Non aux lois anti immigrés (William Hamon, CC)
Ces derniers mois ont vu encore augmenter, si besoin était, la confusion qui règne dans les débats sur l’immigration en France. On est vraiment surpris de voir ainsi de soi-disant « libéraux », comme notre président de la République qui nous a fait croire pendant la campagne de 2007 qu’il serait le « Thatcher français » (ah si seulement cela avait été vrai!), se prendre à rêver tout haut d’immigration « zéro », comme si un tel objectif était souhaitable en soi et compatible avec le libéralisme affiché par ailleurs dans certains cénacles de l’UMP.
Pour éviter tout malentendu, je dirai en préliminaire que je suis pas du tout une « colombe » en matière d’immigration. Ma ville connaît ainsi une vague sans précédent d’immigration subsaharienne. Je n’ai a priori rien là-contre puisque, comme tout libéral authentique, je suis pour la liberté de circulation la plus grande possible. Le problème est que la plupart de ces nouvelles populations vivent des transferts sociaux que le généreux État-providence français leur octroie sans aucune contrepartie travaillée (1). Appelons un chat un chat, ce genre de personnes qui vivent aux crochets de la société alors qu’elles pourraient travailler me sont tout simplement odieuses, qu’elles soient de nationalité française ou étrangère, peu importe. Si elles sont françaises, qu’on les remette au travail comme le fit le président Clinton avec son fameux workfare. On peut en effet comprendre que les accidentés de la vie aient besoin d’un petit coup de pouce momentané pour se remettre debout, mais que cela devienne un mode d’existence est insupportable. Alors je suis d’avis d’aider les gens mais à condition qu’ils se rendent utiles à la société qui les aide en prenant des emplois d’utilité collective par exemple: c’est cela qu’exige d’eux le contrat social qui nous rassemble. Mais si ces personnes sont étrangères, qu’elles rentrent chez elles pour vivre aux dépens de leur nation plutôt que de la nôtre. Une politique de reconduite à la frontière de ce genre d’individus ne me choque pas. En revanche, je prône la mansuétude vis-à-vis des étrangers en situation irrégulière qui travaillent en France depuis plusieurs années car eux respectent notre contrat social même s’ils sont en infraction avec la lettre de la loi française.
Méfions-nous aussi des trompe-l’oeil. L’année 2009 a battu des records en matière d’immigration vers la France, mais cela était dû pour l’essentiel au regroupement familial et non à l’arrivée de nouveaux travailleurs.
Notons d’ailleurs en passant que, dans certains domaines, comme par exemple le bâtiment ou les médecins urgentistes, la France connaît des pénuries de main-d’œuvre qui rendent les travailleurs étrangers indispensables. Cela dit, il est absolument anormal que des travailleurs faiblement qualifiés pointent au chômage alors que les entreprises du BTP, qui recrutent une main-d’œuvre généralement peu qualifiée, ne trouvent pas assez de monde. Les critères de radiation de Pôle-Emploi devraient être durcis afin d’obliger les chômeurs peu qualifiés à prendre les emplois qui sont à leur disposition sur le marché et n’attendent qu’eux. Les indemnités peuvent être généreuses à condition que ces travailleurs jouent le jeu. C’est le cas par exemple au Danemark – certainement pas la patrie de l’ultra-libéralisme – où les indemnités sont élevées mais où les indemnisés ont des comptes à rendre à l’ANPE danoise. Malheureusement, le nombre d’agents de Pôle-Emploi est notoirement insuffisant – leur équivalent danois s’occupe de trois fois moins de dossiers par agent – et, pour comble d’infortune, cette agence est un fief des syndicats gauchistes comme la FSU.
Comme je l’ai déjà souligné ailleurs, un candidat à l’immigration a une idée assez précise de l’état de l’économie et du marché du travail dans le pays où il envisage d’immigrer. La preuve : après la crise de 2008, l’immigration légale et illégale – hors regroupement familial – a considérablement diminué en France. Les politiques d’immigration qui fonctionnent bien dans le monde sont donc des politiques de quotas dites « d’immigration choisie », comme au Canada, anticipant l’arrivée des immigrés, légaux ou illégaux, qui viendront de toute façon chez nous. En pilotant cette immigration, le pays concerné fait venir légalement des travailleurs qui seraient de toute façon venus illégalement à cause des besoins en main-d’œuvre du pays ciblé. Les travailleurs légaux prennent les places qu’auraient occupées les illégaux en l’absence d’une telle politique et font donc baisser le nombre d’emplois disponibles pour les illégaux. Comme par hasard, on constate empiriquement que ce genre de politique fait baisser le nombre d’immigrés illégaux dans les pays qui l’adoptent. Malgré les promesses électorales de Nicolas Sarkozy de doter la France d’une politique « d’immigration choisie », ce n’est pas du tout le chemin que nous prenons.
