Après le sommet extraordinaire des chefs d'État et de gouvernement de la zone euro, d'aucuns ont crû que la crise grecque était résolue. Non seulement je m'inscrivais en faux avec cet optimisme dans ce billet, mais de plus j'affirmais que ce énième plan de sauvetage ne préviendrait absolument pas un risque de contagion à d'autres États membres comme l'Espagne ou l'Italie. En effet, sauver la Grèce qui pèse moins de 3 % du PIB de la zone euro n'est rien à côté de l'Espagne ou de l'Italie...
La confirmation de mes craintes est venue tout d'abord des marchés eux-mêmes. Les taux des obligations d'État espagnoles et italiennes à 10 ans n'ont depuis cessé de grimper pour atteindre 6,36 % pour l'Espagne et 6,18 % pour l'Italie en début de semaine (14,85 % pour la Grèce), tandis que le Bund allemand rapportait 2,39 %. En bref, des taux historiquement hauts pour les uns et historiquement bas pour les autres (dont la France).
Il est vrai que les palabres entre Républicains et Démocrates aux États-Unis sur le relèvement du plafond de la dette ont certainement ajouté à la confusion générale, tout en prouvant que moins un parti a de choses sérieuses à proposer plus il peut espérer recueillir l'assentiment des foules... et ceux même si les propositions vont à l'encontre des intérêt de la majorité des Américains ! C'est ce que rappelle fort à propos Henri Sterdyniak dans une interview au quotidien Le Monde : "au final, ce sont les plus pauvres qui vont supporter l'ajustement, alors même que l'une des causes de la crise aux Etats-Unis, c'est la trop faible consommation, ou plutôt la trop forte consommation à crédit".
Mais pour en revenir à l'accord trouvé entre les chefs d'État et de gouvernement de la zone euro, personne n'est dupe que celui-ci fut obtenu à l'arraché le 21 juillet et qu'il n'est au mieux qu'une rustine pour tenter de sauver un bateau qui sombre. Au surplus, les mesures qui furent décidées à l'issu de ce sommet doivent encore passer par le filtre politique pour obtenir l'approbation du Parlement en France, ce qui rend l'accord très incertain encore aux yeux des investisseurs.
L'OCDE, dans sa dernière étude sur la Grèce, semble au reste partager mon pessimisme (réalisme ?) puisqu'elle évoque plusieurs scénarios basés sur l'application plus ou moins rigoureuse du traitement suicidaire que lui a prescrit la Troïka. Sa conclusion est que le rétablissement de la Grèce est possible à condition de "mettre un terme au gaspillage des ressources publiques, s'attaquer résolument à la fraude fiscale, améliorer les services publics et rétablir la confiance des citoyens grecs envers leur gouvernement, renforcer l'emploi des jeunes, des femmes et des seniors...". Assurément la Grèce va s'en sortir...
Pourtant, on ne répètera jamais assez que le problème de la zone euro est loin de se résumer à un endettement excessif, l'Italie ayant intégré la zone avec un taux d'endettement proche de 100 % du PIB (120 % actuellement) et l'Espagne ayant longtemps été vue comme un bon élève (taux d'endettement de 55 % du PIB en 2010 contre près de 64 % aujourd'hui). Faut-il également rappeler que la France et l'Allemagne ont allègrement dépassé les 80 % ? Le vrai problème est lié à des déséquilibres commerciaux et à un défaut d'intégration politique, économique et sociale des États membres de la zone euro. Mais les dirigeants politiques, obnubilés par des questions picrocholines, continuent de soigner un problème d'illiquidité en lieu et place d'une insolvabilité.
Pour finir, on m'a envoyé ce court extrait de l'émission de Canal +, les guignols de l'info. Les célèbres marionnettes donnent leur vision de la crise en Espagne et
des solutions a apporter... Drôle et effrayant !