L’Europe est un patchwork d’égoïsmes nationaux que les atermoiements des gouvernements européens au sujet de la dette grecque mettent magistralement en lumière, paticulièrement l’attitude de la Chancelière allemande, toujours en retrait devant toute avancée vers une meilleure coordination des économies européennes. La dette grecque, qui semble un problème insurmontable, n’en serait pas un si l’Europe était fédérale. Dans un tel système, en effet, l’Europe fédérale apparaîtrait alors comme ayant l’état financier le plus sain du monde. Malheureusement, cela restera une utopie pour très longtemps encore. Et ceci, pour une raison majeure. En effet, deux modèles économiques très différents coexistent en Europe. L’un basé sur croissance tirée par les exportations, l’autre par la consommation intérieure. Le premier modèle regroupe, entre autres, l’Allemagne, l’Autriche et le Benelux. L’autre regroupe, principalement, la France, l’Espagne et l’Italie. Deux remarques s’imposent immédiatement. La première est que la spéculation internationale s’attaque à ce dernier groupe dont le modèle économique lui semble logiquement le plus fragile. La seconde est qu’une croissance basée principalement sur la consommation permet aux politiques et aux syndicats de tenir un discours électoraliste, basé sur l’augmentation des salaires et des revenus afin de soutenir cette consommation, au risque de relancer l’inflation. Mais la consommation pousse à la hausse les importations (les produits des pays émergents sont les moins chers) et donc au déficit de la balance des paiements et donc, à terme, à l’augmentation de la dette. Pour résorber leur dette, ces pays n’ont que deux moyens : réduire les dépenses (c’est-à-dire mettre en place des plans d’austérité qui obèrent l’avenir et exacerbent les mécontentements) et/ou relancer leurs exportations insuffisantes pour rééquilibrer leur balance des paiements. Un Euro trop fort (par rapport au dollar) est alors un handicap alors que ce n’en est pas un pour l’Allemagne qui exporte principalement en Europe et dont la qualité reconnue des produits supporte ce handicap. La voie est donc étroite si les responsables politiques ont vraiment la volonté de trouver une solution qui mette fin à la spéculation prédatrice internationale. Et cette voie passe nécessairement par un minimum de solidarité européenne, c’est-à-dire finalement par le « rachat » de la dette des pays excessivement endettés par les autres et, au premier rang, par l’Allemagne. L’Europe court alors le risque de voir les contribuables allemands refuser de payer pour ceux qu’ils considèrent comme des irresponsables et, en fin de compte sortir de la zone Euro, entraînant avec elle l’Autriche et le Benelux. On verrait alors se créer deux zones économiques avec deux euros différents et, au bout du compte, la fin de l’Europe. La situation est difficile, mais, rassurez-vous, le pire est à venir !