Cette lecture sera discutée lors du club des lectrices qui se réunit aujourd’hui. Son avis rejoint le mien.
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Avec L’œuvre, j’ai redécouvert Emile Zola que j’avais beaucoup lu jeune et que j’avais d’ailleurs un peu oublié. J’ai pourtant retrouvé des souvenirs de lecture ; l’écriture de Zola a donc résisté pour ma part au temps grâce à sa richesse, la précision des détails, la description minutieuse des situations, la beauté des personnages. J’ai éprouvé des difficultés au démarrage car L’œuvre n’est pas un roman comme on a l’habitude d’en lire ; le récit n’est pas particulièrement haletant, il n’y a pas d’énigme véritable. Un peu comme dans un documentaire, on sent très vite qu’on rentre dans une époque et un milieu, la fin du 19ème siècle et sa période d’effusion artistique.
Un personnage principal, Claude Lantier, va incarner cette période, jeune peintre en recherche qui est entré en peinture comme on rentrerait dans les ordres, y dédiant presque l’intégralité de sa vie. D’autres protagonistes vont accompagner le récit, notamment Sandoz, l’ami de toujours et Christine, principale figure féminine du roman qui va aimer passionnément Claude, dans une quasi- mortification d’elle-même. Il n’est en effet jamais simple de vivre aux côtés d’un artiste et de comprendre ce qui l’anime ; Claude Lantier est un personnage torturé, complexe, en lutte avec lui-même pour atteindre la perfection, entretenant un rapport quasi-passionnel avec ses toiles. Il ne trouve pas la reconnaissance attendue, dans une époque encore trop formatée artistiquement ; ses peintures originales s’articulent mal avec la sensibilité de ses contemporains, ce qui lui vaut rejet et humiliation. Il s’acharnera malgré tout, dans une sorte de folie et d’obsession qui lui coûtera la vie.
C’est un roman sur la création et la souffrance qu’elle engendre ; mais c’est aussi toute une période que Zola a voulu dépeindre au travers de la vie de bohème, des longues déambulations des artistes dans les rues de paris, des soirées entre amis passés dans des cafés, des salons officiels. J’ai aimé faire ce voyage dans une époque en proie à une véritable effervescence ; la description qu’en fait Zola vient atténuer la teneur dramatique du parcours du jeune peintre, ce qui me fait dire que ce roman n’est pas complètement noir. Certes, nous sommes face à un artiste qui souffre mais dans sa douleur et son impuissance, son œuvre qu’on essaie d’imaginer paraît plus grande encore.
Ce qui m’a manqué pour appréhender toutes les ficelles de ce livre, c’est une connaissance plus poussée de cette époque et des rapports que Zola entretenait avec elle et le monde de la peinture. C’est toujours intéressant de faire le rapprochement entre la fiction et la réalité ; j’aurais mieux compris le message qu’il a voulu faire passer.