Lupin
Bleu de lupin – il y avait quelque chose comme ça
Dans mon enfance. Était-ce verre ?
Qu’est-ce qui était aussi pâle que les lupins,
Qui se tournent comme sauvages vers la lumière,
Comme des flammes bleues qui ne brûlent pas
Et pourtant passent si prestement ?
C’était du verre, des pierres, du clinquant,
Ne sais plus comment il était venu jusqu’à moi,
Ne sais plus que ce bleu blême,
Couleur de la nostalgie. Rosée matinale
Dans la légère lumière du ciel figée,
Et un sentiment de cette sorte :
Gouttes de bonheur écrasées dans le poing,
Perdues. Mais il reste une trace
De la couleur de nostalgie bleue alouette.
Des lupins brûlent sous la rosée.
Lupine
Lupinenblau - so war doch was
In meiner Kindheit. War es Glas?
Was war so blaß wie die Lupinen,
Die sich wie wild dem Licht zudrehn,
Wie blaue Flammen, die nicht brennen
Und doch so überschnell vergehn?
Glas war es, Steine, Glitzerkram,
Weiß nicht mehr, wie er an mich kam,
Weiß nur noch dieses bleiche Blau,
Die Sehnsuchtsfarbe. Morgentau
Im leichten Himmelslicht erstarrt,
Und ein Gefühl von solcher Art:
Glückstropfen, in der Faust zerpreßt,
Verloren. Doch es blieb ein Rest
Der Sehnsuchtsfarbe Lerchenblau.
Lupinen brennen unterm Tau.
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Nuits de cigales
Nuits de cigales. Il faudrait les
Transcrire sur un seul ton.
Comment corseter dans des mots
L’anti-mélodie des cigales ?
La chaleur des pierres. L’odeur grise
Et le chuchotement des herbes dans le noir.
Pins rabougris au bord de l’anfractuosité.
Et derrière l’absinthe et les genêts
Le lac méridional, qui est là et se tait,
Couvert par la stridence des cigales :
Un violoneux en folie violone
Sur un fil d’argent.
Zikadennächte
Zikadennächte. Man sollte sie
auf einem Ton nachsingen.
Wie will man die Anti-Melodie
Der Zikaden in Worte swingen?
Die Wärme der Steine. Der graue Geruch
Und das Flüstern der Gräser im Finstern.
Verkrüppelte Kiefern am Felsenabbruch.
Und hinter Wermut und Ginstern
Der südliche See, der da ist und schweigt,
Überschritt von den Zikaden:
Ein irr gewordener Geiger geigt
Auf einem Silberfaden.
Eva Strittamatter, Du silence je fais une chanson, traduction de Fernand Cambon, édition bilingue, Cheyne éditions, 2011, pp. 18/19 et 48/49.
Bio-bibliographie d’Eva Strittmatter
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