls 2 garçons et 5 filles lui survécurent (lorsque "Vratislav" décéda, en 1582). Parenthèse. Le qualificatif de "magnifique" lui fut octroyé non pas pour sa beauté physique, mais pour son style de vie: renaissance et bohême, en Bohême ("Pardubice" n'est pas en Moravie). Il fit construire vers 1554 et 1560 le fameux palais (aujourd'hui Lobko) au château (de Prague), et son portrait trône encore dans une des salles. Aussi vous pouvez vous faire une idée de la magnificence du bougre, si vous le visitez, le palais Lobko. En fait, proche de l'empereur Max II (père du fameux Rudolf II), "Vratislav" (le naïf) lui prêtait du pognon en pure perte (tiens, va réclamer à l'empereur le pognon qu'il te doit?), et apparemment il ne s'agissait pas de 3 pièces 4 sous. Il fut cependant le premier seigneur de Bohême à être gratifié de l'ordre de la toison d'or, mais cette distinction n'est aucunement liée au grisbi qu'il allongeait à Max II (en pure perte). Parenthèse toujours. Selon mes sources, madame l'épouse de "Vratislav", dona Maria Manrique de Lara, offrit 21 gnards à son mari (mais que des filles ou des garçons). Elle n'eut jamais de jumeaux, pondit parfois 2 gosses dans l'année, et fut victime de plusieurs fausses couches d'avant terme. J'te dis pas la santé de madame. Comme qui dirait, la soupe n'avait pas le temps de refroidir. Ben malgré cette activité sportive de haut niveau, dona Maria décéda à l'âge qu'à Monique, soit 76 ans. Signalons aussi parmi les 5 filles, la fameuse Polyxène (née "z Pernštejna"), successivement femme de "Vilém z Rožmberka" puis de "Zdeňek z Lobkovic", inventrice du fameux petit Jésus de Prague (cadeau de sa maman) et soignante des 2 défenestrés de 1618. Je vous ai trouvé un portrait de Polyxène (cf. mes photos). Il s'agit d'une copie de 1850 commandée pour le château de "Rožmberk" à l'occasion de la création du musée (dans le château), copie selon un original de "Alfonso Sanchez Coello", aujourd'hui propriété des Lobko, et visible au château de "Nelahozeves", bled natal de "Antonín Leopold Dvořák". Mais retour à l'histoire. Les 2 garçons et les 5 filles encore vivants après le décès de "Vratislav" et de dona Maria reçurent donc plus de dettes que d'héritage. Parmi les garçons, le cadet se mit au service de l'église, l'ainé au service de l'armée.
Une fois vendu (en 1596 donc), le château de "Pernštejn" passa plusieurs fois de mains en mains. Pendant la guerre de 30 ans, en 1645, il fut vainement assiégé par les Suédois lors de la campagne de "Brno" (il y laissa un bout cependant, cf. plus loin). In fine, il devint la propriété des "Mitrovský z Nemyšle" en 1818, et ce jusqu'en 1945, lorsque leurs biens furent confisqués sur la base des décrets Beneš (la famille s'étant bêtement déclarée de nationalité allemande avant guerre). Depuis, le château est propriété de l'état. Et voilà, et donc passons à la description du castel.
Alors l'apparence du castel telle que vous la voyez là, date globalement de la première moitié du XVI ème siècle, lorsque le château fut enfin terminé complet. Les divers propriétaires suivants soit n'avaient pas de pognons pour en changer le style, soit ne vivaient pas céans. Du coup le style, ils s'en battaient le cristallin comme de Colin-tampon. Aussi l'apparence gothico-renaissance n'a pratiquement pas changé depuis presque 400 ans. D'un point de vue géographique, l'édifice est au sommet d'un roc, protégé de 3 points cardinaux par des falaises abruptes. Le seul accès possible est par le Nord-Ouest, et même là, le chemin qui y mène grimpe suffisamment afin d'être facilement défendable en cas d'attaque. Et pour parfaire cette invulnérabilité, l'eau ruisselle le long des falaises à l'intérieur du château de façon inépuisable dans un puits. Au tout début, le château fort se composait d'une tour (genre bergfried) nommée Barbara, d'un palais, et des remparts qui vont bien. En dehors de la tour, ces éléments originels furent entièrement construits par dessus par les diverses mises à jour, et ne sont donc guère plus trop visibles.
