The Tree of Life
Résumé: Une tranche de vie dans l’histoire d’une famille des années 50, alors que l’aîné de la famille entre tout juste dans l’adolescence.
Cinéaste rare s’il en est, Terence Malick crée l’événement à chaque annonce d’un nouveau projet, l’homme ayant l’habitude de ne réaliser que des chefs d’œuvre. Avec The Tree of Life, sa légendaire méticulosité a été une fois de plus source de nombreux retards, puisque le film a fini par sortir plus d’un an après la date prévue. L’attente en valait-elle une fois de plus la peine ?
The Tree of Life est définitivement un film qui fera date dans la carrière de Malick, mais pas forcément de la façon prévue, puisqu’il s’agit du premier long métrage du réalisateur à diviser même ses plus fervents admirateurs. La faute notamment à un passage onirique déboulant sans prévenir au bout de vingt minutes de film. Une succession de scènes esthétisantes remontant jusqu’à la création de la vie, en passant par un long passage au temps des dinosaures, et qui déstabilisera plus d’un spectateur (dont votre serviteur qui avoue honteusement s’être endormi à ce moment). A vrai dire, ce qui choque le plus dans ces quelques minutes « autres », ce n’est pas tant leur difficile interprétation pour le spectateur moyen que la laideur de certaines séquences. En effet, alors que Malick est reconnu même par ses détracteurs comme un esthète de la pellicule capable d’emballer des images d’une beauté sans pareille, difficile de lui pardonner de nous montrer des dinosaures semblant tout droit sortir d’un documentaire au rabais de la BBC…
Une fois ces quelques minutes passées et digérées, le film prend heureusement enfin son envol en capturant des instants fugaces de la vie de la famille O’Brien. Malgré une voix off parfois un peu trop envahissante, difficile de ne pas se laisser gagner par l’émotion de ces scènes a priori banales mais capturant comme jamais les tourments de la préadolescence. C’est là que tout le génie de Malick resurgit, dans sa façon sans pareille de faire passer tout un monde d’émotion par des regards, d’arriver à nous faire pénétrer dans la vie de cette famille en nous montrant seulement des fragments épars de leur quotidien. Plus encore, il se place tout du long à la hauteur des enfants qu’il suit, et plus particulièrement du fils ainé, Jack, dont il scrute minutieusement la perte d’innocence. La tyrannie d’un père tentant maladroitement d’inculquer des valeurs à ses fils (Brad Pitt, impérial comme à son habitude), la brutalité d’un aîné utilisant son ascendant sur son petit frère, la vision éthérée d’une mère tellement parfaite et aimante qu’elle en devient irréelle (la magnifique Jessica Chastain), tous ces éléments à la fois épars et cohérents permettent au cinéaste de dresser un portrait juste de la psychologie d’un enfant aux portes de l’adolescence.
Et si The Tree of Life n’atteint peut-être pas la perfection des œuvres précédentes de Malick, il n’en demeure pas moins un film précieux qui saura certainement toucher au cœur les spectateurs ayant gardé une part de leur âme d’enfant.
Note : 7.5/10
USA, 2011
Réalisation : Terence Malick
Scénario : Terrence Malick
Avec: Brad Pitt, Jessica Chastain, Sean Penn, Hunter McCracken
Blood Island (Bedevilled)
Résumé: Jeune femme célibataire et farouchement individualiste, Hae-Won est sommée de prendre des vacances suite à un esclandre à son boulot. Profitant de ce repos forcé, elle se rend sur une île proche du continent sur laquelle elle a passé toutes ses vacances lorsqu’elle était enfant. Elle retrouve son amie d’enfance Bok-nam, qui n’a jamais quitté l’île. Mais Hae-Won ne tarde pas à s’apercevoir que Bok-nam est très loin d’avoir une vie de rêve auprès des insulaires…
Grand Prix du dernier festival de Gerardmer, Bedevilled a fini par sortir en France, malheureusement directement en DVD, et honteusement retitré Blood Island pour attirer le fan de gore basique. Un public qui risque de ne pas être très réceptif au film, tant celui-ci est loin du slasher bourrin qu’annoncent son titre et sa jaquette.
Débutant de la même façon que le Jusqu’en Enfer de Sam Raimi (l’héroïne, qui bosse dans une banque, humilie une vieille femme venue demander un prêt), le film bifurque assez rapidement vers une ambiance pesante, à la fois d’un réalisme cru (la description d’une petite communauté renfermée sur elle-même) et d’une inquiétante étrangeté (la façon dont tous les habitants de l’île semblent accepter le sort réservé à Bok-nam), lorsque Hae-Won arrive sur l’île de son enfance. Le film devient alors un drame social d’une grande noirceur, dans lequel la cruauté la plus abjecte semble banale. On saura d’ailleurs gré au réalisateur de ne pas tomber dans le piège du torture porn voyeur, mais de garder le film tout à fait crédible dans les sévices et humiliations infligés à la pauvre Bok-nam. Plus surprenant encore, le réalisateur Chul-soo Jang et son scénariste Kwang-young Choi se permettent à mi-parcours de changer de point de vue, faisant de Bok-nam le personnage principal, aux dépends d’une Hae-won passive et tellement obsédé par sa petite personne qu’elle refuse d’intervenir pour aider son ami. Une transition qui se fait pourtant sans heurt et permet au réalisateur de coller au plus près à son personnage tout en impliquant d’autant plus le spectateur dans le drame qui se noue sous ses yeux. Une façon pour le réalisateur d’ausculter la société moderne en s’interrogeant sur l’individualisme forcené de ses contemporains. Le film, plutôt lent et calme jusque-là, escaladera petit à petit, pour culminer dans un dernier acte sous forme de slasher brutal. Un revirement une fois de plus étonnant mais amené avec suffisamment de maîtrise pour qu’il n’en devienne pas incongru.
Se terminant sur un final à la fois cathartique et d’une infinie tendresse, Blood Island finit d’entériner Chul-soo Jang comme un nouveau réalisateur coréen à suivre de très près.
Note : 8/10
Corée du Sud, 2010
Réalisation : Chul-soo Jang
Scénario : Kwang-young Choi
Avec: Yeong-hie Seo, Seong-won Ji, Min-ho Hwang
Harry Potter et les Reliques de la Mort – 2e Partie (Harry Potter and the Deathly Hallows Part 2)
Résumé: Alors qu’Harry et ses amis viennent de subir une cruelle défaite et de perdre un être très cher, Voldemort a mis la main sur la légendaire baguette de Sureau, la plus puissante baguette jamais créée. Le temps est plus que jamais compté et le trio va devoir faire très vite pour retrouver les horcruxes restants s’ils veulent encore espérer battre Voldemort…
Quasiment dix ans après la mise en chantier du premier épisode, voici qu’arrive le moment tant attendu par les fans, le grand final de la saga Harry Potter au cinéma. Faisant directement suite à première partie des plus réussies permettant enfin aux personnages de respirer, ce huitième opus, toujours mis en scène par David Yates, reprend exactement là où le précédent s’était arrêté. Harry et ses amis ont réussi à échapper aux Mangemorts, mais ont perdu leur ami Dobby qui s’est sacrifié pour eux. Ebranlés par cette mort tragique, ils vont pourtant devoir rapidement se reprendre pour continuer la chasse aux horcruxes.
Pour ce dernier épisode, David Yates et son scénariste Steve Kloves ont décidé d’enchaîner directement sans proposer de résumé de l’épisode précédent. Tant mieux pour les spectateurs qui suivent la saga depuis le début, et tant pis pour ceux qui débarquent (d’un autre côté, on imagine difficilement un spectateur commencer la saga par son ultime épisode). Le film plonge quasiment directement dans l’action, ne laissant que très peu de temps au spectateur pour reprendre ses marques. Au bout de quelques minutes, Harry et ses amis se retrouvent donc à Gringots, la banque des gobelins, pour tenter de récupérer un nouvel horcruxe. Un casse et une rencontre avec un dragon plus tard, et c’est le retour à Poudlard pour retrouver un nouvel objet magique, et se préparer pour l’ultime bataille. Bref, si l’épisode précédent prenait son temps, adoptant un ton résolument dépressif, celui-ci ne laisse que peu de temps au spectateur pour respirer, imposant un rythme d’enfer sur les deux heures de projection.
On sent Yates beaucoup plus à l’aise dans les scènes d’action, donnant plus d’ampleur aux affrontements, même si on pourra légitimement regretter que la fameuse bataille de Poudlard ne se déroule qu’en arrière-plan de l’intrigue. Du coup, comme dans les épisodes précédents, ce sont les personnages secondaires qui pâtissent énormément de la nécessité de condenser l’intrigue. Les nombreux morts ne font aucun effet, que ce soit aux héros ou au spectateur, et certains personnages n’apparaissent quasiment qu’à l’étant de cameo (Hagrid notamment, sacrifié au point que son apparition est des plus ridicules, ou Bellatrix Lestrange qui est éliminée en trente secondes). Une relative déception donc, surtout que Kloves a cru bon de changer le destin de certains personnages, rendant leurs actions incohérentes (Drago Malefoy en fait les frais). Le seul personnage secondaire important à tirer son épingle du jeu reste Rogue, à qui Yates réserve un traitement de faveur. Toujours porté par l’excellente interprétation d’Alan Rickman, Rogue est certainement le personnage le plus passionnant de cet épisode (voire de la saga) et a droit à un magnifique flashback de dix minutes, furieusement romantique et émouvant.
