Ainsi jugé par cet arrêt :
"Vu les articles 28 et 30 du décret n 55-22 du 4 janvier 1955 ;
Attendu qu'en vertu de ces textes, le défaut de publicité des actes constatant l'accomplissement d'une condition suspensive n'a pas pour sanction leur inopposabilité aux tiers ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 2 mars 2010), que, par acte de partage du 4 janvier 1985, deux parcelles numérotées 1029 et 1030 ont été attribuées respectivement à Alfred X... et à Marcel X..., une clause de l'acte prévoyant que la cour située sur la parcelle 1029 serait attribuée à Marcel X... si Alfred X... n'avait pas enlevé un bassin en pierre situé sur la parcelle 1030 dans le délai d'une année de l'acte ; que le bassin est demeuré sur la parcelle 1030 ; que, par donation-partage du 3 mars 1993, la parcelle 1029 a été divisée, la partie 1142 comportant la cour étant attribuée en nue-propriété à Maurice X..., fils d'Alfred X..., ce dernier s'en réservant l'usufruit, puis a été vendue par acte du 12 novembre 1996 aux époux Y... qui l'ont eux-mêmes cédée aux époux Z... par acte des 28 et 30 janvier 2004 reçu par M. A..., notaire ; que Marcel X... a assigné les époux Z... en revendication de propriété de la cour, démolition du mur de clôture de leur fonds édifié par ceux-ci, paiement d'une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de la construction de ce mur, et, à titre subsidiaire, indemnisation par les notaires du préjudice subi en raison de la perte de son droit de propriété sur la cour ; que les époux Z... ont assigné en intervention forcée les époux Y... ainsi que M. A... et la SCP Pignard-Exbrayat et A... ;
Attendu que, pour rejeter les demandes de Marcel X..., l'arrêt, qui relève qu'Alfred X... a successivement cédé la cour litigieuse d'abord à son frère Marcel par l'effet de l'acte de partage du 4 janvier 1985 et de la réalisation de la condition suspensive contenue dans cet acte du fait du non-enlèvement du bassin puis en nue-propriété à son fils par l'effet d'une donation partage puis par l'effet des ventes de l'usufruit par lui même et de la nue-propriété par son fils à M. et Mme Y... lesquels l'ont cédée aux époux Z..., que Marcel X... n'a pas fait publier son acquisition résultant de la réalisation de la condition suspensive contenue dans l'acte de partage du 4 janvier 1985 et que les autres mutations ont été publiées, retient que les actes et décisions judiciaires soumis à publicité par application du 1° de l'article 28 du décret du 4 janvier 1955 étant, en vertu de l'article 30 de ce décret, s'ils n'ont pas été publiés, inopposables aux tiers qui, sur le même immeuble, ont acquis, du même auteur, des droits concurrents en vertu d'actes ou de décisions soumis à publicité et publiés, les droits de Marcel X... sont inopposables aux autres acquéreurs successifs ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la publication d'un acte constatant l'accomplissement d'une condition suspensive n'est pas prévue par le 1° de l'article 28 du décret du 4 janvier 1955, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry, autrement composée ;
Condamne les époux Z... et les époux Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne in solidum les époux Z... et les époux Y... à payer à Marcel X... la somme de 2 500 euros ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils pour M. X...
