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Une curieuse partie de poker

Publié le 29 juillet 2011 par Copeau @Contrepoints

Par David Descoteaux, de Montréal, Québec

Une curieuse partie de poker
La nuit dernière, j’ai rêvé à mon jeu favori : le poker. C’est la deuxième fois. J’ai écrit une chronique semblable l’an dernier. Je vous raconte.

Autour d’une table, sept joueurs : Le Grec, Banquier, Sir Régis, Boomer, Politicien, Jeune, et Contribuable. L’atmosphère est tendue…

Le Grec vient jouer chaque soir. Toujours en empruntant des jetons aux autres. Il perd souvent, mais ça ne l’empêche pas de boire du champagne et dévorer des filets mignons. Tant que les autres lui prêtent des jetons…

L’un deux est Banquier. Lui, mise un tas de jetons chaque tour, peu importe ses cartes. Et en prête à qui lui demande. Il s’en fout. Il sait que son ami Politicien va le renflouer au besoin. C’est justement son tour de brasser. Il lance un clin d’œil à Politicien, et distribue les cartes.

Depuis le début de la partie, Politicien subtilise des jetons à Contribuable, et les distribue dans la foule en lançant des beaux sourires. (Une foule composée surtout de PDG de multinationales, de chefs syndicaux et de groupes de pression.) Politicien veut se faire aimer.

Soudain, Contribuable voit que Politicien a les deux mains au fond de ses poches. «Tu m’avais dit que tu arrêterais ça!», hurle-t-il. «J’ai dit que j’allais “geler” ma distribution de jetons, dit Politicien. Pas que j’allais arrêter d’en donner.» Pendant que Contribuable essaie de comprendre cette réponse, Politicien ajoute : «Écoute. Je te promets de faire deux tiers des efforts pour refaire ta pile de jetons. Tu n’auras qu’à fournir le tiers.» En se retournant, il fait un clin d’œil à la foule…

Le Grec a perdu tous ses jetons. Il se tourne pour en emprunter, mais ce coup-ci les autres joueurs refusent. Le Grec croule sous les dettes, et on doute de sa capacité à rembourser. «Moi je veux bien t’en prêter, dit Banquier. Mais tu dois me donner ta montre, ta chemise et ton pantalon. Et va me préparer du café».

Furieux, Le Grec quitte la table. Il sort dans la ruelle, met le feu à la Mercedes de Banquier. «Mon histoire devrait vous servir d’avertissement!», crie-t-il à travers les flammes. Personne ne l’écoute.

Après une heure, Sir Régis se fait éjecter de la table. Il parle trop, veut toujours brasser des cartes — même quand ce n’est pas son tour. Pire : il est venu ici sans jetons, se fiant uniquement sur Contribuable.

À l’autre bout de la table, Jeune enguirlande Boomer. «Tu devrais me donner tes jetons! Ça fait des années que tu fais le party, et c’est moi qui devrai payer ta facture.» Boomer voit rouge. «Étouffe-toi, le jeune! J’ai travaillé fort pour me bâtir une pile de jetons. Peux-tu en dire autant?» Jeune ajuste ses écouteurs de iPhone, sa tuque à 40 $, et dit : «Prépare-toi, le vieux. Je m’en viens chercher tes jetons.»

Les deux en font une affaire personnelle. Ils se relancent chaque tour et se ruinent. Jeune quitte la table, lessivé et endetté. Boomer a vu sa pile de jetons fondre, mais se fie à la promesse de Politicien pour continuer à jouer pendant ses vieux jours. Ce dernier lui a parlé d’une mallette pleine de jetons, cachée dans un endroit secret, une pyramide. Gardée par un certain «Ponzi».

La fin de partie approche.

Il reste quatre joueurs. Politicien se fie sur Contribuable (pour piger dans sa pile). Contribuable est fauché, et se fie sur Banquier (pour emprunter et survivre). Banquier se fie sur Politicien (pour renflouer sa pile au cas où ça irait mal). Et Boomer se fie sur Politicien (et sur sa mallette secrète).

À ce moment, l’alarme-radio de mon cadran se déclenche. Dans une chanson, on entend un bout du filmApollo 13. Celui où l’astronaute dit : «Houston, we have a problem».

Je me demande comment la partie s’est terminée…

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