Cependant, le film tient ses promesses en termes de spectacle, et si on sent parfois que Kloves galère à combler les failles et recoller les morceaux oubliés dans les films précédents, force est de constater que le film se tient plutôt bien. L’affrontement final entre Harry et Voldemort est épique juste ce qu’il faut, et même si Ralph Fiennes continue de surjouer de façon un peu trop outrancière, on saura gré au réalisateur de ne pas avoir foiré le grand final de la saga.
Bref, si la saga Harry Potter a toujours été assez bancale, la faute à un scénariste n’ayant pas su choisir correctement les éléments à garder et ceux à éliminer, force est de constater qu’au moins les personnes impliquées se sont appliquées à conserver le ton de l’œuvre d’origine jusqu’au bout. Et c’est déjà beaucoup. Il est donc temps de dire adieu à Harry et ses amis, sur une note plutôt positive heureusement.
Note : 7/10
USA, 2011
Réalisation : David Yates
Scénario : Steve Kloves
Avec : Daniel Radcliffe, Emma Watson, Rupert Grint, Ralph Fiennes, Alan Rickman, Michael Gambon, Helena Bonham Carter, Jason Isaacs, Warwick Davis, David Thewlis, Maggie Smith
Comment tuer son Boss ? (Horrible Bosses)
Résumé : Nick (Jason Bateman), Kurt (Jason Sudeikis) et Kenny (P. J. Byrne), trois amis d’enfance, ont une chose en commun: ils détestent leurs chefs respectifs, qui leurs rendent la vie impossible. Après une soirée passée à discuter de leurs problèmes respectifs, ils en viennent à la conclusion que leur seule solution est de tuer leurs chefs. Ce qui n’est pas sans poser quelques problèmes lorsqu’on n’a pas l’âme d’un tueur…
Le nouveau film de Seth Gordon (réalisateur de Tout… sauf en Famille) avait tout pour susciter l’intérêt : un sujet en or, et un casting royal avec des acteurs dans des contre-emplois savoureux (Kevin Spacey, Jennifer Anniston et Colin Farrell en boss tyranniques). Bref, de quoi faire une bonne comédie grinçante sur le monde du travail.
Malheureusement, c’était sans compter la frilosité hollywoodienne et l’attitude de yes man sans relief de Gordon. Et ce qui aurait pu être une excellente comédie noire à la Very bad Things n’est au final qu’une gentille petite comédie sans grande ampleur. Les meilleurs passages sont finalement ceux impliquant les trois boss du titre, leurs interprètes s’en donnant à cœur joie. Kevin Spacey s’octroie la part du lion en manager tyrannique, manipulateur et jaloux, Colin Farrell s’offre un relooking extrême pour son rôle, mais est malheureusement sous-exploité, et l’habituellement très sage Jennifer Aniston est tout simplement géniale en nympho dévergondée. Du coup les trois héros font bien pâle figure à côté. Les deux Jason (Bateman et Sudeikis) s’en sortent à peu près honorablement malgré la relative transparence de leurs personnages respectifs, mais P. J. Byrne tombe rapidement dans l’hystérie et devient très vite insupportable.
Alors oui, on rit de temps en temps devant les déboires de l’équipe de bras cassés (notamment lors de leur exploration des maisons de leurs chefs respectifs), mais le tout est beaucoup trop sage pour convaincre. Le film reste sur des rails balisés et ne va jamais jusqu’au bout de son idée, se gardant bien de salir les mains de ses trois héros d’une quelconque façon. Tout doit bien se finir au pays de l’Oncle Sam, sans que les gentils héros aient quoi que ce soit à se reprocher.
Comment tuer son Boss n’est au final pas un film désagréable, mais on ne peut s’empêcher de se demander ce qu’un pitch pareil aurait donné dans les mains d’un réalisateur au sens de la satyre plus acéré…
Note : 5.5/10
USA, 2011
Réalisation : Seth Gordon
Scénario : Michael Markowitz, John Francis Daley, Jonathan Goldstein
Avec: Jason Bateman, Jason Sudeikis, P. J. Byrne, Kevin Spacey, Colin Farrell, Jennifer Aniston, Jamie Foxx