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a débouté M. X... de toutes ses prétentions ;
AUX MOTIFS QU'« un moyen nouveau peut toujours être soulevé en cause d'appel et qu'une partie ne peut pas être privée du double degré de juridiction de ce fait ; que la clause litigieuse de l'acte de partage du 4 janvier 1985 est ainsi rédigée : " La parcelle n° 1029 attribuée à monsieur Alfred X... sera grevée d'un droit de passage à tous usages, de la manière indiquée au plan ci-annexé, au profit des immeubles cadastrés sous les numéros 1030 et 1024, attribués à monsieur Marcel X..., mais uniquement pendant le délai d'un an ci-dessus stipulé pour l'enlèvement du bassin. Au cas où ce délai d'un an ne serait pas respecté par monsieur Alfred X..., le bassin, à l'expiration de ce délai, deviendrait la propriété de monsieur Marcel X..., de même que la portion de cour grevée pendant ce délai du droit de passage ci-dessus prévu " ; qu'il en résulte que la servitude de passage n'avait qu'une durée annuelle, qu'Alfred X... devenait propriétaire de la cour par l'effet du partage et que le transfert de la propriété de la portion de cour grevée qu'il consentait au profit de Marcel X... était soumis à la condition du non enlèvement du bassin par lui-même dans le délai d'un an ; que, selon l'article 28 du décret n055-22 du janvier 1955, " Sont obligatoirement publiés au bureau des hypothèques de la situation des immeubles : 1° Tous actes, même assortis d'une condition suspensive, et toutes décisions judiciaires, portant ou constatant entre vifs : a) mutation ou constitution de droits réels immobiliers... 4° les actes ou décisions judiciaires, énumérés ci-après, lorsqu'ils portent sur les droits soumis à publicité en vertu du 1° :... b) Les actes constatant l'accomplissement d'une condition suspensive ; qu'il résulte des éléments ci-dessus qu'Alfred X... a successivement cédé la portion de cour litigieuse d'abord à son frère Marcel, par l'effet de l'acte de partage et de la réalisation de la condition suspensive du fait du non enlèvement du bassin, puis en nue-propriété à son fils Maurice par la donation-partage du 3 mars 1993, puis à monsieur et madame Y..., par l'effet des ventes du 12 novembre 1996 de l'usufruit par lui-même et de la nue-propriété par son fils Maurice, et que ces derniers l'ont ensuite revendue aux époux Z... ; que, Marcel X... n'a pas fait publier son acquisition résultant de la réalisation de la condition suspensive, mais que les autres mutations ont été régulièrement publiées ; que, en vertu de l'article 30 du même décret de 1955, " les actes et décisions judiciaires soumis à publicité par application du 1° de l'article 28 sont, s'ils n'ont pas été publiés, inopposables aux tiers qui, sur le même immeuble, ont acquis, du même auteur, des droits concurrents en vertu d'actes ou de décisions soumis à la même publicité et publiés " ; que les droits de Marcel X... sont donc inopposables aux autres acquéreurs successifs, que le jugement doit être réformé et que monsieur Marcel X... doit être débouté de ses prétentions contre les époux Z... ; que monsieur Marcel X... ne peut faire aucun reproche à maître A... qui n'avait aucune obligation de conseil à son endroit et qui n'a commis envers lui aucune faute quasi délictuelle, n'ayant pu que constater lors de la vente Y...- Z... que monsieur Marcel X... n'était en droit de faire aucune revendication sur le bien cédé » ;
ALORS QUE, premièrement, il résulte des articles 28. 4° et 30. 4° du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 que le défaut de publicité des actes déclaratifs portant sur des immeubles n'a pas pour sanction leur inopposabilité aux tiers ; qu'en décidant que le défaut de publicité par M. Marcel X... d'un acte constatant la réalisation de la condition suspensive à laquelle était subordonné son droit sur la cour litigieuse rendait la réalisation de cette condition inopposable et le droit qui en découlait inopposables aux tiers, la cour d'appel a violé les articles 28. 4° et 30. 4° du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 ;
ALORS QUE, deuxièmement et subsidiairement, chaque indivisaire est censé avoir succédé seul et immédiatement à tous les effets compris dans son lot ou à lui échus sur licitation et n'avoir jamais eu la propriétés des autres effets de l'indivision ; que la condition accomplie a un effet rétroactif au jour auquel l'engagement a été contracté ; qu'en considérant que Marcel X... tenait son droit sur la portion de cour litigieuse d'Alfred X..., lorsque Marcel X... était devenu propriétaire de cette portion à la suite de l'accomplissement d'une condition suspensive figurant dans l'acte de partage du 4 janvier 1985 passé entre Alfred X... et Marcel X..., de sorte que ce dernier tenait son droit de la convention de partage et donc du défunt dont la succession était partagée et non d'Alfred X..., la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 30 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955, ensemble des articles 883 et 1179 du code civil ;
ALORS QUE, troisièmement et subsidiairement, en qualité d'officier public, le notaire est responsable même envers les tiers de toute faute préjudiciable commise par lui dans l'exercice de ses fonctions et ne peut, dès lors, prêter son ministère pour conférer le caractère authentique à une convention dont il sait qu'elle méconnaît les droits d'un tiers ; qu'en jugeant que Maître A..., qui a reçu l'acte de vente sur la cour litigieuse passé entre les époux Y... et Z... en janvier 2004, n'avait pas commis de faute à l'égard de Marcel X..., lorsque cet officier ministériel avait omis de reproduire dans l'acte de vente la clause de l'acte de partage du 4 janvier 1985 qui subordonnait le droit de propriété de Marcel X... sur la cour à la réalisation d'une condition suspensive, ce qui aurait pourtant rendu le droit de Marcel X... opposable, en toute hypothèse, aux époux Y... et Z..., la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil."