Belle dégustation de Bordeaux 2001

Par Eric Bernardin

Samedi dernier, les DAB's se sont réunis une nouvelle fois afin de passer en revue un certain nombre de Bordeaux 2001. Cela permettait de tester la qualité de ce millésime sous-estimé pour certains. Nous avons dégusté en aveugle des vins des deux rives de la Gironde dans un ordre décidé par Daniel. Nous verrons qu'il avait son importance...

Lagarosse Les Comtes 2001 (Côtes de Bordeaux): robe vermillon trouble avec des reflets d'évolution. L'évolution se confirme au nez avec des notes de sous bois riche en champignon, mais aussi de petits fruits rouges à l'eau de vie. En agitant un peu plus, on arrive sur des notes de vieille barrique pas vraiment excitantes. En bouche, c'est rond, plutôt fruité, avec une matière assez légère. Les tannins discrets au départ se durcissent en fin de bouche, et donnent un côté asséchant à la finale. Ce vin un peu plat est déjà sur le déclin. Lorsqu'on découvrira l'étiquette, je comprendrai mieux ma perplexité: il aurait déjà dû être bu il y a 3-4 ans... 13.5/20

Les Gravières 2001 (St-Emilion): robe un peu plus sombre, translucide. Nez aérien sur les fruits mûrs, un léger grillé et une touche d'épices. Vin assez vif à l'attaque, puis plutôt souple, fruité, d'une bonne intensité aromatique. On est loin d'un monstre de puissance, mais ça se laisse bien boire, avec une finale assez persistante, avec une impression de légère sucrosité. 14.5/20

Montus 2001 (Madiran): robe noire violacée. Nez plus intense dominé par l'élevage (grillé très marqué avec quelques fruits noirs en arrière-plan). Bouche d'un beau volume avec de la fraîcheur et des tannins veloutés. La finale asséchante et amère me dérange quelque peu. 15/20

Lynsolence 2001 (St-Emilion):  robe rouge sombre aux reflets violacés. Nez fin, assez complexe, à la fois fruité et floral, soulignée par un léger toasté. Bouche ample, moelleuse, d'une grande harmonie. Les tannins sont bien fondus et contribue au bel équilibre du vin. Finale un peu sèche, mais c'est bon! 16/20

Montbousquet 2001 (St-Emilion): robe vraiment sombre. Nez digne de la boutique d'un torréfacteur, mais un peu déplacée pour un vin. Après une attaque que je trouve agressive, la bouche se révèle déséquilibrée: acide, tannique, à l'élevage écrasant, et la finale est d'une amertume insupportable.  Le prototype de ce que je n'aime pas. 12.5/20 (pour être sympa)

Aiguilhe 2001 (Côtes de Castillon):Joli nez bien mûr sur les fruits rouges écrasés, la prune et les épices. Bouche ronde, souple, bien mûre, aux tannins hésitant entre le velours et la soie.  Belle harmonie générale d'un vin dans sa maturité. On lui pardonne volontiers une petite dureté en finale. C'est franchement bon. 16/20

Sociando-Mallet 2001 (Haut Médoc): nez sensuel sur les fruits noirs, le café et les épices. Bouche ample, d'une belle fraîcheur avec une matière mûre, veloutée. Finale un peu dure avec une pointe d'amertume.  Pas mal. 15/20

Léoville Barton 2001 (St Julien): robe rouge violacée. Nez sur le cassis, le pain grillé et les épices. Bouche mûre, délicate, soyeuse avec de la maturité et de la fraîcheur. Les tannins sont mûrs et parfaitement fondus. Très bel équilibre général. J'aime beaucoup (même si d'autres lui trouvent des défauts). 16.5/20

Léoville Las Cases 2001 (St Julien): robe sombre. Nez un brin surmûri au toasté bien marqué et une légère sensation de volatile. La bouche donne une sensation presque moelleuse, avec un manque de fraîcheur et de structure. Finale astringente. J'aurais tendance à trouver plutôt des problèmes sur cette bouteille. J'ai déjà bu deux fois Las Cases 2001: il n'a jamais ressemblé à la bouteille de ce soir. Une déception. 14/20