Entre le XV ème et le XVI ème siècle, le château connu sont plus grand essor, non seulement comme quartier général d'une des plus riches familles moraves (sinon du royaume), mais également comme bastion incontournable pour toute prise de la ville de "Brno" comme de la Moravie. C'est ainsi que naquirent tout autour du pic rocheux des remparts plus amples, avec des poivrières de protection aux angles (tours d'angle permettant de tirer sur l'ennemi de tout côté). Des tranchées furent creusées tout autour itou. Des barbacanes pleines de meurtrières furent construites au Nord afin de protéger l'unique entrée. Et naquit également la fameuse tour carrée typique pour notre castel, reliée originellement au palais par 2 ponts en bois. Elle devait servir comme repli et protection ultime en cas de prise par l'ennemi du reste du château. Bien entendu, les appartements n'étaient pas en reste de construction, et s'agrandissaient au fur et mesure de l'emménagement dans l'enceinte du castel de la nombreuse famille du seigneur, mais également de la suite de madame, comme de tout le personnel nécessaire au bon fonctionnement du confort comme de la protection de tous. Sauf qu'au bout d'un moment, la place dans la cour vint à manquer, aussi les bâtisses furent agrandies en hauteur. Mieux, en certains endroits, l'on ne pouvait ni pousser les murs sur les côtés, ni les monter en hauteur, alors l'on posa au sol des poutres en porte-à-faux, sur lesquelles l'on construisit des encorbellements. C'est ainsi que la surface au sol des étages en hauteur est supérieure à celle des étages au rez-de-chaussée. Et quand je dis étage... C'est justement une autre caractéristique de notre édifice, il n'y a pas d'étage. Ou plutôt il y a tellement d'étages dans tous les sens, qu'on sent bien que l'urbanisation, l'architecture, fut chaotique et improvisée au fil des siècles. Les accès aux diverses pièces furent volontairement étroits, percés en colimaçon de façon à ce que les potentiels envahisseurs aient toutes les difficultés du monde à pénétrer, et surtout un par un, et non en grand nombre. Au XVI ème siècle l'édifice prit une légère teinte renaissance. Les appartements devinrent plus confortables, mais à peine beaucoup plus. Notez surtout que les diverses confortabilisations des appartements concernaient principalement les intérieurs, car les extérieurs sont restés majoritairement gothiques (donc moins onéreux à la dépense). Zieutez par exemple la salle des chevaliers, décorée plus tard en pur baroque par le milanais "Giacomo Antonio Corbellini" (1674-1742), dont les stucatures en trompe l'oeil ne sont pas sans rappeler le grand Bernini (pour ceux qui sont allés à Rome). Bien que considéré comme sans grande valeur ajoutée pour le monde des arts, "Giacomo Antonio Corbellini" n'en a pas moins décoré des édifices prestigieux, comme par exemple le fameux monastère de "Osek", sur lequel je ne vous ferai aucune publie tant que les cisterciens obstinés y interdiront la prise de photo. L'on fonda même une bibliothèque à "Pernštejn" qui compte encore aujourd'hui quelques 13.000 ouvrages. Ceci-dit, je ne me souviens pas d'être passé dans la bibliothèque, lors de la visite, aussi considérez cette information comme potentiellement erronée. Dans le courant du XIX ème siècle, les "Mitrovský z Nemyšle" emmagasinèrent là nombreux ouvrages des bibliothèques des monastères désacralisés fin XVIII ème par Josef II, et certaines sources mentionnent par exemple 1 incunable, 36 manuscrits, des gravures à l'eau-forte, des esquisses, des photographies (et oui) et nombreux autres ouvrages exotiques. Mais est-ce que ces précieuseries se trouvent encore céans? J'en doute. En 1645, lorsque les Suédois (fumiers) essayèrent vainement de prendre d'assaut notre château, ils endommagèrent le haut de la tour carrée. Aussi aujourd'hui, cette tour est plus courte, et seul un pont la relie au palais. Mais ayant démontré son invulnérabilité, le château fort de "Pernštejn" fut inscrit sur la liste des édifices militaires d'utilité indispensable, et fut ainsi constamment entretenu pour la sécurité du pays.
