Norvège, 91 morts... Quel fossé il y a, qui se creuse chaque jour, entre cette gauche arrogante si sûre de revenir au pouvoir et les drames de l’actualité qui réclament originalité et
profondeur dans la recherche des réponses à proposer aux citoyens !
C’est étrange comme les éléments qui s’entrechoquent dans
l’actualité pourraient donner sens. Ou plutôt, donner du non-sens, apporter le manque de sens.
Des drames…
La fin de la semaine est secouée (entre autres) par deux faits d’actualité de très grande importance.
Le premier est le plan de secours pour la Grèce et plus généralement pour
l’euro, avec en première ligne Nicolas Sarkozy et Angela Merkel et leurs longues négociations du 20 juillet 2011. Ceux qui n’y voient que rafistolage ou tromperie se trompent
d’analyse. C’est lors de ces moments-là que l’Histoire s’active. On ne le sait qu’après coup, avec le recul du temps, mais il suffit de regarder dans le passé d’autres crises pour s’en convaincre
(j’ai souvenir de mars 1983 en France).
L’autre est beaucoup plus tragique puisqu’il s’agit du double attentat en Norvège le vendredi 22 juillet 2011 : au moins
quatre-vingt-onze morts, à Oslo et à Utoeya. Le plus meurtrier d’Europe depuis sept ans, depuis les cent quatre-vingt-onze victimes des attentats de Madrid du 11 mars 2004, en pleine campagne
électorale.
L’origine semble être individuelle, un militant d’extrême droite de 32 ans en colère (Anders Behring Breivik) qualifié par la police
norvégienne de "fondamentaliste chrétien", ce qui ne signifie rien du tout ; c’est la première fois que je vois cette expression, on pourrait parler d’intégristes, de traditionalistes, mais
de fondamentalistes chrétiens, je n’en connais aucun et j’imagine que cette expression a été lâchée aux médias qui en usent et en abusent uniquement pour bien insister sur le fait que ce n’était
pas un terroriste islamiste, mais au contraire une personne ayant exprimé sur Internet de nombreux propos islamophobes (plutôt que de "fondamentalisme chrétien", il eût été plus pertinent de
parler d’une certaine "islamophobie d’extrême droite").
Parallèlement au carnage, le siège du Premier Ministre Jens Stoltenberg a été ravagé (voir la photo) et c’est bien lui, son gouvernement et son parti qui ont été la cible puisque sur l’île d’Utoeya, c’était dans un camp de vacances
où se déroulait l’université d’été des jeunes du Parti travailliste… Je frémis rétrospectivement en pensant à une bonne quinzaine d’universités d’été auxquelles j’ai pu participer dans ma
"jeunesse".
Et "Martine" dans tout cela ?
Islamophobie, travaillisme… Mon esprit se détourne immanquablement vers la candidate Martine Aubry. Voici que même elle, celle qui avait refusé toute immixtion
dans la vie privée, se fend d’un article people et de la "Une" du "Paris Match" de cette semaine pour présenter son mari, Jean-Louis Brochen, à l’allure visiblement "bien française", histoire de
dire qu’elle n’a rien à voir avec les "arabes". Bon, c’est vrai, je caricature, mais c’était sans doute le sens voulu d’une telle sortie médiatique. En gros, j’apprends que Martine Aubry est très
heureuse, elle file le parfait bonheur avec son mari. Bon, oui, je suis très content pour elle, c’est toujours sympa, un couple heureux, n’est-ce pas ? (Notons par ailleurs que Martine Aubry
a tout à fait le droit de porter le patronyme de son ancien époux, le Code civil l'y autorise et c'est bien normal si elle s'était fait connaître dans sa carrière professionnelle ou politique
avec ce nom-là. Ceux qui contestent ce droit devraient en parler aux très nombreuses femmes divorcées qui l'utilisent).
