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Kosovo : les devoir de l'Union Européenne

Publié le 17 février 2008 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com

Comment désamorcer la bombe sociale balkanique?

22089eac9a0a44af08416f9e1403a65d.jpgEt maintenant ? Quel advenir pour le Kosovo ? SUA l’Union européenne de bien jouer. Et de se donner les moyens d’assumer ce qu’elle est, en dépit des divergences entre les 27 : la marraine du nouvel Etat d’Europe. Un Etat qui reste « illégal » tant que la résolution 1234 du Conseil de sécurité de l’ONU n’est pas remplacée… Mais un Etat qui va être reconnu par une bonne centaine de pays dans les jours qui viennent en dépit des menaces de rétorsions de la Serbie et de la Russie.

De deux choses l’une : soit les Kosovars sont aidés dans leurs développements démocratique, économique et social par l’Union, soit ils sont insuffisamment ou maladroitement soutenus par la même Union.

Dans le premier cas, les Balkans peuvent cesser d’être le « merdier » qu’y voyait déjà Bismarck. Dans le second cas, le dernier soubresaut de l’implosion yougoslave sera le premier signe d’un séisme aux conséquences forcément graves.

Ce ne sont pas les forces de l’ordre, civiles mais dirigées par un militaire, de l’EULEX qui vont jouer un rôle clef : ce sont les investissements dans un développement local harmonieux et juste. Et les efforts qui, dans le droit fil des recommandations du Conseil de l’Europe, imposeront respect des minorités à l’intérieur de la province devenue Etat et une politique de bon voisinage et de coopération dans l’ensemble des Balkans.

Soyons clairs : l’indépendance est, dans le contexte actuel, non la meilleure, mais la moins mauvaise solution. « On ne pisse pas contre le vent », redirait De Gaulle. Principe de réalité d’abord. Le statu quo était intenable à terme. Un protectorat international devient vite humiliant. Et une terre à souveraineté limitée devient forcément un champ de bataille pour forces géopolitiques antagonistes à vocation de pyromanes…

Ces deux dernières années, le gouvernement serbe et les autorités albanaises du Kosovo ont mené des « négociations » qui, par bien des aspects, n’ont été qu’un théâtre de faux-semblants. Masques, faux-nez, « pensées de derrière », comme disait Pascal.

Avec des Américains à la fois juges et parties, des Russes trop heureux de trouver en terre d’Europe un terrain de manœuvres géopolitiques, des Serbes qui trouvent en cette terre mythique un ciment nationaliste contre leurs divisions internes. Et avec des Européens divisés... Divisés parce que inquiets de l’effet mimétique de ce mouvement séparatiste, chez eux et ailleurs. Ou des pressions et chantages russes en matière énergétiques.

Que va faire Belgrade ? Première question. « Pas d’intervention armée programmée », rassurent les Serbes. Tant mieux. Sauf si, bien sûr, des désordres graves mettaient en péril la communauté serbe du Kosovo… Or qu’est-ce qui peut favoriser ce type de « désordre » ? Plus des révoltes de la misère et des règlements de compte entre mafias que des réflexes d’intolérance culturelle… Ces désordres là, un embargo serbe envers le nouvel Etat pourrait bien les favoriser.

Le Kosovo dépend largement en effet, de la Serbie pour son approvisionnement énergétique et de nombreux produits de base. Déjà, il vit depuis 1999 au rythme d’incessantes coupures de courant, et sous la loi capricieuse des contrebandiers qui exploitent la pénurie de produits alimentaires. La misère, premier fléau à combattre. D’où notre appel en faveur d’une politique de l’Union en rupture avec cette « Europe des pingres » qui se donne si peu les moyens de ses ambitions.

Ces troubles de la misère risquent d’éclater surtout dans le nord du pays peuplé de Serbes en majorité. Là, les milices, groupes paramilitaires et provocateurs en tout genre abondent dans le camp serbe comme dans le camp albanais : une arme devient moyen de survivre. A travers des « institutions  parallèles », des cellules de type ethnique et mafieux. Cet « état dans l’Etat » est une vraie poudrière.

Quelles seront les ondes de choc de cette indépendance kosovarde dans les minorités albanaises des autres pays des Balkans ? Deuxième question. Qui en entraîne une troisième : comment réagiront, en Bosnie notamment, les minorités serbes à cet « affront anti-serbe » ? « Grande Albanie » contre « grande Serbie » :les Balkans dans les carcans des nationalismes mystiques alimentés par des frustrations sociales et des peurs cultivées…. Sur fond d’instabilité politique chronique, d’impuissance internationale, de stérilité économique, d’explosion démographique et de mouvements migratoires qui concernent tous les pays d’Europe ou presque.

Deux chiffres révélateurs parmi d’autres :le chômage frappe environ 60 % de la population active du Kosovo alors que 60 % des Kosovars ont moins de 25 ans, et que chaque mois, 40 000 jeunes fêtent leur dix-huitième anniversaire sans avoir presque aucune possibilité de construire leur vie dans leur pays… La bombe du Kosovo est d’abord une bombe sociale. C’est cet explosif là que l’Union doit d’abord désamorcer.

Daniel RIOT


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