Jean-Paul Jaud montrant un foulard avec le slogan « définitivement contre le nucléaire » en japonais.
C’est avec joie que nous vous présentons l’interview de Jean-Paul Jaud, le réalisateur des deux films engagés « Nos enfants nous accuseront » et « Severn, la voix de nos enfants ». Profondément marqué par la catastrophe de Tchernobyl en avril 1986, Jean-Paul Jaud prend conscience de l'urgence écologique planétaire. Ce réalisateur pionnier de Canal +, concepteur notamment des directs de sport, décide alors de créer sa propre société de production, J+B SÉQUENCES, au sein de laquelle il réalise des films documentaires dans une totale liberté artistique (la série Quatre saisons en France). Avec Nos enfants nous accuseront, pressé par l'urgence écologique et intimement convaincu que le cinéma a un rôle essentiel à jouer dans la sauvegarde de notre civilisation et de la planète, il a choisi de mettre en exergue les solutions. Dans Severn, la voix de nos enfants, Jean-Paul Jaud écrit et dit le commentaire en voix off pour la toute première fois. C'est de loin son long métrage documentaire le plus personnel et le plus libre.
Sur le tournage de son prochain film, Jean-Paul Jaud nous accorde une interview sans détours et nous livre sa vision de la société face aux questions environnementales.
Vos deux films traitent des enjeux environnementaux sous l’angle de l’enfant. Y a-t-il un raison à cela ? Est-ce pour interpeller ou pensez-vous que c’est eux qui peuvent délivrer le message le plus juste?
Aujourd’hui on assiste à une réelle « crétinisation » des enfants. Face aux nombreux dérapages des adultes, on devrait pourtant accorder plus souvent la parole aux enfants, voire leur accorder plus de responsabilités. Pendant le tournage de mon film « Nos enfants nous accuseront » et la mise en place d’une nourriture bio dans la cantine de Barjac, ce sont les enfants eux-mêmes qui ont éduqué leurs parents : ainsi, de deux familles mangeant bio, on est passé à vingt familles ; preuve que les enfants ont tout compris et qu’ils peuvent aussi être acteurs du changement.
J’ai également choisi de mettre en avant les enfants puisque c’est leur avenir qui est en jeu et surtout, ce sont eux qui subiront directement les conséquences de nos actes. « La planète ne nous appartient pas ; nous l’empruntons à nos enfants. »
2008 : première diffusion de « Nos enfants nous accuseront ». En trois ans, quel bilan dressez-vous de la diffusion de vos films ? Avez-vous connaissance d’initiatives lancées suite à la vision de vos films ?
Mon premier film a rencontré un succès relativement important pour un documentaire environnementaliste, avec plus de 300 000 entrées. Deux ans plus tard, "Severn, la voix de nos enfants" ne générait déjà plus que 35 000 entrées, preuve flagrante que l’engouement pour le bio et l’environnement s’essoufflaient, notamment après cette phrase assassine du président de la république : « les contraintes environnementales, ça commence à bien faire ». Mon film allait être suivi par Home, Le syndrome du Titanic, Solution locale pour désordre global… occasionnant un sentiment de connaissance suffisante des problèmes de la part des spectateurs mais surtout de la presse qui parlait alors d’une « pluie de films », face à une production pourtant plus que confidentielle. Nous avons à faire à une presse « aux ordres ».
Suite à mon premier film, un public fidèle et engagé m’a rejoint et ainsi a suivi la sortie de mon second film. Le cinéma a un réel rôle pour faire passer un message, il faut donc continuer à faire des films.
« Nos enfants nous accuseront » est un titre choc. La provocation permet-elle de générer plus de réaction ?
« Nos enfants nous accuseront » n’est pas un titre choc mais plutôt un bel euphémisme. Jamais tel désastre n’avait été commis par une génération : déchets nucléaires, pollution des sols, des océans, atteinte à la biodiversité… Alors que pendant des siècles, l’homme tendait à conquérir toujours plus de nouveaux territoires et à agrandir son horizon, depuis Tchernobyl au contraire, nous le restreignons.
Mon titre aurait tout aussi bien pu être « nos enfants nous massacreront ». Les générations du XXe et du début du XXIe siècle sont des générations barbares. Nous sommes une civilisation « hors-sol », en rupture totale avec le vivant.