Parmi les curiosités, vous pourrez voir sur les murs du château nombreux graffitis récemment découverts sous les crépis, et remontant majoritairement vers la mi-XVI ème siècle. Ils sont écrits en Tchèque, en Allemand, et en Latin. Leur teneur est biblique, d'auteur antique, horoscopique, en souvenir de, mais également parfois obscène (selon la guide devenue toute rouge). Pour l'instant ils n'ont subi aucune expertise ni recensement systématique.
Autre curiosité. La splendide chapelle baroque de la conversion de St Paul ("St Paul's coming out" en Anglais). Elle se trouve en dehors du coeur du château, et fut construite début du XVIII ème siècle en remplacement de l'ancienne chapelle, dont on ne sait toujours pas aujourd'hui où elle se situait. Alors pareil, normalement on ne photographie pas dedans, mais hein, y avait personne, alors "eat my pants" comme dirait mon pote John. L'accès dans l'église n'est possible que sur le pas-de-porte, parce que dedans, on n'entre pas (on se sent le bienvenu non?), aussi les photos sont comme elles sont, sorry. Les splendides fresques en trompe l'oeil sont l'oeuvre du peintre local "František Řehoř Ignác Eckstein" (1689-1741), peintre peu connu et cependant prolixe, particulièrement en sa Moravie natale. Il s'agit d'une oeuvre de jeunesse, de sa toute première oeuvre en Moravie, et représente principalement les 9 choeurs (trônes) angéliques (cf. la hiérarchie des anges, "De Coelesti Hierarchia" de "Denys l'aérophagique") dans la nef, et la "cupola finta" (la coupole fictive) dans le choeur (de l'église). Alors attention, et ce n'est pas n'importe quoi ces peintures: il s'agit d'une des toutes premières peintures murales utilisant le procédé de l'architecture en trompe l'oeil sur un espace plat selon une perspective mono focale (un seul point de fuite), en Moravie, pour l'une des toutes premières fois. Une fois de plus, l'on retrouve ici l'influence du maître du genre: "Andrea Pozzo", et la coupole du maître en l'église St Tignasse de l'aïoli à Rome servit de modèle pour la modeste coupole de notre chapelle. Une évidente maîtrise de la technique pozzolienne alliée à une originalité toute personnelle font de cette coupole fictive de la chapelle baroque de "Pernštejn" un joyau que vous n'aurez malheureusement pas le plaisir d'apprécier à sa juste valeur: pour jouir pleinement des lignes de fuite de Francois Grégoire Ignace, il faut se trouver juste en dessous de la fresque-coupole, dans le choeur, qui est inaccessible. Signalons que l'intérêt pour cet artiste est relativement récent, puisqu'il remonte au milieu du XX ème siècle, lorsqu'on réussit à déchiffrer sa signature en relativement mauvais état, justement en la chapelle de "Pernštejn", sur le mur droit, au niveau des bancs, et qui dit "Ich Franz Ignaz Egstein habe dise Bilder, in Freschco aufgemalt. Anno 1716". Si vous souhaitez en savoir plus, il est un remarquable travail de "Helena Lukešová" sur ces fresques en cette chapelle, malheureusement en Tchèque uniquement.
