Exemple de cours de CDS (Dexia en 2011)
NdT : CDS (Credit Default Swap) signifie couvertures de défaillance.
Un aspect intéressant du second accord du sauvetage grec est qu’il pourrait en fait avoir tué le marché du CDS, ou au moins marqué le coup d’envoi de sa disparition. La raison en est simple: l’affaire ébranle la confiance dans la croyance selon laquelle le CDS peut fonctionner comme une forme d’assurance contre le défaut.
Commençons par un récapitulatif rapide: un CDS sur la dette souveraine est essentiellement une forme d’assurance, selon laquelle l’acheteur verse une prime régulièrement et qui est payé en contrepartie si le pays fait défaut sur sa dette. À ce titre, le CDS est utilisé comme une couverture contre l’exposition à la dette souveraine ainsi que contre les prêts dans les économies instables / risquées.
Fitch et Moody’s ont déjà déclaré qu’ils considéraient la participation du secteur privé dans le second sauvetage comme étant un défaut parce que les obligataires prendront part à un échange d’obligations ou un rollover, qui se traduira par le fait qu’ils recevront moins d’argent que promis en vertu de leur contrat d’origine. Assez simple et probablement la bonne décision.
Alors, pourquoi ce ne sont pas les émetteurs de CDS qui paient ? L’événement de crédit ou le défaut qui déclencherait la couverture des CDS est déterminé par l’International Swaps and Derivatives Association (ISDA), qui a annoncé qu’elle ne juge pas la Grèce être en état de défaut. Ceci parce que les échanges d’obligations ou les rollovers sont entièrement volontaires. Si les CDS étaient déclenchés, vous pourriez obtenir une situation où les gens qui n’ont pas pris part à l’échange ou au rollover seraient encore payés sur leurs CDS et donc récolteraient leurs pleines récompenses à la fois des obligations grecques qu’ils détiennent et de l’assurance sur celles-ci – une situation perverse, non? Donc, clairement, cela semble être la bonne décision.
Puisque vous avez une situation où l’assurance sur la dette souveraine grecque est de plus en plus chère et devient pourtant dans les faits inutile, l’ensemble du marché des CDS est miné, éventuellement de façon irréversible. Nous allons passer sous silence la question de savoir si ce fut intentionnel ou non pour le moment — sans doute y a-t-il beaucoup de fonctionnaires de l’UE qui souhaitent sanctionner le marché des CDS pour ce qu’ils considèrent être de la spéculation nuisible dans la crise financière et la zone euro, comme nous l’avons souligné avec nos commentaires (ici et là) sur la nouvelle réglementation des ventes à découvert. En tout cas, cela devrait montrer que la complexité du sauvetage de la zone euro peut conduire à des effets secondaires importants et potentiellement dangereux.
Il ne faut pas se leurrer, les CDS peuvent être utilisés comme un outil spéculatif. Cependant, ils peuvent jouer aussi, de nos jours, un rôle important dans le marché des liquidités. Réduire l’utilisation des CDS accroitrait la difficulté de couverture contre le risque et rendrait les investisseurs moins enclins à acheter la dette souveraine des pays en difficulté dans la zone euro (comme l’Espagne et l’Italie), ce qui pourrait finalement augmenter les coûts d’emprunt pour les économies de nombreux pays européens (en raison de la prime de risque plus élevée). Le secteur privé dans ces pays pourrait également être en difficulté pour obtenir prêts et financements depuis que les CDS sont régulièrement utilisés pour se prémunir contre le risque de ces types de prêts. Donc, en somme, nous pourrions voir des coûts d’emprunt plus élevés et une moindre croissance économique comme conséquence d’un marché des CDS affaibli, ce qui n’est clairement pas un effet souhaitable étant donnée la crise actuelle.
Même si nous sommes sûrs qu’il y aura quelques fonctionnaires de l’UE avec un sourire narquois sur le visage après la disparition potentielle du marché des CDS, intentionnellement ou non, les CDS pourraient encore revenir les hanter.