Si j’étais élu en 2012, la première chose que je demanderais serait d’installer des potagers bio dans les écoles pour éduquer les enfants et leur (ré) apprendre ce qu’est le vivant.
Après vos deux films, pouvez-vous dire ce qui fait le plus réagir le public ? Y a-t-il un angle qui fonctionne le mieux ? (On pense notamment à Home et à son angle très esthétique mais pas provocateur)
Il n’y a pas d’angle qui fonctionne le mieux. Chaque film est complémentaire, chacun a son propre regard. « Severn la voix de nos enfants » était le premier film à aborder le nucléaire, il a touché tous les publics.
Un des protagonistes de « Nos enfants nous accuserons » affirme que ce sont les politiques qui peuvent faire changer les choses. Avez-vous l’impression que vos films les aient touchés ?
Suite à « Nos enfants nous accuseront », Ségolène Royal m’a contacté et soutenu, ainsi que Jean-Louis Borloo, Michèle Rivasi, député européenne d’Europe Ecologie les Verts et de nombreux maires. Des grandes villes comme Marseille ou St Etienne sont passées au bio grâce à mon film. Mais la censure de l’agroalimentaire reste très présente et très puissante.
Avez-vous des projets dans l’immédiat ?
Dénoncer dans un film les dangers des OGM et du nucléaire : entre irréversibilité et confiscation du vivant.La sortie de ce film est prévue l’année prochaine.
Vous revenez tout juste de Fukushima au Japon, dont les images ont réveillé l’opinion publique et lancé une vague anti-nucléaire. C’est triste d’en arriver là mais pensez-vous que c’est inévitable?
Malheureusement oui. Il faut en arriver là pour faire bouger les choses car ce genre d’information est impossible à dissimuler. Mais le coût des réparations à Fukushima est inchiffrable et celui du démantèlement d’une centrale est un gouffre sans fond !
Les centrales sont des bombes atomiques en puissance à 40 km de chez nous, elles constituent des cadeaux mortels pour les générations futures. Pourtant, il est possible de passer à l’énergie renouvelable en à peine 10 ans !
Nous n’avons pas besoin du nucléaire ni des OGM, qui sont impossibles à maîtriser et sont de véritables crimes contre l’humanité dans la mesure où elles menacent le vivant ; j’ai interviewé des paysans japonais, ils m’ont dit : « nous avons construit un monstre ! »le monstre s’est mis en colère et l’homme est incap d’arrétéer sa colère ».
Actuellement, nous ressentons un essoufflement de l’engouement pour l’éthique et le commerce équitable, d’autant plus dans le secteur de la mode écologique ; ressentez-vous cela également ? Pour vous, cela n’est-il que passager ou relève-t-il de quelque chose de plus inquiétant ?
Cela n’est que passager et relève d’un déni qui a fait suite au grenelle de l’environnement. M. Claude Allègre s’est chargé de saboter le mouvement de fond qui portait le bio et le commerce équitable, ainsi que le font tous les médias, détenus par cette oligarchie qui nous gouverne.
Cela ne sera que passager tant que l’information, qui est aux mains des lobbys, sera déviée. Quand la vérité apparaîtra, les citoyens suivront le mouvement. L’exemple de la diffusion de mes films « Nos enfants nous accuseront » et « Severn, la voix de nos enfants » est particulièrement criant puisqu’ils n’ont été diffusés par aucune chaîne publique. C’est bien la preuve qu’il existe actuellement un véritable boycott sur l’information environnementale.
Portrait chinois :
Votre Objet fétiche écolo ? : mon vélo
L’Objet écolo que vous aimeriez voir inventé : l’avion à énergie solaire
L’Objet non écolo dont vous ne pourriez pas vous séparer : ma moto
A l’occasion de la sortie en DVD de Severn, la voix de nos enfants au mois de septembre, Severn Cullis-Suzuki, actrice principale du film, viendra pour la première fois en France pour assurer la promotion du DVD, du 19 au 28 septembre. Elle participera à différentes conférences, alors n’hésitez pas à venir l’écouter !
Pour plus d’informations sur Jean-Paul Jaud et ses films:
http://www.nosenfantsnousaccuseront-lefilm.com/
http://www.severn-lefilm.com/home.html
LES COMMENTAIRES (1)
posté le 25 août à 11:30
Jean-Paul Jaud est mauvais perdant. Accuser les autres de son propre échec est habituel de ce type de caractère.