Alors redisons-le clairement : on ne peut pas être libéral quand il s’agit de circulation des marchandises et devenir nationaliste quand la circulation des hommes est en jeu. De plus, quand on pense comme moi que les politiques de soutien au tiers monde sont inutiles, donner un avenir meilleur chez nous à des gens qui le méritent est un devoir moral.
Or une partie – évidemment difficile à chiffrer – de l’immigration illégale en France vient de l’arrivée de gens qui veulent profiter de la générosité excessive et mal conçue de notre système d’aides sociales. Ce n’est donc pas l’immigration en soi qu’il faut stopper, mais l’État-providence qu’il faut de toute urgence réformer avant que nos finances publiques ne soient totalement impécunieuses. Le président doit toutes affaires cessantes s’engager pour arrêter puis résorber les déficits publics.
Une fois cela fait, on verra que l’immigration illégale ne concernera plus que de vrais travailleurs et non des pique-assiettes. Elle sera alors nettement plus acceptable. Mais, dans un monde globalisé, les États qui ne savent pas se réformer sont les proies des profiteurs de toute origine (je pourrais aussi vous parler de la communauté serbe de mon quartier, tout un poème!).
Je voudrais enfin aborder un autre point qui ne laisse pas de me préoccuper tant il témoigne, ces derniers temps, d’un rapprochement inquiétant entre les discours d’une certaine gauche et ceux d’une certaine droite. En effet, on commence à entendre ici et là parmi des militants ou des sympathisants du Front de gauche d’aucuns prétendre que l’arrivée d’étrangers en France serait un moyen pour le patronat de casser les salaires des Français, bref une sorte de mondialisation dans l’autre sens où les délocalisations n’auraient plus lieu d’être puisque les salaires chez nous deviendraient attractifs grâce à l’instrumentalisation de l’immigration. Ce discours rejoint celui d’Arnaud Montebourg, le nouveau champion de la « démondialisation » auquel j’ai fait un sort dans un autre article. Mais force est de constater que le parallèle avec certaines thèses de l’autre Front, le national, est spectaculaire. D’ailleurs Mélenchon lui-même ne s’en cache pas : l’heure est à la reconquête de l’électorat populaire face au FN. Les deux Fronts nous promettent ainsi une belle surenchère de démagogie en 2012.
Or, quand on consulte la littérature économique, on est abasourdi de voir qu’il n’existe aucune étude en France pour mesurer l’impact des immigrés sur les salaires français. Il faut aller aux États-Unis pour en trouver. Je vous renvoie en liens à deux articles, l’un du New York Times, l’autre du Washington Post, qui commentent les résultats de ces études. Or que nous apprennent-elles?
Oui, les immigrés font bel et bien baisser les salaires dans certains secteurs de productions à faible valeur ajoutée, exactement de la même façon que la concurrence étrangère des pays à faibles coûts de main-d’œuvre le fait (donc un point pour le Front de gauche et Montebourg). Non, ils ne les font pas baisser globalement (donc zéro point pour eux). De plus, en faisant baisser les prix de certains services et marchandises, ils améliorent le pouvoir d’achat moyen de la population (donc moins un point pour le Front de gauche et Montebourg) et, comme ils ont général plus d’enfants que les autochtones, ils font grossir le marché intérieur du pays d’immigration (donc moins deux points pour le Front de gauche et Montebourg). Rappelons en effet que les immigrés ne sont pas seulement des producteurs mais aussi des consommateurs et des contribuables.
