Captif est un roman qui se lit vite et bien. Police conséquente, interligne prononcé, marges importantes. Les phrases sont courtes, basiques dans leur construction. Le sujet, verbe, complément est de rigueur. Personnellement je n'ai rien contre, c'est parfois dans la sobriété que les mots révèlent toute leur portée, qu'ils claquent, percutent, ou trouvent la voie de la justesse, quand ce n'est pas tout cela à la fois. Cela dépend du contexte. Du style, aussi. Captif a un peu manqué le coche de ce point de vue là. Peut-être justement parce que tout va trop vite, que les intentions de Kenny se révèlent - à peine - dans la précipitation. Il n'y a pas de gradation réellement perceptible dans sa colère, dans la violence de ses actes, dans l'ambivalence de sa morale, de ce qu'il pense être juste ou pas. Tout s'opère sans vraiment de nuances, ce qui a pour conséquence directe de mettre le lecteur en retrait, de couper net la voie de l'empathie. Et à un ou deux près, il en va de même pour les autres personnages, non pas qu'ils se soient révélés trop caricaturaux, mais juste sans chair et sans saveur, comme désincarnés. Neil Cross a beau leur faire exprimer la douleur, la peine, le dégoût, le désespoir, ces sentiments ne résonnent ni n'éclatent jamais en nous. Finalement, on glisse dessus comme sur ce roman qui ne devrait pas me laisser un souvenir impérissable.
Captif, Neil Cross, traduit de l'anglais (Grande-Bretagne) par Renaud Morin, Belfond (Belfond noir), 350 p.