Alors qu'il était tout juste majeur, Charles Schulz a perdu sa mère aux mains du cancer et dès le lendemain matin quittait pour faire sa part à la seconde guerre mondiale.
Il était dans une escadrille que l'on appelait "les fils à maman/papa". Une division composée majoritairement de soldats fragiles qui avaient été surprotégés par un père ou par une mère. Schulz admirait aveuglément son père barbier mais adulait carrément celle qui en faisait toujours un peu trop pour lui: sa mère.
Il venait de la perdre, son monde s'écroulait.
Convaincu très jeune qu'il ne pouvait rien faire d'autre que du dessin pour vivre, Charles Schulz a multiplié les demandes dans les journaux en envoyant ses dessins de sa main. Suite à de multiples refus, il suit des cours de dessin pour parfaire son art et devient instructeur lui-même à la Art Instruction Inc.
Il y nouera de solides amitiés, un certain Linus Maurer, un Charlie Brown, une Frieda et tombe amoureux d'une jolie fille rousse qui seront tous évoqués dans sa future bd.
En prenant une marche avec une amoureuse dans un champs, quand une vache fonce sur eux, il ne pense pas une seule seconde tenter de sauver sa compagne et grimpe dans un arbre. Plus tard, quand sa femme ira en Asie faire faire un avortement à leur fille qui est tombé enceinte précocement, la première chose qu'il leur demande est "Et puis? comment était le décor en Chine?"
Boy among men, il ne dessinera plus jamais d'adultes.
Il met dans son oeuvre énormément de lui-même. Il sera Charlie Brown, Linus, Schroeder, Snoopy et quelquefois Woodstock. Sa femme, Joyce, sera Lucy. Sa cousine, Peppermint Patty.
Cette fausse humilité cachait une envie d'être couvé. Schulz était un adepte du confort dans le spleen. La solitude choisie. La solitude sans risque. le contrôle total de son univers. En fils unique. Jusqu'à sa mort, il n'a jamais fait appel à des assistants.
Dans ses oeuvres, l'indifférence serait la principale réponse à l'amour. Quand ses personnages tenteraient d'aimer, ils seraient généralement accueillis non seulement par le rejet, mais souvent par la froide et brutale indifférence.
Infirme social, Schulz trouvait refuge en 4 cases chaque jour de sa vie. L'Amérique l'a adopté et aimé immensément. Héros sans en accepter les responsabilités Schulz devient extrèmement riche avec les produits dérivés de ses vignettes. Quand il soustrait Linus et Lucy temporairement de celles-ci, l'Amérique se couche sur le divan du psychanalyste. Même certains docteurs écriront à Schulz de ramener les personnages car leur absence est malsaine pour la psychée collective des États-Unis.
L'image au sommet de ce post est devenue mon fond d'écran récemment.
Punkee, ma fille, est venue derrière moi pour me dire "WOW! papa c'est cool ton fond d'écran!!!! Je les aimes eux!"
Moi qui ne lui ai jamais vraiment présenté les personnages suis resté étonné.
"Tu les connais?"
"Oui, je les ai vus dans la télé l'autre fois, je les aimes..."
Cette Punkee me ressemble dangereusement en vieillissant...