Un dîner à Monteverro

Comme annoncé dans le billet précédent, cette visite - trop brève - du Domaine Monteverro de Georg Weber, fût suivi d'un dîner 100 % toscan, c'est à dire avec du sanglier, un animal présent dans les maquis de la propriété en quantité impressionnante. Et donc il a fallu entourer toutes les parcelles plantées de fils électriques parfaitement dissuasifs.

On comprend mieux la volonté du maître des lieux et le but qu'il s'est fixé - placer ses vins parmi les références transalpines - en l'écoutant raconter les vins qui le passionnent. Sa cave munichoise doit être plus qu'intéressante, vu les bouteilles qu'il avait rapportées d'Allemagne pour cette soirée.

Après un "Auslese" *** de JJ Prüm en apéritif, son choix en blanc. Ce 1952 de Bouchard était simplement géant. Une pure merveille, du grandiose, une totale perfection sans aucune dominante de "champignons & terre", trop commune en vieux millésimes bourguignons blancs. Un rappel émouvant des soirées uniques au Château de Beaune, du temps de Bernard Hervet où nous étions "descendu" jusqu'à un Meursault 1858. Un pur chef d'oeuvre et sans l'enthousiasme excessif qui me caractérise trop souvent.

A droite, Julia l'épouse de Georg.

Deux "flights" du dîner. Fabuleuse comparaison. Le LALA de Guigal s'est imposé très vite face à la trop discrète élégance du La Chapelle à qui il manquait un minimum de puissance et de richesse pour tenir à côté de ce monument rhodanien.

Si l'Hermitage de Chave s'est imposé pendant dix minutes par sa finesse et sa longueur en bouche, quand le LMHB s'est réveillé de son sommeil, ce fût littéralement une explosion en tout. Ce 2001 est géant. Point.

J'ai dû sortir toute ma force de persuasion pour interdire à Georg d'ouvrir ce monument de Rousseau, l'intimant de garder cette bouteille (il en a d'autres à Münich) pour la déguster avec Messieurs Charles et Eric. Emotions garanties, je n'en doute pas une seconde. Et je ne vous dis pas le cul de cette bouteille : on en fait plus des comme ça !

Du coup, Georg nous a mis à l'aveugle :

Une finesse inouïe, une classe qui vous laisse sans voix et naturellement plein de pensées qui vous traversent l'esprit. Une année médiocre, une année de guerre, une mise en Allemagne, une permission d'un Weinführer (?), très probablement un vin qui n'existe plus chez les Nicolas. 

Michel Rolland a trouvé immédiatement "pomerol" alors que je me perdais en "grand cru" de la côte de nuits, style Musigny ou autre Echézeaux. Pour la période, on était bon à dix ans près. Michel me confirme qu'on avait le droit de mettre la mention "1er cru". Pour mémoire, je suis toujours à la recherche du classement des pomerols qui a été établi sous le gouvernement de Vichy et dont personne ne veut me parler : sigh ! comme dirait Charlie Brown :-(

Grosse déception sur ce Chambertin 1947 de négoce, manifestement bodybuildé par de solides vins du Rhône. Mais bon, c'était un peu dans l'odre des choses à l'époque.

je me suis fait sérieusement morigéné par Michel Rolland (qui a trouvé le millésime) quand j'annonçais - prétention doublement stupide - un pomerol d'après guerre, un choix que je justifais par cette puissance  quasi confiturée. Il m'a vertement (mais calmement et gentiment) fait remarquer que l'AOC pomerol, c'est avant tout de la finesse. Je n'oublierai pas, et d'ailleurs le La Conseillante d'au-dessus en était la plus que parfaite démonstration. Pourquoi ai-je donc de tels moments d'égarement ? Décidemment, ce n'est pas demain que je pourrai intégrer le GJE :-(

Bon : c'est pas tout ça. Va falloir envisager de nouvelles lectures de telles beautés, avec mes zozos de Romanéens. On va inscrire Münich dans nos tablettes car il y a eu en Allemagne, quelques ventes aux enchères où de tels chefs d'oeuvre se sont vendus à des conditions n'ayant rien à voir avec les folies actuelles. Non, non : nous ne sommes pas des pilleurs de caves ! On apportera en échange - une de nos coutumes - d'autres flacons se reposant tranquillement dans les caves du Petit Vialette. Va falloir négocier sec !

Michel Bettane : tu demandes un jour de congé cet automne à ton pote Desseauve ? Tu ne seras pas de trop pour calmer nos ardeurs intempestives et mes éventuelles louanges inappropriées.

Merci Georg ! Une passion partagée à ce niveau, c'est rare, cela se respecte. Chapeau !