Et paf, tiens, un castel pareil ne peut pas manquer de légendes, historiettes, et racontages en tout genre me direz-vous. Et tiens, paf, ben z'allez-voir qu'il n'en manque vraiment pas vous répondrai-je. Commençons tout d'abord par le blason de la famille "z Pernštejna", qui se trouve taillé dans le marbre au-dessus de l'entrée du castel, à partir de là qu'il est interdit de photographier. Ce blason représente un aurochs avec un anneau dans le mufle. L'histoire fut écrite vers 1593 par le diplomate, politicien, chroniqueur et généalogiste d'origine plonaise "Bartoloměj Paprocký z Glogol a Paprocké Vůle": "C'estoit au temps jadis, qu'il estoit robuste gentilhomme qui s'appeloit...". Et donc le bougre "Věňava" était charbonnier de métier. Mais attention, charbonnier, pas bougna-livreur-négociant, ni Lantier zolaïen, mais fabricateur de charbon de bois, pour les barbecues, genre. Il vivait sur un mont, en une forêt morave, où qu'il avait sa demeure dans laquelle se trouvaient provisions en cas de disette. Et lorsqu'il quittait sa demeure pour se rendre à la mine, un aurochs venait tranquillement lui boustifailler ses provisions, la sale bête. Lorsque "Věňava" découvrit l'affaire, il décida qu'il fallait en finir avec cette vermine. Par un beau dimanche, alors que notre charbonnier faignantait au jardin en ce jour du seigneur, se demandant comment se débarrasser de l'importun, il entendit du raffut en sa cahute, et vit le bestiau s'empiffrer à l'oeil, son groin dans la croustille. "N'di diou!" se dit notre bougre en attrapant un rameau d'osier qui trainait là par hasard, au bon moment, juste sous la main. Sautant sur l'aurochs, il l'agrippa par les cornes, lui passa l'osier dans le blaire, et tricota une hart par laquelle il tira le monstre hors de sa demeure. Il tira d'ailleurs si bien, qu'il se retrouva soudainement avec l'animal à "Brno", en plein bon moment où le roi (mais l'histoire ne dit pas lequel, ni s'il ne s'agissait pas plutôt d'un seigneur, d'un bourgmestre, du maire...) se promenait en ville, un clope au bec une couronne sur la tête. "Holà donc ci-voilà, qu'est-ce que donc que c'est quoi que je vois? N'estoit point présent pour moi?" Dit le roy, tout en s'estonnant de la force avec laquelle le pedzouille tirait l'mammifère qui fumait du museau. Et avant même que "Věňava" ne puisse dire quoi que ce soit, le roi lui dit: "ben c'est vachement cool mon gaillard, sans dec, merci. Un bel aurochs comme ça dis-donc, c'est ma femme qui va être contente, sans dec. Allez, demande-moi ce que tu veux, n'ai pas honte, dis-y voir c'qui t'ferait plaisir, genre"? "Věňava" réfléchit. Une poêle en fonte avec une queue antidérapante? Un nouveau caoutchouc étanche pour sa cocotte minute? Une poignée de chasse d'eau qui fait pouêt-pouêt quand on tire dessus? Pis finalement il répondit: "j'veux vivre peinard sur ma parcelle jusqu'à la fin de ma vie, et j'veux aussi qu'on me foute la paix avec la dette de la Grèce". Et le roi, de lui faire cadeau de la parcelle de terre sur laquelle vivait notre charbonnier. Alors ce dernier, pour lui montrer une fois de plus sa grande force, dégaina sa hachette qui lui pendait à la taille, et d'une main d'une seule, trancha la tête de l'aurochs avant de rajouter: "et pour des tranches plus fines, genre carpaccio, faudrait mettre la carcasse au congélo pour quelques heures". Subjugué (y a vraiment de quoi), le roi l'anoblit et lui attribua la tête de l'aurochs avec son anneau dans le blair comme emblème familial. Pis "Věňava" eut un fils, "Prštena", qui construisit sur l'emplacement de la chahute paternelle un fortin en bois, qu'il baptisa de son nom, "Prštanem", et qui devint au fil des temps "Pernštejn". Ah oui, alors ici c'est "Věňava", sur les dalles (plaques) familiales c'est "Vojtech", mais c'est tout pareil. En fait, comme Bart "Paprocký" était Polac d'origine, "Vojtech" ça lui parlait nettement moins que "Wieniawa". Voilà pourquoi.
