Nicolas Sarkozy, homme d’action et de résultats immédiats, entretient des rapports assez particuliers avec l’Histoire et la mémoire.
Un jour, la lettre de Guy Môquet (sans qu’elle soit replacée dans son contexte historique), un autre, la mémoire d’un enfant de la Shoah. Et puis demain, une victime du Darfour ? ou de la colonisation ? Ah non, pas de la colonisation, n’oublions pas qu’elle a eu un rôle positif.
Pourquoi une telle lecture de l’Histoire, sous l’angle de la victimisation et de l’émotion ? Enseigner le sens de l’Histoire, n’est ce pas plutôt expliquer l’enchaînement des causes et des conséquences, prendre du recul et resituer dans un contexte, bref, proposer une lecture pédagogique et dépassionnée ? Parce que s’il faut faire appel à l’émotion pour éviter que l’on reproduise les erreurs du passé, que reste-t-il quand l’émotion s’estompe ? Faut-il se servir du souvenir d’autres victimes pour maintenir l’attention ?
Mais, finalement, Nicolas Sarkozy s’intéresse-t-il vraiment à la réalité historique ? Elle semble surtout être pour lui un fonds de commerce qu’il utilise au gré des besoins :
- S’inscrire dans la lignée de grandes figures historiques (Jaurès, Blum, De Gaulle, Jeanne d’Arc…) pour se construire une stature d’homme d’Etat ;
- Glorifier le passé national (nous n’avons pas à rougir de notre passé, non à la repentance, etc.) pour fédérer un peuple autour de valeurs communes et, accessoirement, ratisser sur les terres lepénistes ;
- Réécrire le passé, en s’appropriant l’esprit du Front Populaire, et en stigmatisant de manière absurde et anachronique l’ « esprit de 1968 » (qui serait la cause de tous les maux actuels de notre société).
Comme pour nous cacher l’essentiel, à savoir que Sarkozy a récupéré tous les thèmes de Napoléon III : mythe du sauveur, de l’homme fort, du vainqueur, idéologie de la famille, du travail et de la patrie. Mais cette référence au bonapartisme, évidemment plus difficile à assumer, reste un non-dit. Jusqu’à quand ?
Fred