Sur mon voyage en Sibérie, encore une anecdote à raconter.
Je discutais avec un monsieur chinois très sympathique, très ouvert, très classe.
Lui – ah vous venez de France ; c’est très bien la France. Vous les européens vous avez fait d’énormes progrès scientifiques depuis 3 siècles. En chimie particulièrement. Vous allez à toute vitesse. Nous avons beaucoup à apprendre de vous.
Moi – oui c’est vrai que l’histoire chinoise récente est plus trouble en matière de développement scientifique. Disons que vous avez plus réfléchi à la modernité au sens social et culturel.
- Combien faut il d’argent pour un jour en france ?
- Je ne sais pas ; disons 50 euros d’hotel et 80 euros pour vivre et se déplacer, soit 1300 kuais par jour.
- Ah bon je vais aller visiter la france alors !
- Vous faites quel travail ?
- J’ai perdu mon travail (失业) je suis au chomage maintenant.
(je prends un air un peu décontenancé, presque un air de condoléances mais lui n’a pas l’air malheureux du tout)
- Et vous travailliez où ?
- Là bas dans les docks du port
(et il me montre une minable installation portuaire au loin en aval, toute vétuste. Je ne comprends pas qu’un homme aussi fin ait pu travailler là dedans. Mais il n’y pas d’industrie à Heihe ; les hivers sont trop froids pour faire tourner les machines).
- Et alors vous recherchez un travail maintenant ?
- Non non; je fais un peu de bourse tous les jours, et je vis bien mieux qu’avant ! Je peux venir me baigner dans la rivière.
(je suis estomaqué par son histoire. Visiblement ses boursicotages vont lui permettre d’aller visiter la france).
Arrive un de ses amis qui le salue puis me salue. Cet homme est étonnant ; il a le visage d’un vieux monsieur européen, très digne. On aurait pu le croiser dans les rues du seizième arrondissement à Paris. Il ne ressemble pas du tout à un chinois. Nous discutons un peu ; ses deux parents étaient russes mais lui ne parle pas russe du tout. Il est chinois un point c’est tout. Je ne veux pas trop insister mais suppute qu’il est l’orphelin d’une débacle quelconque il y a quelques décennies. Quelqu’un a du le recueillir et l’éduquer en chinois. Cet homme avait l’air très équilibré. Un beau vieillard.