Les approches actuelles diététiques pour l'obésité sont fortement ancrées dans la notion de capacité personnelle à choisir des aliments sains et des portions restant dans un cadre alimentaire compatible avec la perte de poids. Mais cette étude en médecine préventive menée par des spécialistes du comportement du Rush University Medical Center recommande plutôt une approche neuro-comportementale qui permet au cerveau de contrôler le comportement alimentaire, en réponse à des stimuli de l'environnement. Une analyse très intéressante, relayée dans le Journal de l'American Dietetic Association.
L'idée que le surpoids et l'obésité sont liés à des choix personnels ou à un manque de volonté est stigmatisant pour les patients et peu susceptible de les motiver à perdre du poids. Ce nouveau modèle adopte un cadre scientifique qui décrit comment les choix personnels sont affectée par des facteurs biologiques et environnementaux. Les trois processus neurologiques constamment impliqués dans l'obésité et l'hyperphagie sont la récompense alimentaire, le contrôle de l'inhibition et l'actualisation du temps.
- Le processus de récompense alimentaire est médiatisé par une voie nerveuse dans le cerveau (le système dopaminergique mésolimbique) aussi connue comme “le circuit de la récompense”. La récompense alimentaire inclut à la fois l'expérience du plaisir et la motivation pour obtenir et consommer des aliments agréables au goût. Les personnes qui ont une plus grande sensibilité à la récompense ont des envies plus fortes d'aliments sucrés et gras. Cette sensibilité à base biologique, couplée avec un accès trop facile à des aliments malsains explique la vulnérabilité à la suralimentation et au gain de poids.
- Le contrôle de l'inhibition: Au-delà de l'intensité des envies de nourriture, la capacité de contrôler son comportement en dépit d'une forte motivation à manger est médiatisée par le cortex préfrontal du cerveau, qui est considéré comme une zone critique pour la maîtrise de soi, la planification et l'orientation du comportement. La région dorsolatérale du cortex préfrontal est impliquée dans la décision d'engager des processus d'inhibition dans un but d'auto-régulation, et cette région du cerveau s'active lorsqu'il s'agit de choisir des aliments sains plutôt que tentants.
- La capacité de se projeter dans le temps (Time Discounting): Ce troisième facteur qui réduit probablement les taux de succès des interventions diététiques contre l'obésité est la difficulté à évaluer un bénéfice futur. “La plupart d'entre nous préférerent recevoir 200 $ aujourd'hui, plutôt que 300 $ par an à partir de maintenant", explique le Pr. Appelhans. De même, le plaisir immédiat de manger a un poids plus important sur la prise de décision que les bénéfices d'une perte de poids future. Cette projection temporelle est régie par les mêmes régions du cerveau associées à la récompense alimentaire et au contrôle de l'inhibition.
“L'obésité est fortement influencée par des vulnérabilités génétiques et un environnement alimentaire toxique", conclut le Pr. Appelhans. “Les diététiciens et nutritionnistes peuvent aider les patients à contrôler leur poids grâce à des stratégies axées sur l'interaction entre le cerveau et l'environnement, plutôt que par une approche traditionnelle en les encourageant à combattre les fringales et à manger moins de calories que ce qu'ils dépensent." Les chercheurs proposent en particulier,
- de supprimer tous aliments gras ou sucrés qui “font envie” de son environnement personnel (maison, lieu de travail) pour prévenir l'activation des circuits de récompense,
- de limiter l'impact de la récompense en faisant faire ses courses sur la base d'une liste ou en ligne,
- les techniques de gestion du stress car le stress favorise la suralimentation et l'obésité par l'augmentation de la réponse-récompense à l'alimentation,
- d'éviter les situations telles que des buffets et restaurants qui défient le contrôle de l'inhibition,
- de se donner des objectifs de comportement à court terme comme la cuisson d'un repas sain trois fois dans la semaine, plutôt que de se concentrer sur des objectifs de perte de poids de long terme.
Il s'agit donc de s'épargner au maximum, dans son environnement, les stimuli aux 3 processus neurologiques qui favorisent le surpoids ou l'obésité.
Source: Journal of the American Dietetic Association viaeurekalert (AAAS) “Obesity counseling should focus on neurobehavioral processes, not personal choice, researchers say”