Mais c’est une sortie médiatique bien pauvre quand on sait qu’elle est parmi les deux ou trois personnes les mieux placées pour devenir
Président(e) de la République française le 6 mai 2012 ! Elle ne trouve rien de mieux à faire que de la communication à deux sous alors que le monde est en flamme…
Quant à "Eva" et ses copines…
On a dit Norvège ? Sans doute le rêve du 14 juillet 2011 d’Eva Joly est moins vide de sens, moins creux que cet étalage dans un journal à grand tirage. Mais dans ce cas-là aussi, je m’interroge sur
l’intelligence de proposer la fin des défilés militaires (unique occasion de saluer le courage et le dévouement de nos armées) quand six de nos compatriotes se font tuer en Afghanistan. Erreur de discernement ou maladresse, qu’importe,
je frémis de l’imaginer comme chef des armées dans quelques mois…
Surtout avec les surenchères de sbires tels que la sénatrice écolo de Paris Alima Boumediene-Thiery, ex-députée européenne et transfuge du
PS, se plaignant par-dessus le marché auprès de Luc Chatel (Ministre de l’Éducation nationale) et de Patrick Gérard (recteur de l’académie de Paris) de ses prétendus trop faibles revenus pour
essayer de court-circuiter les filières habituelles d’attribution de places dans les internats pour son enfant. Je rêve ! Joly la probité !
Le creux est souvent politiquement universel
Évidemment, on pourrait aussi bien piocher à droite qu’à gauche pour souligner la vacuité et parfois l’insignifiance des propositions et l’absence de
réponse claire face aux enjeux tragiques de notre monde en souffrance.
Mais tout de même : c’est cette gauche, ouvertement alliée malgré ses multiples candidatures, celle du PS, des Verts (je ne dis pas
EELV qui n’est qu’une façade) et sans doute du Front de gauche (appellation plus soft pour dire PCF + Mélenchon), qui est donnée ultragagnante pour gouverner dans neuf mois ! Elle n’a ni idée ni crédibilité pour assumer ce pouvoir. Pire, elle
croit avoir déjà les clefs. Dominique Strauss-Kahn aurait déjà établi
tout un plan de nominations futures avant sa désastreuse arrestation
à New York.
Pour le PS, c’est comme en 2002, la victoire est obligatoire ("devoir de victoire" a bien répété Martine Aubry !). Elle est déjà intégrée. Elle est déjà acquise. L’ours est déjà
vendu.
Soubresaut estival
Et pendant ce temps, devinez quoi ? Nicolas Sarkozy, qui a eu le bon goût de se taire et de rester discret depuis deux mois,
continue à faire le "job" (mot qui, évidemment, passe mal auprès des personnes, comme moi, qui considèrent la fonction présidentielle un peu "sacrée", sacrée par l’onction du suffrage universel direct), continue à travailler et continue à "sauver
l’Europe" ou du moins, à "sauver l’euro".
Mécaniquement, Nicolas
Sarkozy remonte dans les sondages. C’est logique. D’une part, parce qu’il ne pouvait plus vraiment descendre ; d’autre part, sa prudence présidentielle, qui étonne, renforce son
image d’homme actif au détriment du beau parleur en campagne. Une stratégie de communication probablement gagnante même si peu ont intérêt, même parmi les siens, à sa réélection l’année
prochaine.
Effet miroir
Alors, la gauche ! Une élection présidentielle, ce n’est pas un "Loft Story" politique où il s’agirait de montrer sa famille
ou d’exprimer ses petits caprices d’adolescent. Il s’agit de prendre en compte tous les enjeux d’aujourd’hui et de convaincre les Français qu’elle serait capable de les aborder avec le moins de
casse possible et le plus de clairvoyance possible.
Mettre cette couverture de "Paris Match" du 21 juillet 2011 à côté de celle du "Aftenposten" du 23 juillet 2011, le journal le plus
important de Norvège, reprenant l'apocalypse du 11 septembre 2001, pourrait paraître un peu démagogique ou de mauvaise foi car il n’y a objectivement aucune relation entre les deux. Mais j’y vois
au contraire un élément pourtant frappant d’évidence, aussi frappant que dans la campagne de 2002 : l’immense décalage du PS par rapport à la réalité sociale et économique du pays.
À "leur" place, je m’inquiéterais…
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (24 juillet
2011)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
Martine Aubry.
Eva Joly.
Martine, Eva…
Jean-Luc Mélenchon.
http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/face-aux-tragedies-du-monde-la-98032