Autrement dit, au total, l’immigration nous est plus bénéfique que préjudiciable. On rappellera en passant que le coeur du raisonnement commun de MM. Montebourg, Mélenchon et Mme Le Pen est le malthusianisme (dont j’ai déjà traité ailleurs), à savoir en l’occurrence l’idée que, si nous avons déjà du chômage, la venue d’immigrés dans notre pays l’aggravera. Or c’est faux car si cela était vrai, alors l’avancement de l’âge de la retraite à 60 ans en 1982, les 35 heures en 2001 ou la diminution massive de l’arrivée de travailleurs immigrés après 2008 auraient dû faire baisser drastiquement le nombre de chômeurs en France pour la même raison. Pareillement, ceux qui comptent sur le papy boom pour résoudre notre chômage de masse ou, inversement, craignent la bonne tenue de la natalité française en face de ce même chômage se fourrent tous le doigt dans l’œil. Le chômage dans notre pays ne sera vaincu que le jour où les entrepreneurs ne seront pas désincités à embaucher. Notre pays licencie plutôt moins que nos voisins, mais il ne crée pas assez d’emplois, là est la vraie raison du chômage ici. Lorsque le nombre de créations d’emplois excèdera le nombre de leurs suppressions, la France retrouvera le chemin du plein emploi et les gens n’auront plus peur d’être licenciés, même si le nombre de licenciements est bien supérieur alors à ce qu’il est aujourd’hui (et il le sera forcément car il faut qu’il y ait beaucoup de destructions d’emplois pour qu’il y ait encore plus de créations).
Reste un dernier problème concernant spécifiquement les populations immigrées : leur concentration sur certains territoires. Disons-le d’emblée, inutile de croire que l’on pourra diminuer cette concentration puisque, en moyenne, ces populations sont plus pauvres que les autochtones, donc s’installent prioritairement dans des zones où l’immobilier est moins cher. Pour un libéral comme moi, toute politique de relocalisation forcée, comme la loi SRU, serait contre-productive car, en manipulant à la baisse les prix du marché, elle entraînerait une pénurie d’appartements à l’achat ou à la location (c’est d’ailleurs ce qui se passe en Île-de-France).
De plus, je ne pense pas du tout que la délinquance qui règne dans certains quartiers de nos villes ait grand-chose à voir avec la pauvreté de ces quartiers. Pourquoi un pauvre serait-il en moyenne plus délinquant qu’un riche? La délinquance en col blanc, après tout, ça existe aussi. Or je sais que c’est là un préjugé très répandu chez les gens de gauche qui ont trop lu Pierre Bourdieu mais j’aimerais bien qu’ils m’en donnassent une explication convaincante une bonne fois pour toutes. Pour tout dire, je les soupçonne d’une discrète condescendance vis-à-vis de pauvres qu’ils ne veulent pas soumettre aux mêmes exigences morales que les autres sous le seul prétexte qu’ils sont pauvres. Xavier Raufer, je crois, a surnommé cela de façon amusante le « syndrome de Jean Valjean ».
Il me semble, dans toute cette affaire, que l’on inverse le sens des causalités. Il me semble que les pauvres sont victimes d’un véritable cercle vicieux induit par l’insécurité. Je m’explique : certains de ces quartiers sont des zones de non-droit où les petites frappes et les caïds font la loi; du coup, les classes moyennes les fuient; les prix de l’immobilier y baissent conséquemment, attirant ainsi les populations les plus pauvres; or habiter dans de tels quartiers devient un vrai stigmate, les entrepreneurs ne voulant pas embaucher les jeunes, surtout les garçons, qui en sont issus et pour cause; du coup, ces jeunes se retrouvent plus souvent au chômage que la population moyenne et sont donc attirés par la délinquance, renforçant ainsi la rétroaction négative du processus; on dénonce alors, à gauche, le racisme des Français en général et des patrons en particulier qui ne veulent pas donner leur chance à ces jeunes, en oubliant que a) la causalité va de la délinquance vers le chômage dans ces quartiers et pas l’inverse, b) les Français ne sont pas si racistes que ça puisqu’ils sont au contraire l’un des peuples les plus exogames d’Europe, c) tout ce discours bien-pensant de la gauche moralisatrice précipite a contrario un tas de Français fort peu racistes vers le vote FN puisque ce parti est le seul à ne pas leur tenir un propos culpabilisateur mais à dénoncer la réalité de l’insécurité dans ces zones.
La solution à ce problème est donc évidente : il faut rétablir l’ordre public dans de telles zones. Et l’on attend de M. Sarkozy autre chose que des paroles, on veut des résultats palpables. S’il a un Kärcher, qu’il le passe vraiment.
Mais, en attendant, les immigrés sont les bienvenus en France.
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Note
(1) En effet, notre ville n’a pas connu de créations massives d’emplois ces dernières années, nulle grosse usine n’est venue s’y installer, nulle activité nouvelle ne s’y est développée. On ne voit donc pas dans quelle branche ces populations ont pu trouver de nouveaux jobs ici.
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