Troplong Mondot 2001 (St Emilion): beau nez mûr encore marqué par l'élevage. Bouche fraîche, bien mûre, soutenue par une belle acidité et des tannins polis. Bonne finale. Ce vin n'a aucun défaut, mais il lui manque le charme qui est la signature des grands vins. 16/20

Pavie-Macquin 2001 (St-Emilion): très beau nez profond, fruité et floral à la fois, avec une pointe d'épices (élevage quasi absent). Bouche superbe: élégante, fine, avec de la fraîcheur et un équilibre renversants. Harmonie est le maître mot de ce vin et celle-ci perdure dans la finale qui ne devrait pas s'appeler ainsi, puisque le vin vous habite des minutes entières... La classe!  Je ne suis pas vraiment surpris de découvrir que c'est Pavie-Macquin. A chaque dégustation, il est mon coup de coeur! 17/20

Griffes du Cap d'Or 2001 (Montagne St-Emilion): robe opaque pourpre. Nez assez puissant sur des beaux fruits mûrs avec des notes toastées. Bouche ronde, moelleuse, veloutée, d'une bonne richesse, mais c'est assez monolithique et ne provoque pas d'émotion. La finale dure et astringente n'arrange pas son cas. Le prototype du style international sans intérêt (même si c'est plutôt bien fait). 15/20
La Tour Carnet 2001 (Médoc): nez dominé par l'élevage (torréfié) laissant percevoir un joli fruit en arrière-plan. Bouche ample, mûre, assez langoureuse, mais d'un bon équilibre (acidité et fraîcheur présentes). Les tannins sont bien fondus. Petite astringence en finale. Ce vin (que j'ai amené) était nettement meilleur à l'ouverture. Là, je trouve qu'il est devenu un peu trop "putassier". 14.5/20

Gruaud-Larose 2001 (St Julien): nez bien mûr mais aussi bien boisé. Bouche de beau volume, assez gourmande, avec des tannins veloutés. Ca se durcit beaucoup en finale avec une astringence marquée. Dommage. 14/20
Haut-Bailly 2001 (Pessac-Léognan): nez séduisant, frais révélant des fruits noirs mûrs et des épices. Bouche toute aussi séduisante, mûre, épanouie, avec des tannins fondus (et qui le restent jusqu'en finale). Bel équilibre général. Aucun défaut, mais comme Troplong, il manque l'étincelle qui change tout. 15.5/20

Talbot 2001 (St Julien): nez  fin, mûr avec des notes d'élevage assez appuyées. La bouche bien mûre se délite assez rapidement. C'est mou, manquant de structure et d'élan. La finale est malgré tout persistante. Apparemment pas en place. 14/20
Ermitage "le pied de la côte " 1999 Jaboulet (Pirate): nez friand et rafraîchissant par rapport à tout ce que j'ai bu pour l'instant. Les notes de cerise, de cuir et d'épices - poivre entre autres - surprennent dans le contexte (dès ce moment-là, je pars en côtes du rhône). Bouche ample, généreuse, d'une limpidité quasi cristalline. Le contraste est saisissant avec les autres vins. Finale mûre de bonne persistance. 16/20

Roc de Cambes 2001 (Côtes de Bourg): nez franchement grillé. Y a pas, on est retourné dans le Bordelais... Bouche mûre, plutôt gourmande, mais avec rapidement une sensation d'écoeurement. Finale dure. Bof. 14/20
Puy Galland "Le Fleuron" 2001 (Côtes de Francs)
nez fin, frais, ciselé... vraiment chouette! Bouche fine, mais les tannins pointent vite leur nez: durs, astringents. C'est pas en place (le sera-t-il jamais?). 13.5/20

Pour conclure, les "rive droite" sont plus accessibles actuellement que les Médocs (plutôt que "rive gauche", car Haut-Bailly se goûte bien). Le rapport qualité/prix de la soirée revient sans conteste à l'Aiguilhe (mais ce n'est pas vraiment une surprise). Et Pavie Macquin est vraiment au-dessus du lot par sa classe et son élégance, loin des artifices d'autres châteaux.

Merci à Joseph pour son accueil et à Daniel pour l'organisation!