Allez, une autre histoire. Au Sud de la barbacane se trouve un if (et de l'autre côté, au Nord, un endif. Humour d'ingénieur informaticien :-) L'if serait millénaire selon certaines sources, septacentenaire selon d'autres. Quoi qu'il en soit, il est vieux, tellement vieux que la légende raconte qu'un jour, un routard pèlerin vieux aussi, passant dans le coin, vit comment un architecte construisait sur le pic rocheux ce qui allait devenir notre castel. L'ancêtre lui dit alors comme ça: "ben sacré nom de d'là, moi j'dis que ma vieille canne reverdira avant qu'il ne pousse un château céans" (phrase reprise par mon pote John dans la version "two monkeys up my ass before..."). Et il planta son vieux bout de bois dans le sol. Ben non seulement le château fut construit, mais la canne du vieux devint l'if visible encore aujourd'hui sur le chemin qui mène au bled de "Nedvědice". L'on raconte que le destin du château est lié à cet arbre, et lorsqu'icelui mourra, "Pernštejn" s'écroulera. Maintenant, il est vrai qu'en début avril 2005, une branche se cassa (des témoins?), et le 15 avril, la grange prit feu occasionnant des dégâts considérables (pas tant au château, qu'aux oeuvres stockées dans la grange). Et tiens, à propos d'incrédule, ça me rappelle le scrutateur du pilier des anges dans la cathédrale Notre Dame de Strasbourg. Vous connaissez?
Z'en voulez encore? Ca tombe bien, j'ai du rab dans ma besace. Il était une fois un splendide brin de belle fille nommée Elise ("Eliška"). Et l'Elise, elle faisait camérière (femme de chambre) comme métier au château (alors je vais vous éviter la lourde blague sur DSK, je pense qu'on en a entendu assez sur ce pauv' boug'). Elle était splendide la guêpe, et elle le savait, aussi elle entretenait longuement ses longs cheveux d'ange, devant son miroir, la brosse à la main, afin de plaire aux nombreux prétendants (elle se rasait sous les bras aussi, mais je ne vais pas tout vous raconter non plus, de ce qu'elle faisait pour être belle). Sauf que ça déplaisait au curé du château, surtout lorsque la narcissique donzelle manquait à la messe (tu parles que le curé s'en rendait vite compte, de l'absence d'Elise, quand du haut de sa chaire il ne pouvait plonger son regard lubrique dans le profond décolleté). Aussi un jour qu'il décida que ça devait suffire. Il déboula dans la chambre de la pauvrette, sans frapper à la porte, un crucifix à la main (version officielle, dieu seul sait ce qu'il tenait à la main en déboulant dans la chambre de la jeunette), et lorsqu'il la trouva en face de son miroir se peignant les cheveux, il chopa les abeilles en pétard et écumant la bave aux lèvres, il l'admonesta sur son attitude, comme quoi la messe c'était 'achement plus important que des cheveux peignés, etc... La lolita se tourna alors lentement vers lui, fit un sourire, et de sa douce voix sucrée l'envoya à Chaillot la pelle au cul. Le ratichon explosa, grimpa à l'échelle, et sacrant tous les tonnerres du ciel, il maudit la petite pour son arrogance. Soudain la terre s'ouvrit dans un vacarme terrible, et engloutit la pauv' chérie, la brosse à ch'veux (mon n'veu) avec. Depuis, l'âme de la coquette rode dans le château comme une dame blanche en peine. Mais attention, le miroir d'Elise est toujours dans la chambre sur le parcours de la visite, et la légende raconte que quiconque se regarderait dedans (le miroir), perdrait sa beauté en 1 an et 1 jour. Ah oui, et selon certaines sources, ce sortilège ne s'appliquerait qu'à la gente féminine, parce que comme tout le monde sait, seul la femme est belle (alors que l'homme pue). Bon, et celles qui n'auraient pas fait gaffe malgré mes recommandations, et qui auraient zieuté malencontreusement dans le miroir (la femme est belle mais curieuse), ben icelles peuvent m'écrire, car je connais un château où se trouve un miroir à l'effet inverse (rétribution à convenir en fonction de la quantité de rembellissement à rendre). Sinon vous verrez toujours dans la chambre d'Elise un tableau fin XIX ème siècle portraiturant cette légende. Le peintre en est inconnu.
Bon, ben voilà. Alors je le répète, c'est un splendide château à voir, et un château majeur de notre pays que vous trouverez ici: 49°27'3.185"N, 16°19'6.470"E